Dunes

Rédacteur : Guy Chezeau

Physionomie – écologie

Il y a là toute une série d’habitats présentant un ensemble de caractéristiques communes. Ce sont des habitats littoraux, sur substrat meuble de sables coquilliers de formation récente (quelques milliers d’années pour les plus anciens), modelés par le vent et plus ou moins stabilisés.
Plusieurs facteurs permettent cependant de les différencier. L’influence de la mer, des apports de sel et du vent, diminue au fur et à mesure que l’on s’éloigne de la plage en même temps que la stabilité du substrat augmente. On peut passer ainsi rapidement de conditions d’aridité extrême à des milieux franchement hydromorphes.
Les types de végétations qui se succèdent selon des bandes plus ou moins parallèles au rivage vont des annuelles pionnières (haut de plage) aux boisements plus ou moins âgés (arrière-dune boisée, objet d’une fiche spécifique : « Forêts de Pin maritime »), en passant par des milieux où dominent les cryptogames, lichens et mousses. Il en résulte des adaptations spécifiques causes d’une endémicité relativement importante. L’influence de l’homme sur ces habitats pour avoir été assez tardive n’en est pas moins grandissante depuis plus d’un siècle.
Immédiatement au contact supérieur des laisses de haute mer apparaît un habitat linéaire assez instable et par conséquent plus ou moins développé au sein duquel dominent des populations parfois denses de Chiendent à feuilles de jonc Elymus farctus, c’est la dune embryonnaire. Localement, le Pourpier de mer Honckenia peploides peut être abondant. L’apparition de l’Oyat des sables Ammophila arenaria, celle de l’Euphorbe des dunes Euphorbia paralias et celle du Panicaut des dunes Eryngium maritimum permettent de définir la dune blanche. Ces deux premiers habitats sont regroupés sous l’appellation générique de « dunes mobiles » (COR 16.21).
L’halonitrophilie y est très variable, le recouvrement au sol toujours faible de l’ordre de 20 à 30%, la végétation dominée par des espèces vivaces, géophytes à rhizomes et hémicryptophytes. Les adaptations assurent une grande résistance au vent et à la forte mobilité du substrat en même temps qu’à l’aridité résultant de l’extrême perméabilité de la dune. On observe ainsi le très grand développement d’un double système racinaire (horizontal et vertical). Plusieurs espèces patrimoniales trouvent ici leur développement optimum, la Linaire à feuilles de thym, Linaria thymifolia, la Silène de Thore, Silene thorei ainsi que l’Armoise de Lloyd, Artemisia Lloydii ou encore l’Œillet de France, Dianthus gallicus.
À l’arrière, apparaissent des végétations pelousaires pérennes à mousses et lichens ou à dominante de phanérogames annuelles et vivaces selon les synusies saisonnières. L’ensemble prend un aspect qui lui a fait donner le nom générique de « dune grise ou dune fixée » (COR 16.22). Sur le littoral de la Charente Maritime on y distingue deux habitats, tous les deux considérés comme prioritaires par la Directive européenne des Habitats : les dunes grises des côtes atlantiques et les pelouses annuelles arrière dunaires. Les végétaux appartiennent à une seule strate basse au sein de laquelle dominent les chaméphytes associés à diverses herbacées. La présence des mousses et des lichens formant un tapis dense est susceptible d’entraîner un recouvrement important (jusqu’à 100%). Si la quantité d’eau disponible peut être suffisante durant les mois humides assurant par-là même le développement de nombreuses plantes annuelles qui germent avant l’hiver, fleurissent et fructifient au printemps suivant, l’aridité est extrême durant les mois d’été. Les lichens du genre Cladonia réduisent leur métabolisme,les graminées (Koeleria, Corynephorus…) cherchent à recueillir la moindre humidité en enroulant leurs feuilles en forme de gouttière, d’autres espèces comme l’Immortelle des sables Helichrysum stoechas limitent leur évapotranspiration foliaire, d’autres enfin (Sedum) ont accumulé lors de la saison des pluies l’eau dont elles ont besoin. Une espèce patrimoniale trouve ici son développement optimum, le Cynoglosse des dunes, Omphalodes littoralis.
À la lisière de la dune boisée, il est possible parfois d’observer une végétation arbustive moyenne à haute, formant une broussaille impénétrable ou un fourré dense au sein duquel deux espèces sont dominantes : le Troëne Ligustrum vulgare et le garou ou sain bois Daphne gnidium, il s’agit d’un habitat équivalent aux broussailles à Argousier (Hippophae rhamnoides) et Troëne des côtes de la Manche et de la mer du nord, ici dans une variante thermophile. Ces dunes avec fourrés et bosquets (COR 16.25) se rencontrent sur l’ile d’Oléron, ailleurs cet habitat est très fragmentaire.

Phytosociologie et correspondance typologiques

PVF 2004
Euphorbio paraliae-Ammophiletea australis Gehu & Géhu-Franck 1988 : dunes mobiles
Ammophiletalia australis Br.Bl.
Ammophilion arenariae Géhu 1988
EUPHORBIO PARALIAE-AGROPYRETUM JUNCEI
EUPHORBIO PARALIAE-AMMOPHILETUM ARENARIAE
SILENO THOREI-AMMOPHILETUM ARENARIAE
FESTUCO DUMETORUM-GALIETUM ARENARII
Koelerio glaucae-Corynephoretea canescentis Klika & Novak 1941 : dunes fixées
Artemisio lloydii-Koelerietalia albescentis Sissingh 1974
Euphorbio portlandicae-Helichrysion staechadis Géhu & Tüxen ex Sissingh 1974
ARTEMISIO LLOYDII-HELICHRYSETUM STAECHADIS
Thero-Airion Tüxen ex Oberdorfer 1957
Crataego monogynae-Prunetea spinosae Tüxen 1962
DAPHNO GNIDII-LIGUSTRETUM VULGARIS

COR 1991

16.21 Dunes mobiles
16.22 Dunes fixées
16.25 Dunes avec, fourrés, bosquets

Directive Habitats 1992

2110 Dunes mobiles embryonnaires
2120 Dunes mobiles du cordon littoral à Ammophila arenaria (dunes blanches)
2130 Dunes côtières fixées à végétation herbacée (dunes grises)
2130-2 Dunes grises des côtes atlantiques
2130-5 Pelouses rases annuelles arrière-dunaires

Confusions possibles

Excepté dans les secteurs fortement dégradés ou à évolution rapide, les systèmes dunaires sont assez facilement identifiables, néanmoins il est parfois difficile de fixer précisément les limites des habitats entre eux. Les cordons dunaires fossiles en situation côtière interne (=non strictement littoraux) peuvent parfois poser problème car le modelé est en général très atténué et la végétation de type prairial mésophile se trouve en continuité aves les systèmes prairiaux alentour.
Par ailleurs, au niveau de la dune fixée peuvent exister des risques de confusion des dunes grises des côtes atlantiques avec celles de la Mer du Nord et de la Manche qui appartiennent à d’autres groupements.

Dynamique

Les milieux dunaires sont soumis à une dynamique naturelle parfois très intense entraînant ici une sédimentation, ailleurs une érosion. De fait cette intensité varie beaucoup d’un secteur à l’autre et peut varier également au cours du temps, d’autant que l’homme cherche souvent à intervenir essentiellement dans la recherche d’une stabilisation de la dynamique sédimentaire (gestionnaire : l’ONF).

Espèces indicatrices

[plante2] Aetheorhiza bulbosa, Ammophila arenaria, Arenaria serpyllifolia ssp.macrocarpa, Artemisia campestris ssp.maritima var.lloydii, *Asparagus officinalis ssp. prostratus,*Avellinia michelii, Calystegia soldanella, Carex arenaria, Centaurea aspera, Clematis flammula, Corynephorus canescens, *Crepis suffreniana, *Dianthus gallicus, Elymus farctus, Ephedra distachya, Erodium lebelii, Eryngium maritimum, Euphorbia paralias, Euphorbia portlandica, Festuca juncifolia, *Galium arenarium, *Galium neglectum, Helichrysum stoechas, Herniaria ciliolata, Honckenia peploides, Koeleria albescens, *Linaria arenaria, *Linaria thymifolia, Matthiola sinuata, *Medicago marina, *Omphalodes littoralis, Ononis repens var.maritima, *Pancratium maritimum, Phleum arenarium, Senecio vulgaris fo.littoralis, *Silene vulgaris ssp. thorei, Viola kitaibeliana
[plante1] Aira praecox, Arenaria leptoclados, *Asterolinon linum-stellatum, Bupleurum baldense, *Carex liparocarpos, Cerastium diffusum, Cerastium semidecandrum, Desmazeria marina, Erodium cicutarium ssp.dunense, Lagurus ovatus, Leontodon taraxacoides, Mibora minima, Sedum acre, Stellaria pallida, Tuberaria guttata, Vulpia fasciculata, V.membranacea, *V.ciliata ssp ambigua
[briophytes] Rhynchostegium megapolitanum, Tortella flavovirens, Tortula ruraliformis
[lichens] Cladonia ciliata, Cladonia chlorophaea, Cladonia fimbriata, Cladonia foliacea subsp convoluta, Cladonia foliacea subsp foliacea, Cladonia furcata, Cladonia mediterranea, Cladonia portentosa, Cladonia rangiformis, Cladonia squamosa, Collema tenax, Leptogium corniculatum, Leptogium gelatinosum, Leptogium lichenoides, Peltigera canina, Peltigera rufescens
[champignons] Agaricus devoniensis, A. menieri, Geopora arenosa, Gyrophragmium dunalii, Gyroporus ammophilus, Inocybe psammophila, L. littoralis, Leucoagaricus idae-fragum, Morchella spongiola dunensis, Omphalina barbularum, Psathyrella ammophila, Stropharia halophila
[amphibiens] Pelobates cultripes
[reptiles] Lacerta lepida
[oiseaux] Anthus campestris, Charadrius alexandrinus
[coleopteres] Ammophila hirsuta, Ammophila sabulosa, Harpalus melancholicus, Pelor inflatus, Phylan gibbus, Polyphylla fulo, Tentyria curculionides, Xanthomus pallidus
[arachnides] Arctosa perita
[mollusques] Cochlicella acuta, Cochlicella barbara, Theba pisana
[orthopteres] Calephorus compressicornis, Dociostaurus jagoi, Platycleis affini, Sphingonotus caerulescens

Valeur biologique

L’ensemble de ces habitats possède un intérêt patrimonial majeur lié à la présence de nombreuses espèces végétales protégées au niveau national et régional, ou inscrites au Livre Rouge de la Flore Menacée de France : Œillet de France Dianthus gallicus, Cynoglosse des dunes Omphalodes littoralis (inscrit à l’Annexe II de la Directive Habitats), Lis des sables Pancratium maritimum, Linaire à feuilles de thym Linaria thymifolia, parmi d’autres.

Menaces

La surfréquentation estivale avec ses corollaires – piétinement de la dune, prélèvements et rudéralisation du milieu – constitue sans doute actuellement la principale menace ; il faut y ajouter la pratique de sports mécaniques (moto verte, quad, 4×4 …), celle du VTT ou des randonnées pédestre ou équestre, toutes en plein développement et dont la première au moins se déroule en totale infraction avec la loi. Des aménagements lourds : infrastructures routières, parkings, urbanisation peuvent être responsables de la disparition définitive du milieu.

Statut régional

Cet habitat strictement limité au littoral de la Charente Maritime a été intégré dans sa majorité aux inventaires ZNIEFF et Natura 2000.

Sites remarquables ou représentatifs

17 : baie de Bonne Anse, dunes de la forêt de la Coubre, côtes ouest et est de l’île d’Oléron, côte ouest de l’île de Ré

 

Végétation annuelle des laisses de mer

Rédacteur : Guy Chezeau

Physionomie – écologie

Il s’agit d’habitats linéaires, ponctuels et discontinus, situés en haut de plage sur substrat de sables ou de galets et sur la partie sommitale de l’estran sur substrat vaseux. D’une manière générale ils se situent immédiatement au-dessus des HMVE (hautes mers de vive eau). Ils apparaissent de plus en plus fréquemment sous l’aspect de structures fragmentaires et en régression, ce qu’il faut mettre en relation avec un recul quasi général du trait de côte en même temps qu’à des interventions humaines.
Le dépôt des laisses de mer riches en matière organiques azotées détermine l’existence d’une végétation halonitrophile. L’existence de ces habitats est donc liée à des conditions stationnelles que l’on rencontre sur la plus grande partie du linéaire côtier ; la nature du substrat permet par contre de caractériser deux grands types d’habitats élémentaires :

  • les laisses de mer sur substrat sableux à vaseux : la végétation est constituée d’annuelles et de bisannuelles halonitrophiles. Il s’agit de thérophytes au comportement pionnier assurant un recouvrement limité du substrat (inférieur à 20%) dont le développement optimal est atteint en été pour disparaître en hiver. Plusieurs espèces sont crassulescentes (Roquette de mer, soudes…).
    On observe une variabilité d’ordre écologique ; sur sable, les espèces dominantes sont le Cakilier maritime Cakile maritima, l’Arroche des sables Atriplex laciniata, la Bette maritime Beta maritima alors que sur les milieux vaseux dominent avec la Bette maritime, l’Arroche hastée Atriplex hastata et les soudes Salsola kali, Salsola soda, Suaeda maritima.
    Les algues en décomposition maintiennent une humidité permanente abritant une masse de crustacés amphipodes du genre Talitrus. Ces puces de mer en se nourrissant des algues en décomposition assurent le recyclage de la matière organique. Les talitres, sauteurs, très actifs la nuit, fuient la marée montante et accompagnent la laisse de mer. D’autres Amphipodes, un cloporte Tylos europaeus, la Forficule des sables Labidura riparia, accompagnent les talitres. À noter également la présence de larves de Diptères (Cercyon littoralis, Fucellia maritima, Fucellia tergina dont les adultes (mouches) sont souvent le prétexte de demandes d’intervention de la part des vacanciers pour l’enlèvement des laisses.
  • les laisses de mer sur cordon de galets : la végétation basse herbacée à faible recouvrement est constituée de thérophytes au comportement pionnier ; parmi les espèces dominantes, on note l’Arroche hastée et la Bette maritime. Ici encore la faune associée est constituée essentiellement de Crustacés détritivores. Ces organismes sont largement exploités à marée haute par de nombreuses espèces d’oiseaux (chevaliers, bécasseaux…).

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004
Cakiletea maritimae Tüxen & Preising ex Br.-Bl. & Tüxen 1952
Cakiletalia integrifolia Tüxen ex Oberdorfer 1950 corr. Rivas-Martinez,Costa & Loidi 1992 : communautés européo-atlantiques
Atriplicion littoralis Nordhagen 1940
BETO MARITIMAE-ATRIPLICETUM LITTORALIS
ATRIPLICI HASTATAE-BETETUM MARITIMAE
Atriplici laciniatae-Salsolion kali Nordhagen 1940
BETO MARITIMAE-ATRIPLICETUM LACINIATAE

Euphorbietalia peplis Tûxen 1950 : communautés méditerranéennes et thermo-atlantiques
Euphorbion peplis Tüxen 1950
MATRICARIO MARITIMAE-EUPHORBIETUM PEPLIS

COR 1991
15.36 Laisses de mer des prés salés atlantiques
16.12 Groupements annuels des plages de sable
17.2 Plages de galets avec végétation sur laisses de mer

Directive Habitats 1992
1210 Végétation annuelle des laisses de mer

  • CH Laisses de mer sur substrat sableux à vaseux des côtes Manche-Atlantique et mer du Nord
  • CH Laisses de mer sur cordons de galets et de graviers des côtes Manche-Atlantique et mer du Nord

Confusions possibles

Ces habitats pionniers temporaires ne peuvent prêter à confusion avec aucun autre habitat sauf contacts supérieurs avec la dune embryonnaire. Dans ces cas, le Chiendent à feuilles de jonc devient l’espèce dominante, le micro-relief est plus marqué et l’habitat persiste même durant la mauvaise saison (habitat structuré par des hémicryptophytes vivaces et non des thérophytes).

Dynamique

Il s’agit d’un habitat éphémère présent de la fin du printemps jusqu’au début de l’hiver. La mobilité du substrat le prive de toute dynamique interne propre. Dans les secteurs de côte sableuse en accrétion, il précède et prépare l’apparition du cordon dunaire embryonnaire à Chiendent à feuilles de jonc. En hauts de prés salés, il peut être colonisé par la prairie glauque à Chiendent piquant.

Espèces indicatrices

[plante2] Atriplex hastata, Atriplex laciniata, Atriplex littoralis, Cakile maritima, Beta maritima, *Euphorbia peplis, Glaucium flavum, Honckenya peploides, Salsola soda, Salsola kali, Suaeda maritima
[plante1] Elymus farctus, Elytrigia atherica, Matricaria inodora ssp.maritima
[oiseaux] Anthus petrosus, Arenaria interpres, Calidris alba, Charadrius hiaticula
[coleopteres] Callicnemis latreilli, Eugrapha trisygnata, Eurynebria complanata, Labidura riparia, Phaleria cadaverina, Psylliodes marcida
[lepidopteres] Agrotis ripae
[crustaces] Talitrus saltator, Tylos europaeus, Tylos latreilli

Valeur biologique

Ces habitats, zones de transition entre milieu aquatique et milieu terrestre, zone de recyclage du matériel organique en épaves, zone de gagnage pour de nombreux oiseaux du littoral, participent à l’équilibre dynamique des littoraux sédimentaires.
Une espèce végétale, considérée comme disparue de la quasi-totalité du littoral atlantique, alors qu’elle était donnée comme commune encore au début du XXéme siècle, vient d’être redécouverte sur le littoral de Charente-Maritime (Euphorbia peplis). Cette euphorbe est protégée au niveau national. Le perce-oreille (Labidura riparia) est en très forte régression sur l’ensemble du littoral. Les autres espèces végétales et animales ne présentent pas de caractère de rareté.
La forte productivité du milieu en fait une zone de nourrissage pour de nombreux oiseaux : Gravelots (Charadrius hiaticula, C. alexandrinus), Bécasseau variable (Calidris alpina), Pipit maritime (Anthus petrosus), Tournepierre à collier (Arenaria interpres)
Les transferts d’énergie de ces types d’habitats « d’interface » mériteraient des évaluations scientifiques approfondies.

Menaces

Ces hauts de plage sont fortement affectés par les rejets anthropiques et les dépôts de toutes natures : déchets des navires et des plaisanciers, hydrocarbures, matériel ostréicole ou mytilicole abandonné, engins de pêche…. l’ensemble étant désigné sous le terme de « macrodéchets ». Cette zone fait l’objet de nettoyages mécaniques totalement destructeurs pour les habitats, la cribleuse étant incapable de faire la part entre laisse de mer et macrodéchets. Le ramassage manuel est parfois réalisé par des brigades départementales qu’il serait nécessaire de former.
Ces habitats sont particulièrement sensibles aux marées noires.

Statut régional

Habitat strictement limité au littoral de la Charente Maritime où il est assez répandu mais partout ponctuel et en régression. Sa valeur patrimoniale est élevée.

Sites remarquables

17 : côtes abritées (est) des îles de Ré et d’Oléron ; anse des Boucholeurs, anse de Fouras

 

Fourrés des prés salés

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie-écologie

En situations primaires, l’habitat existe sur les hauts schorres des fonds de baies dans la zone atteinte seulement par les hautes mers de vives eaux (coefficients de l’ordre de 90-100), sous la forme d’une frange plus ou moins large. En situations secondaires, dans les marais endigués, ses occurrences sont plus variables : linéaires le long des étiers ou en bordure de bassins salicoles ou conchylicoles récemment abandonnés ou encore exploités mais à gestion des rives peu intensive, voire peuplements spatiaux colonisant la totalité d’un ancien bassin lorsque l’hydraulique permet encore des arrivées occasionnelles d’eau marine. Le substrat est assez variable : généralement vaseux à sablo-vaseux, parfois enrichi en débris coquilliers (notamment dans les situations secondaires) ou en débris organiques grâce aux laisses de mer déposées par les grandes marées (situations primaires), il présente en général des périodes de dessication marquée en été.
Physionomiquement, il s’agit de fourrés bas à moyens (50cm à 150cm), dominés, selon les faciès, par l’une ou l’autre de 2 Chénopodiacées sous-frutescentes et crassulescentes :

  • la Salicorne ligneuse Sarcocornia fruticosa est un sous-arbrisseau méditerranéen-atlantique (limite nord en Bretagne), à nombreux rameaux dressés formant un buisson de couleur glauque caractéristique ;
  • la Soude arbrisseau Suaeda vera est un sous-arbrisseau de répartition également méditerranéenne-atlantique (mais qui remonte sporadiquement jusque sur le littoral de la Manche en Normandie), à nombreuses feuilles linéaires, subcylindriques et charnues.
    La stratification verticale est en général assez marquée, une strate herbacée ou ligneuse basse d’Agropyre piquant Elymus pycnanthus ou d’Obione Halimione portulacoides assurant la couverture du sol entre les arbustes.

    La phénologie, comme souvent pour les habitats de prés salés, est tardive, la floraison commençant en août et pouvant se prolonger jusqu’en octobre. La pollinisation est assurée par le vent (anémogamie) et la dispersion des semences par l’eau de mer (hydrochorie).

En Poitou-Charentes, l’habitat est représenté par 2 communautés végétales distinctes :

  • la communauté à Puccinellie maritime et Salicorne ligneuse (PUCCINELLIO MARITIMAE-SALICORNIETUM FRUTICOSAE), sur substrats sablo-vaseux du haut schorre ; plus halophile que nitrophile, elle succède dans le temps aux – ou se trouve en contact spatial supérieur avec les – nappes argentées d’Obione faux-pourpier qui couvrent de vastes surfaces sur les plateaux du moyen schorre ;
  • la communauté à Soude arbrisseau et Agropyre piquant (AGROPYRO PUNGENTIS-SUAEDETUM VERAE), à l’extrême limite supérieure du haut schorre, sur substrats très bien drainés (parfois sur sables purs), généralement enrichis en matière organique ; cette association, assez fortement nitrophile, marque en général la limite d’influence des marées et souligne d’un linéaire vert sombre la frontière entre les végétations de prés salés et les habitats plus continentaux. Elle est aussi très fréquente, à l’intérieur des digues, dans les marais ostréicoles ou salicoles, frangeant les bassins dont l’entretien est suffisamment extensif pour permettre le développement de la végétation ligneuse.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

SALICORNIETEA FRUTICOSAE Br. Bl. & Tüxen 1943

SALICORNIETALIA FRUTICOSAE Br. Bl. 1933

  • Halimionion portulacoidis Géhu 1976
    • PUCCINELLIO MARITIMAE-SALICORNIETUM FRUTICOSAE
    • AGROPYRO PUNGENTIS-SUAEDETUM VERAE

COR 1991

  • 15.623 Fourrés atlantiques d’arbrisseaux à Suaeda vera
  • 15.624 Fourrés atlantiques d’arbustes à Arthrocnemum

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1420 Fourrés halophiles méditerranéens et thermo-atlantiques
    • 1420-1 Fourrés halophiles thermo-atlantiques

Confusions possibles

Sa structure et ses espèces ligneuses dominantes permettent en général d’éviter toute confusion. Une variété couchée de Sarcocornia fruticosa ressemble toutefois beaucoup à Sarcocornia perennis : la position le long du gradient topographique du pré salé, les espèces compagnes et, le cas échéant, l’observation des graines (tuberculeuses chez S.fruticosa, pubescentes chez S.perennis) permettent en général de trancher sur l’identité de l’habitat.

Des situations intermédiaires, d’interprétation délicate, semblent exister entre la communauté à Soude arbrisseau et Agropyre piquant et la prairie glauque à Agropyre piquant (habitat 15.3) : la dominance de l’un ou l’autre des types biologiques – chaméphyte ligneux dans le premier, géophyte à rhizome dans le second – est alors un bon guide pour trancher, de même que la présence d’espèces compagnes différentielles.

Dynamique

La dynamique naturelle interne de l’habitat est très faible du fait des fortes contraintes écologiques ; les liens observés entre les différentes communautés du schorre sont donc plus de l’ordre du simple contact spatial que l’indice d’une possible dynamique.

Espèces indicatrices

[plante2] Elymus pycnanthus, Sarcocornia fruticosa, Suaeda vera
[plante1] Halimione portulacoides, Puccinellia maritima, Sarcocornia perennis
[oiseaux] Carduelis cannabina, Luscinia svecica namnetum
[orthopteres] Epacromius tergestinus

Valeur biologique

La communauté à Puccinellie maritime et Salicorne ligneuse est inscrite au Livre Rouge des Phytocénoses terrestres du littoral français (catégorie UICN : « Vulnérable ») et considérée comme « en régression par les aménagements de salines et de bassins ostréicoles ». L’habitat – dans son ensemble – est considéré comme menacé en Europe et figure à l’Annexe I de la Directive 92/43/CEE dite « Directive Habitats ».
Sur le plan botanique, aucune espèce de forte valeur patrimoniale n’est connue régionalement au sein de l’habitat.

Menaces

La communauté à Puccinellie maritime et Salicorne ligneuse nécessite pour son développement l’existence de longues séquences d’atterrissement de prés salés qui permettent la pleine expression du gradient décroissant de submersion par les eaux marines. De telles séquences sont devenues rares sur le littoral de Charente-Maritime où la partie supérieure des séries est généralement tronquée par l’existence de digues. La communauté se retrouve également dans les marais aménagés mais est alors souvent réduite à un mince linéaire le long de certains bassins et, en général, avec une composition floristique moins typique. Dans certains cas exceptionnels toutefois d’abandon de marais aménagés, ni trop récent ni trop ancien, le PUCCINELLIO-SALICORNIETUM FRUTICOSAE peut couvrir la totalité du fond de certains bassins : il s’agit cependant d’une situation éphémère, condamnée à évoluer en quelques décennies vers des habitats plus « continentalisés » avec la ruine du réseau hydraulique, la cessation des arrivées d’eau marine et l’influence des eaux de pluie collectées par le bassin.
La communauté à Soude arbrisseau et Agropyre piquant ne semble en revanche pas directement menacée : elle s’adapte bien aux modifications d’habitats et s’implante facilement dans les marais aménagés, à condition toutefois que l’entretien ne soit pas trop « sévère ».

Statut régional

Habitat présent potentiellement sur l’ensemble de la frange littorale de Charente-Maritime et de ses îles. La communauté primaire à Salicorne ligneuse n’existe toutefois que dans certains sites privilégiés, surtout insulaires, où les séquences ne sont pas tronquées par l’endiguement :

17 : baie de Bonne Anse, pointe sud de l’île d’Oléron, Fier d’Ars (île de Ré)

 

Prés salés méditerranéens et thermo-atlantiques

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie-écologie

La prairie subhalophile thermo-atlantique se développe dans les grands marais arrière-littoraux de Charente-Maritime sur un sol argileux compact connu sous le nom local de « bri », à structure fondue en période de forte pluviométrie mais pouvant présenter de profondes fentes de retrait en période estivale. Ce sol, formé à partir d’anciennes alluvions fluvio-marines déposées au cours du Quaternaire récent (colmatage d’anciens schorres), présente des taux de salinité fossile variables selon l’âge de leur dépôt mais en général décroissants selon un gradient ouest/est. Malgré un macro-relief globalement plat (l’altitude moyenne est comprise entre + 2m et + 4m NGF) la micro-topographie est remarquablement variée et permet une importante variabilité de l’habitat :

  • marais « gâts » résultant de l’aménagement par l’Homme d’anciens schorres endigués pour la production de sel et présentant une succession de bassins (les « jas ») de forme et taille variables et de bosses (les « bossis ») formées par les remblais issus du creusement des bassins ; progressivement abandonnée au cours des XVIème et XVIIème siècles en raison du colmatage, la saliculture a laissé la place à un pâturage bovin plus ou moins extensif qui constitue encore aujourd’hui la vocation principale de ces marais gâts ;
  • marais plats, non aménagés par l’Homme, mais présentant encore souvent un micro-relief hérité des anciennes formes du schorre : légères dépressions ou « baisses » où l’eau forme une fiche couche en hiver et au printemps, puis qui s’exondent vers le mois de mai pour devenir très sèches en été, chenaux au cours irrégulier à travers les parcelles et correspondant aux anciens chenaux de drainage du schorre ; la fauche est parfois encore pratiquée dans ce faciès, souvent associée à un pâturage tardif (sur le regain).

    Le climat est de type thermo-atlantique avec un maximum pluviométrique en hiver et un net déficit hydrique entre juin et août.
    L’habitat se présente comme une prairie vivace haute et dense constituée d’hémicryptophytes et de géophytes – sauf au niveau de « taches salées » où les alternances d’engorgement et de dessication favorisent la remontée du sel à la surface du sol et ne permettent plus que le développement de tonsures rases à la composition floristique nettement différente de la périphérie ; les espèces dominantes appartiennent aux familles des Poacées, des Cypéracées (la Laîche divisée Carex divisa est une des espèces emblématiques de l’habitat) et des Fabacées (le genre Trifolium, avec près de 10 espèces, est exceptionnellement bien représenté) ; les Apiacées (3 espèces du genre Oenanthe) et les Renonculacées peuvent être aussi abondantes. La phénologie varie selon la position topographique mais, en conditions moyennes d’hydromorphie, le pic végétatif est atteint entre le 20 mai et le 10 juin.

La variabilité de l’habitat s’effectue surtout en fonction de l’hydromorphie et de l’halomorphie des sols, elles-mêmes étroitement dépendantes de la micro-topographie ; le type de gestion agricole (fauche/pâturage, intensité du piétinement) influe également sur la composition végétale :

  • en conditions moyennes – méso-hygrophiles – se développe la communauté à Trèfle maritime et Oenanthe à feuilles de silaus (TRIFOLIO SQUAMOSI-OENANTHETUM SILAIFOLIAE) pour les prairies fauchées et la communauté à Laîche divisée (CARICI DIVISAE-LOLIETUM PERENNIS) pour les parcelles pâturées ; les secteurs très piétinés abritent une communauté à Trèfle résupiné (PLANTAGINI MAJORIS-TRIFOLIETUM RESUPINATI) ;
  • en conditions plus hydromorphes (baisses, bordures de jas), on observe la communauté à Vulpin bulbeux (ALOPECURO BULBOSI-JUNCETUM GERARDII), voire celle à Renoncule à feuilles d’ophioglosse (RANUNCULO OPHIOGLOSSIFOLII-OENANTHETUM FISTULOSAE) remplacée, en cas de fort piétinement, par un groupement à Menthe pouillot (RANUNCULO OPHIOGLOSSIFOLII-MENTHETUM PULEGII).

Les tonsures se développant sur les taches salées au sein de l’habitat peuvent, selon les cas, être rattachées à une variante halophile de la prairie du 15.52, soit, lorsque le tapis végétal est constitué essentiellement de thérophytes (Parapholis, Hordeum, Spergula, Bupleurum) aux végétations pionnières annuelles du 15.1.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

AGROSTIETEA STOLONIFERAE Th.Müll. & Gors 1969

Alopecurion utriculati Zeidler 1954 : prairies méso-hygrophiles thermo-atlantiques

Potentillion anserinae Tüxen 1947 : prairies méso-hygrophiles piétinées, eutrophes

Oenanthion fistulosae de Foucault 1984 : prairies atlantiques longuement inondables

COR 1991

15.52 Prés salés à Juncus gerardii et Carex divisa

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1410 Prés salés méditerranéens
    • 1410-3 Prairies subhalophiles thermo-atlantiques

Confusions possibles

La localisation de l’habitat en situation propé-littorale permet en général d’éviter les confusions. Cependant, sur la bordure interne des marais arrière-littoraux, et vers l’amont des vallées fluviales, la prairie subhalophile thermo-atlantique cède progressivement la place à des prairies humides eutrophes, de nature variable, mais relevant en général de l’habitat 37.2 : communauté à Pulicaire dysentérique et Jonc glauque (PULICARIO-JUNCETUM INFLEXI), communauté à Séneçon aquatique et Oenanthe à feuilles de silaus (SENECIONI-OENANTHETUM SILAIFOLIAE), communauté à Gratiole officinale et Oenanthe fistuleuse (GRATIOLO OFFICINALIS-OENANTHETUM FISTULOSAE) etc..Le lessivage du sel dans le bri ancien, voire la nature différente des alluvions (d’origine fluviale et non plus marine) expliquent ce passage du 15.52 au 37.2.

Dynamique

En cas d’abandon de toute gestion agricole, la prairie subhalophile évolue vers une friche herbacée où dominent quelques Poacées vivaces compétitives comme l’Agropyre Elymus repens, au détriment des nombreuses annuelles qui finissent pas disparaître totalement (cas des Trifolium, notamment). Les séries dynamiques varient ensuite en fonction de la nature des sols : sur bri ancien, presque dessalé, des fourrés eutrophes à Prunellier ne tardent pas à s’implanter, préparant la venue d’une ormaie-frênaie arrière-littorale à Arum d’Italie et Iris fétide (ARO-ULMETUM MINORIS). Sur bri plus récent, avec des taux de sels encore importants, l’apparition des espèces ligneuses est plus lente, voire impossible pour des essences comme le Frêne.

Valeur biologique

L’habitat – dans son ensemble – est considéré comme menacé en Europe et figure à l’Annexe I de la Directive 92/43/CEE dite « Directive Habitats ». Sur le plan botanique, l’habitat présente un intérêt floristique élevé comme biotope pour plusieurs espèces végétales rares ou menacées : la Renoncule à feuilles d’ophioglosse, espèce protégée au niveau national et inscrite au Livre Rouge de la Flore Menacée de France (taxons non prioritaires) possède dans les grands marais arrière-littoraux charentais une population de plusieurs millions de pieds qui en fait, probablement, le bastion actuel de l’espèce sur tout le territoire français. L’Iris maritime, splendide espèce aux grandes fleurs bleues protégée en région Poitou-Charentes, possède dans les prairies du 15.52 ses seules stations extra-méditerranéennes et les effectifs encore présents dans certaines parcelles du marais de Rochefort se comptent en milliers d’individus. L’abondance de certains trèfles rares comme le Trèfle de Micheli ou le Trèfle
faux-pied d‘oiseau est également remarquable, de même que la présence de taxons à aire essentiellement méridionale comme Centaurium spicatum ou Hordeum gussoneanum qui trouvent dans les marais charentais (et sud vendéens) leur limite septentrionale de distribution.

L’avifaune des marais arrière-littoraux charentais est d’une grande richesse et originalité comme en témoigne le nombre élevé de Zones de Protection Spéciale décrites à ce jour. En raison du grand rayon d’action des oiseaux et de leur utilisation de différents habitats au cours d’un cycle annuel, il est toutefois difficile d’isoler l’intérêt spécifique des seules prairies pour ceux-ci, indépendamment des milieux voisins aussi largement utilisés (boisements, haies, fossés, mares cynégétiques, prés salés, estuaires). Les prairies subhalophiles doivent donc être considérées comme une pièce parmi d’autres du complexe d’habitats littoraux indispensable à la survie de cette avifaune remarquable

Menaces

La menace essentielle concernant l’habitat réside dans un changement de gestion agricole : l’intensification des prairies – fertilisation, charges pastorales élevés, sursemis d’espèces fourragère productives, drainage – voire leur transformation pure et simple en cultures intensives (céréales, maïs) ont entraîné au cours des 2 dernières décennies la disparition ou l’altération de milliers d’hectares de marais arrière-littoraux. Ce mouvement massif a pu être en partie freiné depuis 1991 par les mesures agri-environnementales de la PAC qui prévoient l’octroi de compensations financières aux agriculteurs développant des pratiques respectueuses de l’environnement. L’avenir de cet habitat reste cependant suspendu aux aléas de la politique agricole européenne et aux crédits alloués au soutien de la prairie naturelle humide.

Espèces indicatrices

[plante2] Alopecurus bulbosus, Bupleurum tenuissimum, Carex divisa, *Centaurium spicatum, Centaurium tenuiflorum, Galium debile, *Hordeum gussoneanum, *Iris spuria, Juncus gerardii, Mentha pulegium, Oenanthe fistulosa, Oenanthe silaifolia, *Ranunculus ophioglossifolius, Senecio aquaticus, *Trifolium michelianum, *Trifolium ornithopodioides, Trifolium resupinatum, Trifolium squamosum
[plante1] Agrostis stolonifera, Althaea officinalis, Bromus racemosus, *Cardamine parviflora, Carex cuprina, Eleocharis palustris, Eleocharis uniglumis, Gaudinia fragilis, Hordeum marinum, Hordeum secalinum ,Lolium perenne, Oenanthe pimpinelloides, Parapholis strigosa, Plantago coronopus, Ranunculus sardous, Trifolium fragiferum
[oiseaux] Alauda arvensis, Asio flammeus, Cisticola juncidis, Miliaria calandra, Motacilla flava, Saxicola rubetra, Vanellus vanellus

Les 4 trèfles caractéristiques de l’habitat :

Statut régional

L’habitat est présent dans les grands marais arrière-littoraux de Charente-Maritime, ainsi que, plus localement, dans les îles. Il remonte également en amont des vallées fluviales, dans la zone d’influence de l’eau saumâtre apportée par les marées.

17 : marais Poitevin, marais de Rochefort (optimal), marais de Brouage (optimal), marais de Seudre (local), estuaire Gironde (local), val de Charente (jusqu’à Taillebourg)

 

Prés salés atlantiques

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie – écologie

L’habitat regroupe l’ensemble des végétations pérennes, herbacées ou frutescentes basses, colonisant la partie moyenne de la zone intertidale et inondables plus ou moins régulièrement par les marées. Le substrat est vaseux ou vaso-sableux selon les situations, toujours salé mais parfois aussi imprégné d’eau douce par des suintements phréatiques ou des apports latéraux (estuaires). La teneur en matière organique est variable mais peut être localement renforcée au niveau des zones de dépôt des laisses de mer. En séquence naturelle, l’habitat se trouve en contact inférieur avec les prairies à spartine (15.2) ou les salicorniaies pionnières annuelles à Salicornia fragilis/dolichostachya (15.1), alors que le contact supérieur s’effectue souvent avec un linéaire ou une frange plus ou moins large de fourrés à Suaeda vera (15.6) précédant une digue de protection contre les incursions marines. En sites perturbés (marais endigués), l’habitat colonise les bordures de bassins subissant encore des entrées occasionnelles d’eau salée et les bordures du réseau hydraulique (étiers, chenaux, ruissons).

La variabilité régionale de l’habitat est très importante en fonction de la durée et de la fréquence des submersions par l’eau salée ou selon la nature du substrat. Une quinzaine de communautés différentes sont connues sur le littoral charentais, qui se regroupent en 5 ensembles distincts :

  • les prés salés du bas schorre : ils sont inondés régulièrement lors des hautes mers de forts coefficients. La végétation, à dominante herbacée ou ligneuse selon les faciès, présente en général un fort recouvrement et l’Aster maritime Aster tripolium y joue souvent un rôle physionomique important. 2 communautés sont présentes : la prairie salée à Puccinellia maritima (HALIMIONO-PUCCINELLIETUM MARITIMAE) sur sol vaseux inondé fréquemment et à ressuyage lent, et la prairie à Sarcocornia perennis (PUCCINELLIO-SARCOCORNIETUM PERENNIS), des substrats moins asphyxiques, parfois sableux ;
  • les prés salés du schorre moyen : ils colonisent le plateau du schorre, régulièrement inondé mais à ressuyage rapide. Ils sont représentés par 2 communautés : la prairie argentée à Obione (BOSTRYCHIO-HALIMIONETUM PORTULACOIDIS, association végétale centrale des prés salés du Centre-Ouest où elle couvre de vastes surfaces) et le pré salé piétiné à Glycérie fasciculée (ASTERO TRIPOLII-PUCCINELLIETUM FASCICULATAE) présent dans la moitié nord de la France sur les schorres mais rencontré sur le littoral charentais uniquement en situations saumâtres à l’intérieur des digues ;
  • les prés salés du haut schorre : ils ne sont submergés que 2 fois par mois lunaire, au moment des vives eaux provoquées par les syzygies (alignement du Soleil, de la Terre et de la Lune), voire encore plus rarement, lors des marées de très forts coefficients (équinoxes). Dans certains faciès, la sécheresse du substrat peut être assez marquée alors que dans d’autres, une nappe phréatique douce peut imprégner jusqu’aux horizons supérieurs du sol. C’est à ce niveau que la variabilité est la plus forte, avec 7 communautés possibles : la prairie à Fétuque littorale (FESTUCETUM LITTORALIS) des hauts de prés salés peu atteints par la marée, la prairie basse à Plantain maritime et Statice commun (PLANTAGINI MARITIMI-LIMONIETUM VULGARIS) des sub-cuvettes planes sur sol sablo-vaseux, le pré à Armoise maritime (ARTEMISIETUM MARITIMAE),sur les très hauts niveaux enrichis en matière organique, le pré à Jonc de Gérard (LIMONIO VULGARIS-JUNCETUM GERARDII), sur des schorres humectés d’eau douce, le pré à Laîche étirée (JUNCO MARITIMI-CARICETUM EXTENSAE) sur des sols fortement imprégnés d’eau douce phréatique, le pré à Cranson d’Angleterre (COCHLEARIO ANGLICAE-PLANTAGINETUM MARITIMAE) de certaines cuvettes plates du schorre supérieur, et le pré à Glycérie de Foucaud (HALIMIONO-PUCCINELLIETUM FOUCAUDII) des bordures estuariennes saumâtres ;
  • les prés salés du contact haut schorre/dune : ils se développent très localement sur sols sablo-limoneux dans les rares sites où des prés salés viennent en contact avec des dunes ; la submersion par les eaux marines est exceptionnelle et n’intervient que lors des marées d’équinoxes. 2 communautés sont connues : le pré à Statice à feuilles de lychnis (LIMONIETUM LYCHNIDIFOLIO-DODARTII) des hauts schorres sableux et le pré à Statice à feuilles ovales (groupement à Frankenia laevis et Limonium ovalifolium) de statut encore incertain ;
  • les prairies hautes des niveaux supérieurs : elles sont localisées à la frange supérieure des schorres, dans la zone où s’accumulent les matières organiques apportées par les hautes mers de vives-eaux ; le sol y est riche en azote et peut subir une dessication intense en été. 2 communautés sont connues : la prairie nitro-halophile à Agropyre piquant (BETO MARITIMAE-AGROPYRETUM PUNGENTIS), haute prairie d’un vert glauque typique se développant dans la zone d’accumulation des débris organiques salés, et la prairie à Inule faux-crithme (AGROPYRO PUNGENTIS-INULETUM CRITHMOIDIS), fréquente dans les marais endigués sur sols enrichis en restes coquilliers.

Beaucoup de ces faciès peuvent se développer en situations secondaires, en bordure des bassins des marais endigués : leur développement est alors souvent linéaire et les séquences sont téléscopées sur les berges en l’absence d’un gradient progressif de submersion/exondation ; bien que ces situations présentent une composition floristique souvent appauvrie par rapport à leurs homologues des prés salés primaires, elles constituent souvent le biotope d’élection pour plusieurs communautés de la marge supérieure des schorres dont elles ont été éliminées par les divers aménagements réalisés au cours des siècles (endiguement, surtout) : prairie à Fétuque littorale, pré à Armoise maritime, prairie à Inule faux-crithme.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

ASTERETEA TRIPOLII Westhoff et Beeftink 1962

GLAUCO MARITIMAE-PUCCINELLIETALIA MARITIMAE Westhoff et Beeftink 1962 : prairies salées atlantiques européennes

Puccinellion maritimae Christiansen 1927 : schorres inférieurs à moyens

Armerion maritimae Br.Bl. & de Leeuw 1936 : niveaux hauts à supérieurs des schorres

Glauco maritimae-Juncion maritimi Géhu et Géhu-Franck

2004 : milieux saumâtres

COR 1991

  • 15.3 Prés salés atlantiques
    • 15.31 Prés salés avec Puccinellia maritima
  • 15.32 Groupements à Puccinellia maritima des prés salés
  • 15.33 Communautés du schorre supérieur
  • 15.34 Prés salés à Puccinellia et Spergularia marina
  • 15.35 Végétation à Elymus pycnanthus

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1330 Prés salés atlantiques
    • 1330-1 Prés salés du bas schorre
    • 1330-2 Prés salés du schorre moyen
    • 1330-3 Prés salés du haut schorre
    • 1330-4 Prés salés du contact schorre/dune
    • 1330-5 Prairies hautes des niveaux supérieurs atteints par la marée

Confusions possibles

L’habitat se distingue aisément des autres habitats en contact lorsque la zonation produit des ceintures plus ou moins larges et disjointes ; dans certains cas toutefois de schorres à micro-topographie complexe, un effet de mosaïque peut entraîner des mélanges par taches plus ou moins juxtaposées de 15.1/15.2/15.3, voire 15.6. Cette structure « en écailles » nécessite de grandes précautions méthodologiques lors de la réalisation de relevés de végétation destinés à être traités ultérieurement dans des tableaux phytosociologiques, sous peine de ne pas satisfaire à divers critères d’homogénité (écologique, floristique, physionomique).

Par ailleurs, la variabilité interne très forte de l’habitat peut entraîner des difficultés pour référer telle ou telle portion de pré salé à l’un ou l’autre des 5 groupes, notamment dans les inévitables zones de transition (spécialement à la jonction bas schorre/schorre moyen).

Dynamique

La dynamique naturelle interne de l’habitat est très faible du fait des fortes contraintes écologiques ; les liens observés entre les différentes communautés du schorre sont donc plus de l’ordre du simple contact spatial que l’indice d’une possible dynamique.

Valeur biologique

4 communautés sont inscrites au Livre rouge des Phytocénoses terrestres du littoral français (GEHU, 1991) : le pré salé piétiné à Glycérie fasciculée (ASTERO TRIPOLII-PUCCINELLIETUM FASCICULATAE), le pré à Armoise maritime (ARTEMISIETUM MARITIMAE), le pré à Statice à feuilles de lychnis (LIMONIETUM LYCHNIDIFOLIO-DODARTII) et la prairie à Inule faux-crithme (AGROPYRO PUNGENTIS-INULETUM CRITHMOIDIS). _ 2 autres communautés, de description postérieure à la rédaction de cette synthèse, mériteraient de figurer également sur ce Livre Rouge : le pré à Glycérie de Foucaud (HALIMIONO-PUCCINELLIETUM FOUCAUDII), synendémique des côtes charentaises et le pré à Statice à feuilles ovales et Frankénie lisse, de statut phytosociologique encore non formellement défini. Tous les faciès de l’habitat sont par ailleurs inscrits à l’Annexe I de la Directive Habitats et sont donc considérés comme rares/menacés en Europe.

7 espèces végétales régionalement ou nationalement rares/menacées sont concernées par cet habitat : la Glycérie de Foucaud Puccinellia foucaudii, endémique du littoral franco-atlantique et le Statice à feuilles ovales Limonium ovalifolium, figurent au Livre Rouge de la Flore Menacée de France comme taxons prioritaires.

Les 5 autres présentent surtout une rareté régionale : le Cranson d’Angleterre Cochlearia anglica est localisé à un petit secteur de l’estuaire Seudre ; l’Armérie maritime Armeria maritima, très commune dans d’autres régions atlantiques (Bretagne), reste rare en Poitou-Charentes (Seudre, surtout) ; le Statice à feuilles de lychnis Limonium auriculae-ursifolium – longtemps confondu avec le Statice à feuilles ovales – possède une distribution régionale plus restreinte que ce dernier et n’est connu avec certitude que de l’île de Ré et de la presqu’île d’Arvert ; la Laîche étirée Carex extensa reste très disséminée, ses occurrences étant liées à un phénomène rare, la présence de suintements phréatiques doux au niveau du pré salé ; quant à la Glycérie fasciculée Puccinellia fasciculata, ses stations sont très dispersées dans les secteurs les plus saumâtres des grands marais arrière-littoraux (Seudre, Brouage, Rochefort) encore soumis à un pâturage bovin régulier.

Espèces indicatrices

[plante2] *Armeria maritima, Aster tripolium, Beta vulgaris ssp.maritima, *Carex extensa, *Cochlearia anglica, Elytrigia x acuta, Elymus pycnanthus, Festuca rubra ssp.littoralis, Frankenia laevis, Glaux maritima, Halimione portulacoides, Inula crithmoides, Juncus gerardii, *Limonium auriculae-ursifolium, Limonium dodartii, *Limonium ovalifolium, Limonium vulgare, Plantago maritime, *Puccinellia fasciculata, *Puccinellia foucaudii, Puccinellia maritima, Sarcocornia perennis, Spergularia media, Triglochin maritimum
[plante1] Atriplex prostrata, Bolboschoenus maritimus, Juncus acutus, Juncus maritimus, Samolus valerandi, Sonchus maritimus, Spergularia marina, Suaeda maritima
[champignons] Agaricus bernardii
[oiseaux] Asio flammeus, Himantopus himantopus, Luscinia svecica namnetum, Recurvirsotra avosetta, Tringa totanus

Menaces

Des modifications de la sédimentation – naturelles ou induites par divers aménagements – sont susceptibles, par érosion ou « engraissement », de modifier l’agencement des communautés. L’endiguement du haut schorre pour la création d’infrastructures portuaires, conchylicoles ou piscicoles ou à des fins d’aménagements touristiques peut faire disparaître de précieuses communautés, notamment celles inféodées à la partie supérieure des prés salés. Divers problèmes plus ponctuels tels que le creusement de mares cynégétiques ou le passage d’engins motorisés lourds pour l’accès aux zones ostréicoles sont susceptibles aussi d’altérer l’habitat. Le piétinement peut être également un facteur défavorable, particulièrement en ce qui concerne la zone de contact schorre/dunes. Au titre des impacts indirects, on retiendra surtout l’eutrophisation du bassin versant et les pompages dans les nappes phréatiques, susceptibles d’altérer la balance trophique et la nature du substrat.

Dans les situations secondaires (marais endigués), les différents faciès de l’habitat sont bien sûr beaucoup plus exposés : ils restent alors entièrement dépendants d’un réseau hydraulique en bon état permettant les arrivées régulières d’eau marine, faute de quoi une dérive dynamique vers des communautés saumâtres s’enclenche en l’espace de 1 ou 2 décennies. Ils restent aussi bien sûr à la merci de tout changement de vocation des bassins et, notamment, d’une intensification des méthodes aquacoles.

Statut régional

L’habitat est présent potentiellement sur l’ensemble de la frange littorale de Charente-Maritime et de ses îles.

17 :

  • situations primaires : baie de l’Aiguillon, Fier d’Ars (île de Ré), baie de Moëze, estuaire Seudre, baie de Bonne Anse
  • situations secondaires : marais endigués autour du Fier d’Ars (île de Ré), anciens marais salants d’Oléron, estuaire Seudre
 

Prés à spartines

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie-écologie

L’habitat regroupe des végétations graminéennes pionnières vivaces occupant la partie inférieure des prés salés correspondant à la haute slikke, plus rarement les dépressions du schorre. Le substrat est constitué de sédiments fins – vases ou sables -, plus ou moins consolidés et saturés régulièrement d’eau salée (en moyenne 2 fois par cycle de 24H, lors des hautes marées). La végétation forme une prairie dense, monostrate, haute de 30-130cm, dominée par 1 ou 2 Poacées du genre Spartina : la Spartine maritime Spartina maritima et la Spartine d’Angleterre Spartina anglica, cette dernière espèce étant un hybride fertile naturel issu du croisement entre la Spartine maritime et une spartine américaine Spartina alterniflora dans le sud de l’Angleterre au cours du XIXème siècle. Les spartines sont des géophytes développant un réseau dense de stolons qui ancrent les plantes dans les vases molles de la slikke tout en assurant leur propagation centrifuge à partir d’îlots pionniers de forme souvent concentrique. La floraison est tardive, en fin d’été et début d’automne, la pollinisation étant assurée par le vent (anémogamie) et la dispersion des semences par le flot.

Le cortège végétal de la spartinaie est d’une grande pauvreté en raison des contraintes écologiques. On y rencontre surtout des algues des genres Fucus, Bostrychia, Pelvetia, Ulva, Enteromorpha et des phanérogames halophiles transgressives des végétations situées en contact : Zostère naine Zostera noltii ou salicornes annuelles du groupe Salicornia fragilis/dolichostachya pour les contacts inférieurs, Salicorne rampante Sarcocornia perennis ou Aster maritime Aster tripolium pour les végétations du bas schorre en contact supérieur.

La variabilité régionale de l’habitat tient à la dominance de l’une ou l’autre des 2 spartines qui ont amené à la description de 2 associations végétales distinctes :

  • le SPARTINETUM MARITIMAE  : c’est la spartinaie européenne d’origine, aujourd’hui en nette régression du fait de la concurrence de la suivante ;
  • le SPARTINETUM ANGLICAE  : spartinaie néophyte, apparue au XIXème siècle et en pleine expansion. Plus haute et plus dense que la précédente, elle possède un pouvoir dynamique et des aptitudes colonisatrices très élevés, tendant à supplanter la spartinaie maritime dans les localités où les 2 phytocénoses coexistent.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

SPARTINETEA GLABRAE Tüxen in Beeftink 1962

Végétation pionnière vivace des vases molles salées et saumâtres, longuement inondables

Spartinion anglicae Conard 1935 : communautés européennes

COR 1991

15.2 Prairies à spartine

15.21 Prairies à Spartine à feuilles plates

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

1320 Prés à Spartina

Confusions possibles

La spartinaie maritime indigène peut facilement être confondue avec la spartinaie anglaise dominée par une néophyte invasive. La distinction des 2 espèces structurantes de spartines est alors indispensable : chez Spartina maritima, l’angle formé par les feuilles avec la tige est très aigu, les limbes sont enroulés presque sur toute leur longueur et ils sont rapidement caducs (il suffit de tirer légèrement sur une feuille pour la détacher) ; chez Spartina anglica, l’angle feuilles/tige est beaucoup plus ouvert, le limbe est plan et très persistant (il faut tirer fort pour le détacher de la tige).

Dynamique

Dans les sites à bilan sédimentaire positif, la spartinaie maritime tend à coloniser l’espace au détriment d’autres habitats (cette évolution est observable en plusieurs point du Fier d’Ars sur l’île de Ré, notamment au débouché du Chenal des Villages où les surfaces occupées par Spartina maritima ont été multipliées par 3 au cours des dernière décennies). Dans divers sites côtiers autrefois endigués mais aujourd’hui abandonnés, la spartinaie maritime tend à conquérir du terrain (Fiers d’Ars, estuaire de la Seudre) témoignant de ses aptitudes pionnières dans la végétalisation des prés salés.

Espèces indicatrices

[plante2] Spartina anglica, Spartina maritima
[plante1] Aster tripolium, Limonium vulgare, Salicornia fragilis, Sarcocornia perennis, Suaeda maritima
[oiseaux] Anser anser, Anthus pratensis, Carduelis cannabina, Emberiza schoeniclus,Motacilla flava
[mollusques] Hydrobia ventrosa, Leucophysia (Auriculinella) bidentata, Myosotella myosotis, Peringia ulvae

Valeur biologique

La spartinaie maritime figure au Livre Rouge des Phytocénoses terrestres du Littoral français (GEHU, 1991) : « seule spartinaie européenne, cette phytocénose est en très forte régression, voire disparition, dans bien des sites sous la pression de la phytocénose néophyte Spartinetum townsendii (=spartinaie anglaise) qui la concurrence rapidement ». C’est à ce titre également qu’elle figure à l’Annexe I de la Directive Habitats. Sa richesse floristique est toutefois très faible et elle n’abrite aucune espèce végétale rare ou menacée. Sur le plan de la faune, elle joue le rôle de nourricerie et de refuge pour les juvéniles de diverses espèces de poissons.

Menaces

En dehors des pressions classiques pesant sur les prés salés – remblaiements, endiguements pour la réalisation d’ensembles conchylicoles, modification des bilans sédimentaires par la réalisation d’ouvrages littoraux – la principale menace concernant les spartinaies maritimes du littoral charentais est leur invasion/ remplacement par la spartinaie anglaise : jusqu’en 1970, Spartina anglica était cantonnée de l’estuaire de la Gironde à la Seudre (limite extrême à la pointe méridionale de l’île d’Oléron) pour se retrouver ensuite plus au nord en Baie de l’Aiguillon, le hiatus entre les deux étant occupé par la seule Spartina maritima. Depuis cette date, la spartine anglaise n’a pas cessé sa progression vers le nord : la côte est d’Oléron est maintenant largement conquise et quelques pieds ont même été observés en baie de Moëze, laissant seule intacte la zone comprise entre l’estuaire de la Charente et l’île de Ré.

Cette espèce, d’un pouvoir dynamique très élevé, possède une aptitude exceptionnelle à la fixation des particules amenées par le courant et à l’accélération de la sédimentation, favorisant par là même l’accroissement de la surface des schorres. La colonisation peut être très rapide (de quelques touffes à un millier d’hectares en baie des Veys en Normandie entre 1906 et 1920 !) et se fait en général au détriment des autres habitats situés en contact. La forte biomasse produite entraîne en retour une eutrophisation qui modifie les conditions de milieu des habitats contigus.

Du fait de cette vitesse redoutable de colonisation, la spartinaie anglaise ne s’insère pas réellement dans la dynamique des écosystèmes littoraux mais tend plutôt à prendre la place des habitats occupant son niveau bionomique.

Statut régional

L’habitat est assez répandu sur la façade littorale de Charente-Maritime, notamment dans les principaux sites de prés salés :

17 : prés salés du Fier d’Ars (île de Ré), prés salés de la côte est de l’île d’Oléron, de la baie de Moëze, des estuaires de la Seudre et de la Gironde, de la Baie de Bonne-Anse

 

Végétations pionnières annuelles sur sol salé

Physionomie-écologie

Cet habitat regroupe des formations dominées par des plantes annuelles appartenant surtout aux familles des Chénopodiacées (salicornes, soude) et des Poacées, sur des sols vaseux ou sableux, périodiquement inondés ou aspergés par les eaux marines, de la frange littorale. Quatre grands types de biotopes sont concernés : la slikke et le schorre des vasières tidales, les replats et micro-cuvettes des falaises maritimes, les dépressions dans les dunes et certaines prairies saumâtres arrière-littorales. Selon les faciès, l’habitat occupe des surfaces très ponctuelles de l’ordre du m² (ou moins) comme sur les falaises, alors que dans d’autres comme les prés salés il peut constituer des ceintures assez larges dont la zonation souligne le gradient de submersion par la mer ou divers accidents micro-topographiques (chenaux de drainage, cuvettes). La physionomie varie elle-même fortement en fonction des espèces structurantes – pelouses rases et discontinues à Sagine/salicorniaies hautes et denses – mais le tapis végétal est en général dominé par un faible nombre d’espèces, voire même parfois par une seule (6 des 12 associations connues en Poitou-Charentes sont dominées par une seule espèce de salicorne !). Cependant, la variabilité régionale de l’habitat est forte et, à ce jour, 12 associations végétales ont été décrites.

Les salicorniaies à Salicornia dolichostachya (rare), S.fragilis ou S.obscura et les pelouses à Soude maritime occupent la partie inférieure des prés salés (haute slikke) où elles entrent souvent en contact avec la prairie à spartines.

Les salicorniaies à Salicornia ramosissima, S.pusilla ou S.emerici colonisent le schorre et ses cuvettes mais se rencontrent souvent aussi en arrière des digues, dans des sites halophiles modifiés par l’Homme (marais salants, polders, secteurs conchylicoles). Sur les schorres naturels, elles forment des mosaïques souvent complexes avec les végétations vivaces ou ligneuses des prés salés (voir fiche « Prés salés atlantiques »).

Les pelouses rases à Sagine maritime et diverses Poacées (Parapholis, Desmazeria) ou Brassicacées (Cochlearia, Hymenolobus) se rencontrent dans des biotopes variés mais en général sur des sols à fraction sableuse importante : contact dunes/prés salés, micro-cuvettes des falaises, sentiers littoraux…

Les pelouses à Orge marine ou Orge hérisson sont moins strictement liées à la frange côtière puisqu’on peut les rencontrer sous forme de taches plus ou moins extensives au sein des prairies saumâtres pâturées des grands marais arrière-littoraux sur des sols subissant une dessication intense en été.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

THERO-SALICORNIETALIA DOLICHOSTACHYAE Tüxen ex Boullet & Géhu

Salicornion dolichostachyo-fragilis Géhu & Rivas-Martinez

Salicornion europaeo-ramosissimae Géhu & Géhu-Franck

SAGINETALIA MARITIMAE Westhoff, van Leeuwen & Adriani 1962

Saginion maritimae Westhoff, van Leeuwen & Adriani 1962

COR 1991

  • 15.1 Gazons pionniers salés
    • 15.11 Gazons à Salicorne et Suaeda
    • 15.12 Gazons halo-nitrophiles à Frankenia
    • 15.13 Groupements à Sagina et Cochlearia

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1310 Végétations pionnières à Salicornia et autres espèces annuelles des zones boueuses et sableuses
    • 1310-1 Salicorniaies des bas niveaux (haute slikke atlantique)
    • 1310-2 Salicorniaies des hauts niveaux (schorre atlantique)
    • 1310-4 Pelouses rases à petites annuelles subhalophiles

Confusions possibles

Les risques de confusion concernent surtout les salicorniaies des prés salés mais le niveau bionomique permet en général de faire la différence entre les salicorniaies de bas niveau et celles du haut schorre. En fin de floraison, la couleur peut être une aide précieuse : les salicornes tétraploïdes des bas niveaux ne rougissent jamais mais deviennent jaunes ou brunes au moment de la fructification alors que les salicornes diploïdes des hauts niveaux virent au rouge plus ou moins intense selon les espèces. L’identification des communautés à Sagine et Poacées requiert quant à elle une attention fine à la structure de la végétation de façon à identifier clairement les effets de mosaïque entre ces pelouses annuelles et les végétations vivaces au sein desquelles elles se développent généralement. Il en va de même pour les « tonsures » à Orge hérisson Hordeum gussoneanum « noyées » au milieu des prairies subhalophiles (15.52).

Dynamique

Comme dans le cas d’autres communautés annuelles, la dynamique de l’habitat est fortement tributaire de l’équilibre plus ou moins stable existant avec les communautés vivaces voisines : selon la prédominance de l’érosion ou de la sédimentation, les végétations annuelles des prés salés peuvent régresser ou disparaître ou, au contraire, prendre de l’ampleur et couvrir de vastes surfaces sur les vasières tidales. Les pelouses à Sagine et Poacées sont quant à elles souvent dépendantes de micro-perturbations (dont le piétinement) qui maintiennent le milieu ouvert. C’est le cas aussi des tonsures à Orge hérisson ou O.marine, entièrement dépendantes d’une pression de pâturage assez forte sans laquelle les Poacées et Cypéracées vivaces envahissent rapidement tout l’espace.

Enfin, la systématique et l’identification de certains groupes comme les Salicornia restent délicates en raison de caractères morphologiques ténus malgré les progrès accomplis au cours des 2 dernières décennies : des controverses existent ainsi encore sur l’identité de certains taxons comme le couple Salicornia emerici/S.nitens par exemple.

Espèces indicatrices

[plante2] Cochlearia danica, Desmazeria marina, Hordeum gussonianum, Hordeum marinum, *Hymenolobus procumbens, Parapholis incurva, Parapholis strigosa, Sagina maritima, *Salicornia dolichostachya, Salicornia emerici, Salicornia fragilis, *Salicornia pusilla, Salicornia obscura, Salicornia ramosissima, Suaeda maritima
[plante1] Aster tripolium, Frankenia laevis, Limonium vulgare, Plantago coronopus, Puccinellia maritima, Spartina anglica, Spartina maritima, Spergularia marina
[oiseaux] Branta bernicla, Charadrius hiaticula
[orthopteres] Epacromius tergestinus

Valeur biologique

L’habitat ne présente pas un intérêt floristique patrimonial très fort puisque 4 espèces rares seulement y sont présentes parmi lesquelles : l’Hutchinsie couchée Hymenolobus procumbens (espèce méridionale) qui n’est connue que d’une poignée de stations fugaces de l’estuaire de la Gironde et des côtes oléronaises ; la Salicorne naine Salicornia pusilla (espèce septentrionale) qui possède son unique localité régionale dans l’estuaire de la Seudre alors que Salicornia dolichostachya sensu stricto (i.e séparé de Salicornia fragilis) serait très disséminée ; l’Orge hérisson Hordeum gussoneanum, enfin, est une espèce méditerranéenne qui trouve sa limite nord dans les prairies arrière-littorales du Centre-Ouest où elle peut toutefois être très abondante. L’intérêt phytocénotique de l’habitat est revanche plus marqué puisque 3 associations végétales figurent au Livre Rouge des Phytocénoses terrestres du Littoral français (GEHU, 1991) : l’HYMENOLOBO PROCUMBENTIS-SAGINETUM MARITIMAE, le PARAPHOLISO-HORDEETUM MARITIMAE et le PUCCINELLIO MARITIMAE-SALICORNIETUM EMERICI. Mal connue (et non encore formellement décrite) la communauté à Parapholis strigosa et Hordeum gussoneanum mériterait aussi de figurer parmi les associations végétales précieuses de l’habitat.

Sur le plan faunistique, certaines salicorniaies constituent le biotope de l’Oedipode des salines, un Orthoptère rare, à l’écologie très spécialisée.

Menaces

Pour les salicorniaies des vasières tidales, la principale menace réside dans d’éventuelles modifications de la dynamique sédimentaire, tant naturelle que d’origine anthropique (digues, enrochements) ; le remblaiement ou l’endiguement de portions de prés salés reste aussi une source potentielle de dégradation. Pour les pelouses rases, un piétinement excessif (tourisme, pêche) peut entraîner une altération de l’habitat alors que la fréquentation des prairies littorales par le bétail semble au contraire indispensable au maintien des tonsures à orges.

3 espèces de salicornes annuelles typiques de différents faciès de l’habitat

Statut régional

Habitat présent uniquement sur la frange arrière-littorale de Charente-Maritime, sur les côtes insulaires et le long des estuaires de la Charente, de la Seudre et de la Gironde.

Les sites majeurs de prés salés, de contact dunes/prés salés et de falaises maritimes abritant l’habitat ont été intégrés dans les grands inventaires de faune et de flore (ZNIEFF, ZSC, ZPS)

17 : prés salés du Fier d’Ars (île de Ré), prés salés de Boyardville, de Gatseau (île d’Oléron), de la baie de Moëze, falaises de Royan, prairies du marais de Rochefort, du marais de Brouage

 

Conclusion

L’ambition de ce document est de dresser un état des lieux des connaissances sur les plantes messicoles du Poitou-Charentes.

L’inventaire des plantes messicoles du Poitou-Charentes mené par les associations membres de Poitou-Charentes Nature entre 2005 et 2009 a permis de collecter plus de 3 700 données floristiques. Ce sont ainsi 76 espèces messicoles sur les 111 recherchées dans notre région, qui ont été retrouvées. Les espèces non revues dans le cadre de cet inventaire sont pour la plupart considérées comme disparues, car non observées depuis plus de 30 ans.

Il reste néanmoins encore beaucoup à découvrir et à faire pour la conservation des plantes messicoles dans notre région et ce, malgré le travail important de prospection qui a été mené durant ces 4 dernières années. La connaissance floristique accumulée dans ce domaine à l’échelle de la région et synthétisée au sein de ce document est conséquente et a permis la redécouverte d’espèces que l’on croyait disparues depuis de nombreuses années. Néanmoins, elle doit être considérée comme partielle et hétérogène sur notre territoire, tant la tâche était immense au regard de moyens humains limités (faible nombre de botanistes, formation de néophytes limitée car longue et difficile). Cependant, cette connaissance a permis de dégager des tendances de rareté qui peuvent être considérées comme une ébauche d’un statut de rareté régionale pour chaque espèce messicole, utile à la définition d’une stratégie régionale de conservation.

Ce document a également l’ambition « secrète » de susciter de nombreuses vocations, aussi bien au sein des botanistes confirmés que des botanistes « en herbe », à contribuer activement à la connaissance et donc à la préservation des espèces messicoles de notre région. En effet, les moyens déployés dans le cadre de cet inventaire ont montré que plus on est nombreux à prospecter, plus on trouve, permettant ainsi d’avoir une meilleure vision du statut de conservation des espèces recherchées.

Enfin, il s’agit d’un outil de sensibilisation et d’information sur la diversité fragile de ce groupe d’espèces qui ne se résume pas qu’au simple Coquelicot commun qui, il est vrai, est encore assez courant dans et en bordure des champs. Derrière ce « coquelicot », se cachent deux autres espèces de coquelicots méconnues mais également de nombreuses autres plantes plus discrètes dont certaines jettent leurs dernières forces dans la bataille et sont aujourd’hui au bord de l’extinction au niveau régional mais également au niveau national.

C’est pourquoi, face à ce constat de raréfaction extrême des plantes messicoles, il devient urgent de bâtir et consolider de nouveaux partenariats entre le monde agricole, les gestionnaires d’espaces, les institutions publiques et le monde naturaliste (associations, Conservatoire Botanique National…) afin d’établir ensemble une stratégie partagée de conservation des plantes messicoles en région Poitou-Charentes et dans l’intérêt général.

Cette action a été soutenue par :

Bibliographie du Cahier technique Messicoles du Poitou-Charentes

ABOUCAYA A., JAUZEIN P., VINCIGUERRA L., VIREVAIRE L., 2000. Plan National d’Action pour la conservation des plantes messicoles. Rapport final, Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, Direction de la nature et des paysages, Paris, 45 p et annexes.

AYMONIN G., 1962 – Les plantes messicoles vont-elles disparaître ?. Science et Nature n°49, pp 3-9.

BARON Y., 1989. Eléments pour un bilan de flore messicole en Poitou-Charentes. Plantes sauvages menacées. Actes Brest. p. 79-86.

BARON Y., 1993. La régression des plantes messicoles dans la région Poitou-Charentes. In Faut-il sauver les mauvaises herbes ? Actes du Colloque de Gap. 9-12 juin 1993. Gap-Charance. Conservatoire Botanique National de Gap-Charance. pp. 75-84. 270 p.

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BOCK B., MILCENT J.-P., 2005. Liste de référence de la flore de France métropolitaine. Banque de donnée nationale de la flore française (BDNFF), Téla Botanica http://www.tela-botanica.org. Consulté le 20 janvier 2009.

BOURNERIAS M., ARNAL G. & BOCK C., 2001. Guide des groupements végétaux de la région parisienne. (Ed. : BELIN). Paris, 640p.

Bulletin de la Société Botanique du Centre-Ouest, numéro spécial n°19. 1999. Les plantes menacées de France : Actes du colloque de Brest, 15-17 octobre 1997, publiés sous la direction de Jean-Yves LESOUEF. 616 p.

Bulletins de la Société Botanique du Centre-Ouest, de 1986 à 2009.

Abbé COSTE, 1901-1906. Flore descriptive et illustrée de la France de la Corse et des contrées limitrophes. Klincksieck, Paris. 3 volumes

DELASTRE C.-J.-L., 1842. Flore du département de la Vienne. Paris, Meillac.

JAUZEIN P., 1997. La notion de messicole : tentative de définition et de classification. Monde des plantes n°458, pp 19-23.

JAUZEIN P., 1995. Flore des champs cultivés. Technique et pratiques. Sopra et INRA éditions. Paris. 898 p.

JOURDE P., TERRISSE J. (coord.), 2001. Espèces animales et végétales déterminantes en Poitou-Charentes. Coll. cahiers techniques du Poitou-Charentes, Poitou-Charentes Nature, Poitiers, 154 p.

LAMBINON J., DELVOSALLE L., DUVIGNAUD J. et al., 2004. Nouvelle flore de Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg, du Nord de la France et des régions voisines. (Ptéridophytes et Spermaphytes) Cinquième Edition. (Ed. : Jardin botanique national de Belgique). Meise. 1167 p.

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MAILLET J., 1993. Nouvelles pratiques culturales et nouvelles mauvaises herbes. In Faut-il sauver les mauvaises herbes ? Actes du Colloque de Gap. 9-12 juin 1993. Gap-Charance. Conservatoire Botanique National de Gap-Charance. pp. 33-40. 270 p.

MAUDUYT L. 1830-1835. Herbier de Gençay. B.U. Poitiers

POITOU-CHARENTES NATURE, 2006. Quel avenir pour les plantes messicoles en Poitou-Charentes ? 1ère phase. Rapport final d’activités 2005-2006, Poitou-Charentes Nature, Poitiers, 31p et annexes.

POITOU-CHARENTES NATURE, 2007. Quel avenir pour les plantes messicoles en Poitou-Charentes ? 2ème phase. Rapport final d’activités 2007, Poitou-Charentes Nature, Poitiers, 32p et annexes.

POITOU-CHARENTES NATURE, 2010. Quel avenir pour les plantes messicoles en Poitou-Charentes ? Rapport final d’activités 2005-2009, Poitou-Charentes Nature, Poitiers.

SBCO, 1998 – Liste Rouge de la Flore menacée en Région Poitou-Charentes – Bulletin de la Société Botanique du Centre-Ouest n°29, pp 668-685.

SOUCHE B., 1901. Flore du Haut-Poitou, 2ème partie. Lemercier et Alliot. Niort.

Jacob STURN & Johann Georg STURN, 1796. Deutschlands Flora in Abbildungen nach der Natur mit Beschreibungen

TERRISSE A., 1994 – Inventaire floristique de Ré – Bulletin de la Société Botanique du Centre Ouest Numéro spécial, 112 p

TREMEAU DE ROCHEBRUNE A., 1860. Catalogue des plantes phanérogames de la Charente. Paris, Baillère.

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Méthodologie de l’enquête messicoles

REFERENTIEL TAXONOMIQUE

Le référentiel taxonomique utilisé pour les noms scientifiques des espèces végétales citées dans cet ouvrage, est celui proposé dans le cadre de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris (BOCK et al., 2005).

ÉLABORATION D’UNE LISTE DE PLANTES MESSICOLES A RECHERCHER EN POITOU-CHARENTES

Afin de cibler les espèces messicoles du Poitou-Charentes dans le cadre de l’inventaire, il a été nécessaire dès 2005 de s’arrêter sur une définition approuvée par tous les partenaires :

Une plante messicole est une plante dont l’essentiel de la répartition se situe dans les champs cultivés ou territoires cultivés : champs, vignes (cultivés ou abandonnés), mais aussi jachères, bords de routes… »

Une liste de 111 plantes messicoles à rechercher a été élaborée sur la base des espèces du Plan National d’Action ayant été mentionnées au moins une fois dans notre région (33 espèces : 8 en situation précaire, 18 à surveiller, 7 encore abondantes) complétée d’espèces répondant à la précédente définition et ayant un statut particulier en Poitou-Charentes (soit rare et menacée : espèces de la Liste Rouge Régionale (12), espèces déterminantes (11), soit se raréfiant ou mal connues), en collaboration avec les botanistes locaux, et finalement validée par la Société Botanique du Centre-Ouest (SBCO) (cf. Annexe).

LES DONNEES BIBLIOGRAPHIQUES

Lors de la première phase de l’inventaire régional des plantes messicoles (2005-2006), la synthèse des données bibliographiques anciennes et préalable à l’inventaire (avant 2005) a été menée pour cibler les secteurs à prospecter en priorité. Cette synthèse bibliographique s’est effectuée selon deux axes :

  • enquête auprès des botanistes locaux adhérents des associations membres de Poitou-Charentes Nature, de la SBCO ou d’autres associations naturalistes ;
  • recherches bibliographiques : comptes-rendus d’herborisation dans les bulletins de la Société Botanique du Centre-Ouest (1986 à 2006), flores locales anciennes (fin du XIXe–début du XXe siècle), herbiers anciens…

Les flores locales anciennes de référence sont les suivantes :

  • Pour la Charente : Trémeau de Rochebrune (1860)
  • Pour la Charente-Maritime : Loyd (1896)
  • Pour les Deux-Sèvres : Loyd (1896) et Souché (1901)
  • Pour la Vienne : Delastre (1842), Souché (1901)

La distinction a été faite entre les données dites « historiques », c’est-à-dire citées avant 1990 (provenant en majorité des flores anciennes) et les données bibliographiques « récentes » postérieures à 1990 et antérieures au début de l’inventaire (2005).

L’INVENTAIRE DES PLANTES MESSICOLES

L’inventaire des plantes messicoles en Poitou-Charentes a été mené dans chacun des départements de la région par les associations membres de Poitou-Charentes Nature entre les années 2005 et 2009.

Dans ce cadre, deux niveaux de prospections ont été mis en œuvre afin d’en optimiser l’efficacité :

  • Prospection aléatoire :

Inventaires relayés par le coupon-réponse de la plaquette : intégration à l’inventaire de toutes les données ponctuelles fournies par les observateurs (bénévoles, salariés, agriculteurs, partenaires). Cette démarche a pour avantage d’intégrer le grand public et le monde agricole dans l’inventaire et donc de favoriser la sensibilisation à la problématique des plantes messicoles.

  • Prospection systématique de quadrats :

Un quadrat est une zone échantillon de prospection couvrant un quart de carte IGN 1 : 25000è (7 x 10 km), au sein duquel une prospection fine et systématique a été menée. Les quadrats ont été choisis et localisés en fonction des données bibliographiques (antérieures à 2005) et des grandes entités géographiques et pédologiques définies dans l’atlas des paysages de Poitou-Charentes (Figure 1 et Tableau 1).

Ainsi, un minimum de deux quadrats échantillon a été retenu par département.

Tableau 1. Localisation des quadrats échantillon par département et dénomination des paysages associés dans l’atlas.

Charente-Maritime Deux-Sèvres Charente Vienne
1 La Gripperie
Carte IGN 1431 O (SE)
Le Thouarsais
Carte IGN 1625 E (SE)
Saint-Yrieix sur Charente
Carte IGN 1732 O (NE)
La plaine du Mirebalais
Carte IGN 1725O (SO)
Zones littorales (Marais de Brouage et Presqu’île de Marennes) Plaines de champs ouverts (Plaines de Moncontour et Thouars) Terres viticoles (Champagne Charentaise et Pays Bas) Plaines de champs ouverts (Plaines de Neuville, Moncontour)
2 Gémozac
Carte IGN 1533 O (SE)
Marais Poitevin
Carte IGN 1528O, (moitié sud)
Forêt de la Braconne
Carte IGN 1732 E (NE)
La plaine du Neuvillois
Carte IGN 1727E (NE)
Plaines vallonnées boisées (Campagne du Pont-l’Abbé-Gémozac) Plaines de champs ouverts (Venise Verte et Plaine du nord de la Saintonge) Terres boisées (côtes de l’Angoumois et Pays du Karst) Plaines de champs ouverts + ville (Plaines de Neuville, Moncontour et Thouars + Poitiers)

Au sein de chaque quadrat, la prospection s’effectue de manière systématique. Toutes les routes traversant le quadrat sont empruntées, à la recherche de zones favorables : « taches de couleur » visibles ou caractéristiques de la présence de messicoles (bleuet, coquelicot, adonis…), secteurs de jachère, zones où l’agriculture paraît favorable (extensive, biologique colza…), coins et bordures de champs oubliés des pulvérisations des produits phytosanitaires… La bordure de chacune des parcelles repérée est ensuite prospectée à pied. Lorsque la bibliographie concernée par le quadrat mentionne des lieux-dits, ceux-ci font l’objet d’une attention particulière lors de l’inventaire.

ACTUALISATION DU STATUT DE RARETE DES PLANTES MESSICOLES

Le coefficient de rareté et le rattachement à une classe de rareté ont été effectués selon la méthode présentée par Vincent Boullet, lors du colloque de Brest de 1997 sur les plantes menacées de France. Cette méthode est également appliquée par le Conservatoire botanique national de Bailleul pour la flore des régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie (ANTONETTI et al., 2006).

Cr = 100 – (100 x nb de mailles où le taxon est présent après 1990 / nb total de mailles du territoire considéré), le maillage départemental étant à l’échelle 7×10 km (quart de carte IGN).

Le calcul du coefficient de rareté a été réalisé avec les données collectées à l’issue de l’inventaire des plantes messicoles mené entre 2005 et 2009 et le « nombre total de mailles du territoire considéré » auquel fait référence la formule ci-dessus, correspond au nombre total de mailles contenant au moins une donnée. Ainsi les mailles dépourvues de données ont été considérées comme non prospectées.

Les classes de rareté correspondantes sont les suivantes :

classe de rareté intervalle de valeur du coefficient de rareté (Cr)
non revu (D ?) Cr = 100
exceptionnel (E) Cr = 99,5
très rare (RR) 99,5 Cr = 98,5
rare (R) 98,5 Cr = 96,5
assez rare 96,5 Cr 92,5
peu commun (PC) 92,5 Cr = 84,5
assez commun (AC) 84,5 Cr = 68,5
commun (C) 68,5 Cr = 36,5
très commun 36,5 Cr

La classe de rareté correspond donc à la fréquence d’observation des espèces messicoles dans le cadre de l’inventaire régional mené par les associations membres de Poitou-Charentes Nature.

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