Landes humides

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie – écologie

Les landes humides se développent sur des sols pauvres en substances nutritives, très acides (pH4.5), de type podzols, sur des roches-mères variées – sables siliceux des dépôts continentaux tertiaires (Eocène), meulière issues de la silicification de marnes lacustres (Oligocène), roches cristallines et métamorphiques du socle primaire – et dans des situations topographiques diversifiées : cuvettes et dépressions au sein des grands complexes de landes, bords d’étangs oligotrophes, versants avec suintements d’eau tellurique. Dans tous les cas, une nappe d’eau, temporaire ou permanente, à fluctuations saisonnières plus ou moins marquées, est présente à faible profondeur et imprègne une partie du profil, générant la formation d’un pseudogley (voire parfois d’un gley véritable). Selon le degré d’hydromorphie du sol, le substrat est plus ou moins minéral ou organique, et entraîne des différences dans le cortège végétal : la présence de sphaignes notamment caractérise les faciès les plus fortement engorgés alors que celles-ci manquent dans les variantes moins humides.
La différenciation des landes humides se fait sur des critères à la fois climatiques et floristiques. En Poitou-Charentes, deux associations de lande humide sont présentes : la lande thermo-atlantique à Bruyère à balais, B. à 4 angles et Bruyère ciliée, et la lande mésotherme à Ajonc nain et Bruyère à balais, en dehors de l’aire régionale de la Bruyère ciliée.
Comme dans les autres types de landes, la physionomie est marquée par la dominance des chaméphytes (bruyères et Callune) et des nanophanérophytes (Erica scoparia, ajoncs), la présence systématique de la Bruyère à 4 angles étant le meilleur réactif floristique de la lande humide. Selon les faciès, la structure verticale peut toutefois varier : strate basse de 0.3 à 0.7m de hauteur pour la lande à Ajonc nain et Bruyère à 4 angles, strate moyenne atteignant 2.5m pour la lande à Bruyère à balais et Bruyère à 4 angles. Dans certaines situations (landes dégradées surtout), la dominance de la Molinie peut induire un aspect nettement herbacé alors que la présence de tapis discontinus de sphaignes, parfois bombés, caractérise les variantes les plus hygrophiles.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

Alliance Ulicion minoris Malcuit 1929

Sous-Alliance Ulici minoris-Ericenion ciliaris (Géhu 1975) Géhu et Botineau 2004

Groupe d’associations Ulici-Ericeta tetralicis (landes humides non tourbeuses) :

  • Ericetum scopario-tetralicis (Rallet 1935) J.M.Géhu et J.Géhu 1975 (lande thermo-atlantique de répartition aquitano-ligérienne)
  • Ulici minoris-Ericetum tetralicis (Allorge 1922) Lemée 1937 emend.J.M et J.Géhu 1975 (lande atlantique mésotherme)

COR 1991

31.11 Landes humides atlantiques septentrionales

31.12 Landes humides atlantiques méridionales

31.13 Landes humides à Molinia caerulea

Directive Habitats 1992

4010 Landes humides atlantiques septentrionales à Erica tetralix

4020 Landes humides atlantiques tempérées à Erica ciliaris et Erica tetralix

Confusions possibles

La distinction entre les landes atlantiques septentrionales et méridionales n’est pas aisée, ces dernières étant avant tout caractérisées par la co-présence de la Bruyère ciliée et de la Bruyère à 4 angles, alors que dans les premières seule la Bruyère à 4 angles existe (dans ces situations, la Bruyère ciliée est reléguée dans des landes plus mésophiles où la Bruyère à 4 angles manque).
Dans les grands complexes de landes, la lande humide vient souvent en contact avec la lande mésophile : l’absence d’Erica tetralix permet alors de distinguer celle-ci de celle-là.
Dans les milieux les plus engorgés, la lande humide à sphaignes peut passer progressivement à une tourbière acide : seul l’examen du spectre biologique (balance chaméphytes / sphaignes) et de la composition floristique (poids des espèces turficoles comme Eriophorum angustifolium) permet alors de trancher.

Dynamique

Comme les landes sèches ou mésophiles, les landes humides du Poitou-Charentes résultent toutes de défrichements plus ou moins anciens suivis d’un entretien souvent pluriséculaire par la fauche (pour la litière), le pâturage et les incendies courants qui ont empêché indéfiniment la régénération de la forêt initiale. Depuis leur sortie du circuit économique agropastoral et la cessation des modalités de gestion qui assuraient leur entretien et leur pérennité, les landes humides – à l’égal des autres types de landes – sont devenues des espaces « improductifs » repris par l’évolution progressive de la végétation. De nos jours, en l’absence de rajeunissement, les landes humides ont tendance à vieillir (homogénéisation structurale et perte de diversité floristique : sur-développement de la Callune, invasion par la Molinie, la Fougère aigle) tout en étant progressivement envahies par des arbustes pionniers plus ou moins hygrophiles tels que la Bourdaine, le Saule roux, le Piment royal, voire le Pin maritime ou le Chêne pédonculé quand des porte graines existent à proximité (cas fréquent dans la région où les landes font l’objet d’enrésinements massifs). Si la prolifération des sangliers peut entraîner localement une réouverture du milieu, cela ne suffit pas toutefois à empêcher la lente restauration d’un milieu forestier qui va peu à peu faire disparaître les espèces typiques, en général strictement héliophiles.

Espèces indicatrices

[plante2] Erica ciliaris, Erica tetralix
[plante1] Agrostis canina, Calluna vulgaris, *Carex binervis, Carum verticillatum, Cirsium dissectum, Dactylorhiza maculata, Erica scoparia, *Eriophorum angustifolium, Frangula alnus, Genista anglica, *Gentiana pneumonanthe, Hydrocotyle vulgaris, Juncus acutiflorus, Lobelia urens, Molinia caerulea, *Myrica gale, *Narthecium ossifragum, Pedicularis sylvatica, Polygala serpyllifolia, Potentilla erecta, Pseudarrhenatherum longifolium, Salix atrocinerea, *Salix repens, Schoenus nigricans, Scorzonera humilis, Scutellaria minor, Serratula tinctoria, Ulex minor
[briophytes] Aulacomnium palustre, Dicranum bonjeani, Hypnum jutlandicum, Microlepidozia setacea, Rhytidiadelphus squarrosus, Sphagnum auriculatum, Sphagnum compactum, Sphagnum inundatum
[oiseaux] Sylvia undata, Circus cyaneus
[reptiles] Anguis fragilis, Vipera aspis
[lepidopteres] Carterocephalus palaemon, Celastrina argiolus, Coenonympha oedippus, Heteropterus morpheus, Maculinea alcon
[orthopteres] Chrysochraon dispar, Locusta migratoria, Pteronemobius heydenii

Statut régional

Habitat rare et très localisé, ne subsistant plus que dans les grands ensembles de landes régionaux : Double saintongeaise et charentaise, Montmorillonais, nord de Poitiers. Les autres localités, très ponctuelles, sont très menacées par le drainage et la reconversion sylvicole.
Les sites comportant encore des surfaces significatives de cet habitat ont presque tous été intégrés et décrits dans les inventaires du patrimoine naturel récents (ZNIEFF, NATURA 2000) auxquels on se reportera pour plus de détails.

16 : landes des cantons de Blanzac, Montmoreau, Chalais
17 : landes de Montendre, landes de Cadeuil
86 : landes du Pinail, camp militaire de Montmorillon
79 : brandes de l’Hôpiteau, environs d’Argenton-Château

 

Landes sèches à mésophiles

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie – écologie

Les landes sèches à mésophiles occupent des sols sableux, ou sablo-argileux, oligotrophes, généralement acides à pH5 (mais la lande à Bruyère vagabonde colonise des stations peu acides, souvent en contexte calcaire), parfois podzoliques, à réserve en eau faible à moyenne sauf dans quelques variantes fraîches de l’habitat où il peut y avoir présence d’une nappe battante (présence d’un pseudogley à faible profondeur), sur des roches-mères variées : sédiments détritiques transportés depuis le Massif Central à l’Eocène dans la Double charentaise et saintongeaise (dépôts du Sidérolithique, podzols de la région de Montendre 17), épandages argilo-sableux à bancs de grès indurés des « terres de brandes » du Montmorillonnais 86, altérites sur granites roses de la vallée de l’Issoire 16, doucins sableux de la région de Cadeuil 17, argile à meulière recouvrant des marnes et des calcaires lacustres cénomaniens au Pinail 86 etc.. Les situations topographiques sont aussi très diverses – plateaux, pentes faibles, crêtes rocheuses – mais ne comprennent jamais des cuvettes qui sont en principe occupées alors par la lande humide ou tourbeuse.

Avec 8 associations végétales recensées à ce jour en PC, la variabilité régionale est importante, la différenciation typologique se faisant sur des critères à la fois édaphiques et climatiques (landes arides/sèches/fraîches, landes thermophiles/landes tempérées) alors que la reconnaissance sur le terrain s’appuie souvent sur l’espèce physionomiquement dominante. On distinguera ainsi deux landes dominées par la Bruyère cendrée Erica cinerea, une par la Bruyère vagabonde Erica vagans, deux par la Bruyère ciliée Erica ciliaris, une par la Bruyère à balais Erica scoparia et deux par des Cistacées ligneuses, l’Hélianthème en ombelle Halimium umbellatum et l’Hélianthème faux-alysson Halimium alyssoides.

En corrélation avec la diversité typologique, la physionomie est assez variable : landes rases à moyennes (20 à 80cm de hauteur) pour la majorité des faciès, mais landes hautes (jusqu’à 2m, voire 2.5m) dès que la Bruyère à balais est présente ou que la dynamique pré-forestière est active. Par ailleurs, la structure horizontale varie elle aussi beaucoup en fonction de la topographie, du stade évolutif et des facteurs anthropo-zoogènes : couverture sub-continue de chaméphytes dans les sites non perturbés ou « rajeunis » ou nappes ouvertes d’Ericacées trouées de clairières occupées par des hémicryptophytes divers, voire des cryptogames (lichens, bryophytes). Enfin, l’habitat se présente rarement isolément mais forme plutôt des mosaïques ou des séquences selon un gradient topographique par exemple avec la lande humide ou divers autres habitats oligotrophiques.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

Alliance Ulicion minoris Malcuit 1929

Sous-Alliance Ulicenion minoris Géhu et Botineau 2004

Groupe d’associations Ulici minoris-Ericeta cinereae (landes sèches atlantiques à Ulex minor) : Rubio peregrinae-Ericetum vagantis, Potentillo montanae-Ericetum cinereae, Helianthemo umbellati-Ericetum cinereae, Ulici minoris-Ericetum cinereae

Groupe d’associations Helianthemo alyssoidis-Ericeta cinereae (landes arides, thermo-atlantiques, dégradées) : Arrhenathero thorei-Helianthemetum alyssoidis

Sous-Alliance Ulici minoris-Ericenion ciliaris (Géhu 1975) Géhu et Botineau 2004

Groupe d’associations Ericeta scopario-ciliaris (landes mésophiles thermophiles) : Arrhenathero thorei-Ericetum cilaris, Scorzonero humilis-Ericetum ciliaris, Ulici minoris-Ericetum scopariae

 

COR 1991

31.23 Landes atlantiques à Erica et Ulex

31.24 Landes ibéro-atlantiques à Erica, Ulex, Cistus

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

4030 Landes sèches européennes

4030-4 Landes sèches thermo-atlantiques

4030-7 Landes atlantiques subsèches

4030-8 Landes atlantiques fraîches méridionales

Confusions possibles

Les landes sèches à Erica vagans ou Erica cinerea ne présentent guère de risques de confusion. Celles à Erica ciliaris devront en revanche être distinguées soigneusement des « landes humides méridionales » où cette espèce co-domine avec Erica tetralix. Par ailleurs, la présence d’Erica scoparia ne suffit pas à « signer » l’appartenance à la lande mésophile puisque cette espèce de grande amplitude écologique peut se rencontrer à la fois dans les landes sèches avec la Bruyère cendrée et les landes humides avec la Bruyère à 4 angles, voire même dans des manteaux méso-oligotrophes qui ne sont plus de véritables landes au sens strict du terme : dans ces cas-là, la totalité du cortège végétal doit être prise en compte pour statuer précisément sur la nature de l’habitat.

Dynamique

Contrairement à certaines landes littorales ou montagnardes, climaciques, toutes les landes de la région sont des formations secondaires résultant de l’exploitation par l’homme d’anciennes forêts acidophiles : défrichement, pâturage extensif, fauche, incendies contrôlés destinés à faire régresser les sous-arbrisseaux ligneux au profit des végétaux herbacés. Toutes ces pratiques traditionnelles ont aujourd’hui presque totalement disparu en Poitou-Charentes, hormis sur certains espaces protégés (cf Réserve Naturelle du Pinail) où elles ont été réintroduites comme outils de gestion. En l’absence de facteurs de rajeunissement, la lande sèche ou mésophile « vieillit » et se trouve envahie plus ou moins rapidement – selon la profondeur et la richesse trophique du substrat – par des espèces pré-forestières, préfigurant le stade forestier terminal de la série : des espèces pionnières comme le Prunellier, l’Ajonc d’Europe, le Genêt à balais, les ronces, le Pin maritime, voire la Bourdaine ou le Saule roux dans les variantes fraîches, précèdent ainsi l’implantation d’essences nomades telles que les chênes (C.tauzin, C.pédonculé, voire C.pubescent dans quelques cas) dont l’arrivée va précipiter l’élimination de la majorité des espèces landicoles plus ou moins strictement héliophiles.

Espèces indicatrices

[plante2] *Ajuga occidentalis, *Allium ericetorum, *Avenula sulcata, Calluna vulgaris, *Daphne cneorum, Erica ciliaris, Erica cinerea, Erica scoparia, *Erica vagans, *Gladiolus illyricus, *Halimium alyssoides, *Halimium umbellatum, Simaethis planifolia, Ulex minor, Viola lactea
[plante1] Agrostis curtisii, Agrostis tenuis, Agrostis vinealis, Arenaria montana, Asphodelus albus, Cytisus scoparius, Danthonia decumbens, Deschampsia flexuosa, Euphorbia angulata, Genista anglica, Hypericum pulchrum, Lobelia urens, Polygala serpyllifolia, Potentilla montana, Pseudarrhenatherum longifolium, Pteridium aquilinum, Quercus pyrenaica, *Scilla verna, Scutellaria minor, Serratula tinctoria, Solidago virgaurea, Succisa pratensis, Ulex europaeus, Viola canina, Viola riviniana minor
[briophytes] Campylopus introflexus, Dicranum scoparium, Hypnum cupressiforme, Hypnum jutlandicum, Polytrichum juniperinum, Scleropodium purum
[lichens] Cladonia sp.pl.
[oiseaux] Acanthis cannabina, Caprimulgus europaeus, Circus cyaneus, Sylvia undata
[reptiles] Coronella austriaca, Lacerta lepida
[lepidopteres] Clossiana dia, Ematurga atomaria, Lycophotia porphyrea, Pavonia pavonia, Xestia agathina
[orthopteres] Chorthippus binotatus, Chrysochraon dispar, Gomphocerippus rufus, Myrmeleotettix maculatus
[coleopteres] Agapanthia asphodeli

Valeur biologique

Certains faciès de l’habitat – lande aride à Avoine de Thore et Hélianthème faux-alysson, lande sèche à Hélianthème en ombelle et Bruyère cendrée, lande calcicline à Garance voyageuse et Bruyère vagabonde, lande mésophile à Avoine de Thore et Bruyère ciliée – ne sont connus dans la région que d’une poignée de stations où ils représentent des localités marginales par rapport au barycentre sud-ouest européen de leur répartition. Cet habitat abrite de nombreuses espèces végétales rares ou menacées en Poitou-Charentes – Ail des bruyères, Daphné camélée, Bruyère vagabonde, Glaïeul d’Illyrie, Hélianthème faux-alysson, Hélianthème en ombelle, Ciste à feuilles de sauge (hors littoral) – tandis que d’autres, assez répandues dans la partie sud-occidentale de la dition (Double), deviennent très rares vers le nord-est où elles fonctionnent comme des « marqueurs biogéographiques » (Avoine de Thore, Phalangère à feuilles planes, Sabline des montagnes, Violette laiteuse…).

Menaces

Comme les prairies, les landes sèches et mésophiles sont des habitats dont l’expansion au cours de la période historique est le fruit de l’action humaine et de ses animaux qui ont permis leur épanouissement et leur maintien durant des siècles à partir d’un fonds d’espèces végétales et animales préexistantes. Depuis le milieu du XXe siècle au moins, cet habitat a connu une régression spectaculaire victime d’un double mouvement d’intensification se traduisant par un défrichement de la lande et son remplacement par des cultures, ou au contraire d’abandon, les espaces de landes étant réoccupés peu à peu par des forêts maigres de chênes. De nos jours, l’habitat n’occupe plus en Poitou-Charentes que des stations relictuelles, généralement sur des surfaces réduites et, le plus souvent, dans un état de conservation médiocre à mauvais (structure atypique, cortège incomplet, absence d’espèces caractéristiques). La valorisation sylvicole – surtout enrésinement à base de Pin maritime dans la région – reste aujourd’hui, avec le défrichement pour mise en culture, le principal facteur de menace des derniers grands secteurs de landes du Poitou-Charentes.

Statut régional

Habitat très disséminé : présent surtout en sud 17 et 16 (région de la Double), dans le Confolentais 16, et dans le Montmorillonnais 86. Très rare en 79.

Les sites comportant encore des surfaces significatives de cet habitat ont presque tous été intégrés et décrits dans les inventaires du patrimoine naturel récents (ZNIEFF, NATURA 2000) auxquels on se reportera pour plus de détails.

16 : landes de Touvérac, gorges de l’Issoire à St-Germain-de-Confolens.
17 : camp militaire de Bussac, landes de Cadeuil
86 : camp militaire de Montmorillon, brandes de la Pierre-là.
79 : brandes de l’Hôpiteau, environs d’Argenton-Château


 

Autres fourrés

Rédacteur : Guy Chézeau

Physionomie – écologie

On regroupe ici un ensemble d’habitats ayant la structure du fourré, c’est-à-dire essentiellement, voire uniquement, constitués d’arbustes et présentant une densité des individus qui rend le milieu difficile à pénétrer.

Il s’agit de stades pionniers évoluant vers un développement forestier, possédant une diversité végétale souvent faible, certains de ces habitats se révélant quasiment mono spécifiques (fourrés de genévriers communs, fourrés de noisetiers, fourrés de bruyère à balais….)

On trouve là, d’une manière très générale, des formations secondaires après exploitation : coupes forestières (recrus forestiers caducifoliés, pré bois de résineux), abandon du pâturage (fourrés de genévriers), friches agricoles et ou industrielles (fourrés mixtes…)

Ce sont des stades transitoires, possédant une biodiversité assez faible, recouvrant des surfaces généralement limitées (on peut relever cependant quelques exceptions comme les terrains militaires), très souvent mal considérés. « Broussailles », « friches », « fourrés », sont autant de termes à connotation péjorative pour les désigner avec, pour conséquence, d’en faire des milieux mal connus et mal renseignés.

Seule la strate des phanérogames arbustifs est développée, les annuelles sont peu présentes et la densité d’individus assure une couverture totale du sol.

En fonction de la nature du sol, de l’exposition, de l’utilisation et de la gestion qui ont précédé l’installation du fourré, on pourra trouver les végétations suivantes :

  • les fourrés de noisetiers doivent être considérés comme un faciès particulier des fourrés mésophiles au sein duquel le noisetier est dominant jusqu’à devenir parfois l’unique espèce ;
  • les recrûs forestiers caducifoliés désignent la végétation constituée par l’ensemble des pousses qui se développent sur les souches après la coupe du taillis. Seuls les essences à feuilles caduques rejettent de souche et, parmi celles-ci, certaines espèces rejettent abondamment, comme le charme ou le châtaignier, et peuvent donner des fourrés très fournis ;
  • les taillis correspondent à l’ensemble des plantes arborescentes basses formées de cépées, c’est-à-dire de bouquets de jeunes troncs partant d’une souche commune. Le taillis simple apparaît après la coupe de l’ensemble des arbres et s’apparente au recru forestier, le taillis sous futaie intéresse les espèces sciaphiles ou de demi ombre (charme et châtaignier) ;
  • le fourré mixte constitue le premier stade de recolonisation haute de forêts mélangées ; il est marqué par la prédominance de jeunes individus d’espèces forestières hautes et sa composition est fonction de l’habitat forestier climax ;
  • le prébois de résineux est le premier stade de recolonisation forestière en forêt de conifères après la coupe des arbres adultes : en Poitou-Charentes, essentiellement du Pin maritime.
  • à noter en zone littorale le possible développement excessif d’une espèce introduite, d’origine américaine, le Séneçon en arbre (Baccharis halimifolia), d’abord utilisé comme plante ornementale en raison de sa grande résistance aux embruns et qui peut par sa prolificité et sa grande capacité à rejeter de souche, constituer d’importants fourrés totalement mono spécifiques, nécessitant alors des campagnes d’arrachage. Le Baccharis est alors considéré comme plante invasive.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

CRATAEGO MONOGYNAE-PRUNETEA SPINOSAE Tüxen 1962 : manteaux arbustifs, fruticées et haies

  • Prunetalia spinosae Tüxen 1952 : communautés des sols carbonatés ou plus ou moins désaturés

CYTISEA SCOPARIO-STRIATI Rivas-Martinez 1975 : fourrés dominés par des Fabacées, sur sols profonds et acides

QUERCO ROBORIS-FAGETEA SYLVATICAE Br.-Bl. & Vlieger 1937 : forêts tempérées caducifoliées

COR 1991

31.8 C Fourrés de noisetiers

31.8 D Recrus forestiers caducifoliés

31.8 E Taillis

32.8 F Fourrés mixtes

32.8 G Fourrés de conifères

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

Nc.

Confusions possibles

Ces fourrés peuvent être difficiles à identifier précisément, entre autre dans les premières années de leur installation, celles qui suivent la réalisation des coupes forestières.

Ce n’est toutefois pas le cas pour les prébois de résineux.

Dynamique

Elle est spontanée et importante pour l’ensemble de ces fourrés. Sans intervention humaine, on peut estimer de 15 à 30 ans la « durée de vie » de ces habitats avant de retrouver à nouveau le stade forestier.

Espèces indicatrices

[plante2] Acer campestre, A. monspessulanus, (Baccharis halimifolia), Carpinus betulus, Castanea sativa, Clematis vitalba, Corylus avellana, Crataegus monogyna, Cornus sanguinea, Cytisus scoparius, Euonymus europaeus, Hedera helix, Juniperus communis, Ligustrum vulgare, Lonicera periclymenum, L. xylosteum, Pinus pinaster, Quercus ilex, Q. petraea, Q. pubescens, Q. pyrenaica, Q. robur, Rubus fruticosus, Rosa canina, Salix caprea, Sambucus nigra, Ulex europaeus
[plante1] Deschampsia flexuosa, Fraxinus excelsior, Rubia peregrina, Pteridum aquilinum
[briophytes] Eurhynchium praelongum, Plagiomnium undulatum, Pseudoscleropodium purum, Thuidium tamariscinum

Valeur biologique

Ces habitats présentent une valeur patrimoniale régionale faible ; cependant, parce qu’ils peuvent constituer des milieux refuge pour diverses espèces animales – oiseaux, reptiles ou mammifères – ils peuvent parfois, localement, présenter un intérêt non négligeable.

Toujours dans une approche locale, ces milieux peuvent participer à la mise en place de liaisons de biodiversité lors de la réalisation des trames vertes et bleues.

Menaces

Ces habitats ne sont véritablement menacés dans notre région.
Ils sont dédaignés ou au pire mal considérés par le grand public, ce qui peut entraîner parfois leur éradication.

Très localement, les déprises qu’elles soient industrielles ou agricoles favorisent leur installation.


Le Noisetier (Corylus avellana) (chaton de fleurs mâles, à g.) forme parfois une strate de fourrés subcontinue sous les arbres de haut jet comme ici dans cette forêt après une coupe sélective (à dr.)

Statut régional

L’habitat est répandu sur l’ensemble de la région.


Le pré-bois de résineux n’est pas une formation spontanée en Poitou-Charentes : il se développe en général à proximité immédiate des grandes plantations de Pin maritime qui caractérisent les secteurs sableux ou siliceux de la région (littoral, Double charentaise). A la faveur de perturbations anthropiques, comme ici dans un ancien déblai créé il y a 30 ans lors de la construction de l’autoroute A10, d’autres conifères nomades, comme le Pin sylvestre, peuvent se mêler aux pins maritimes.
 

Fourrés pré forestiers

Rédacteur : Guy Chézeau

Physionomie – écologie

On a là des communautés de coupes et de clairières forestières sur sols calcaires ou marno-calcaires souvent assez riches en azote.

Ces formations sont fréquemment hétérogènes notamment du fait de la nature plus ou moins hydromorphe du substrat, du type de formation forestière qui les héberge ou encore du stade de leur évolution.

Il s’agit en effet de groupements temporaires qui précèdent les
associations forestières. Leur « durée de vie »peut être estimée à
une vingtaine d’années dans le cadre d’une évolution naturelle.

Les ligneux – jeunes arbres, arbustes et arbrisseaux à feuilles caduques – sont largement dominants, avec notamment des espèces pionnières comme le Saule marsault (Salix caprea).

L’influence de la forêt est marquée par la présence d’espèces de demi-ombre comme le Sureau noir (Sambucus nigra) ou appartenant au manteau forestier, le Chèvrefeuille des bois (Lonicera periclymenum) et le Troène (Ligustrum vulgare).

Toutes ces espèces se retrouvent ici en mélange avec des espèces thermo-héliophiles comme les ronces (Rubus sp.).
Les thérophytes sont par contre toujours des espèces héliophiles qui tendent à disparaître lorsque le stade forestier finit par s’installer.

Ici ou là, la strate arbustive peut être dominée par quelques arbres, spécialement des essences qui supportent mal la concurrence des espèces sociales, on pourra y trouver le Bouleau verruqueux (Betula pendula) ou le Peuplier tremble (Populus tremula).

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

CRATAEGO MONOGYNAE-PRUNETEA SPINOSAE Tüxen 1962 : manteaux arbustifs, fruticées et haies

  • Sambucetalia racemosae Tüxen 1950 : communautés des coupes forestières
    • Sambuco racemosae-Salicion capreae Tüxen & Neumann in Tüxen 1950

COR 1991
31 872 Clairières à couvert arbustif

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats
Nc

Confusions possibles

Dans notre région de plaine, l’habitat ne possède pas de bonnes caractéristiques (absence, notamment, du Framboisier, du Sureau à grappes et de divers chèvrefeuilles non lianoïdes, si typiques des étages montagnard et subalpin) ; on y rencontre en mélange des essences préforestières de bonne taille (Betula pendula, Salix caprea….), des espèces arbustives du manteau forestier ainsi qu’une strate herbacée formée de plantes des clairières ouvertes (voir fiches « Coupes, clairières sur sol acide » et « Coupes, clairières sur sol neutro-basophile ») .

On remarquera cependant l’absence d’arbres ayant atteint leur développement mature comme on peut les trouver en pleine forêt

Dynamique

Elle est toujours très importante et peut se traduire par une succession rapide d’espèces plus ou moins pionnières accompagnée par une fermeture rapide du milieu.

La forte densité des individus assurant le recouvrement total du sol ainsi que leur taille limitée, inférieure à 3 mètres, signent une végétation de fourré.

Espèces indicatrices

[plante2] Betula pendula, Corylus avellana, Crataegus monogyna, Hedera helix, Populus tremula, Rubus fruticosus, Salix capraea, Sambucus nigra,
[lepidopteres] Callophrys rubi, Gonepteryx rhamni, Nymphalis antiopa, Nymphalis polychloros
[oiseaux] Luscinia megarhynchos, Sylvia atricapilla, Troglodytes troglodytes, Turdus merula, Turdus philomelos

Valeur biologique

D’une manière très générale, on ne rencontre dans cet habitat que des espèces banales, la valeur patrimoniale régionale est donc généralement faible. Cependant, en créant au sein du milieu forestier un espace un peu plus ouvert, la clairière à couvert arbustif favorise l’installation d’espèces végétales et animales d’interface.

Ainsi, au sein de la chênaie pubescente, en Charente-Maritime, apparaissent d’importantes populations de Séneçon du Rouergue (Senecio ruthenensis), espèce protégée.
Des oiseaux comme le Rossignol philomèle ou la Fauvette à tête noire trouvent là des conditions favorables à leur nidification.

Menaces

Ce type de végétation, conséquence des coupes de bois est peu prisé par les forestiers et aura donc tendance à disparaître rapidement dans les massifs soumis à une gestion intensive.

Il reste néanmoins assez bien représenté sur l’ensemble de la région Poitou-Charentes, favorisé par le morcellement des massifs boisés et par la disparition des pratiques rurales anciennes qui pouvaient se traduire par le pâturage des clairières forestières.


L’Aubépine à un style (Crataegus monogyna) est une espèce à très large amplitude écologique : on la rencontre aussi bien en sous-bois sombres que, comme ici, dans les clairières et ouvertures de divers types types de forêts (caducifoliées ou résineuses)

Statut régional

L’habitat est assez répandu sur l’ensemble de la région.

Le Sylvain azuré (Limenitis reducta) (à g.) et le Tircis (Pararge aegeria) (à dr.) sont deux papillons typiques des lisières et des clairières intra-forestières où ils recherchent les taches de lumière et adoptent souvent un comportement territorial.
 

Fourrés mésophiles

Rédacteur : Guy Chézeau

Physionomie-écologie

Il s’agit d’un ensemble de fourrés caractéristiques des lisières forestières (chênaies et chênaies-charmaies), des haies et des recolonisations des terrains boisés du domaine atlantique. Ces milieux hébergent de nombreuses espèces à fruits charnus de couleur noire ou rouge.

On distinguera deux grands types d’habitats :

Les fourrés médio – européens sur sols fertiles, riches en nutriments, neutres ou alcalins.

Les fruticées atlantiques des sols pauvres en calcaire ou décalcifiés, à affinité mésoacidiphile.

Sur les sols riches, se développe une formation très dense d’arbustes au sein de laquelle le Prunellier est dominant ; il est la plupart du temps associé à des ronces, au Troène, à l’Aubépine monogyne, au Chèvrefeuille des bois ou au Sureau noir, toutes espèces caractéristiques des lisières forestières et des sols riches notamment en azote.

Les sols pauvres laissent apparaître une formation moins diversifiée au sein de laquelle les ronces sont dominantes avec la Bourdaine, l’Ajonc d’Europe et constituent des haies et des buissons (une fruticée)

Dans les deux cas, ces formations correspondent à des stades évolutifs conduisant vers la forêt avec une composition floristique très proche du manteau. Aux stades avancés, on pourra trouver quelques espèces arborescentes : érables champêtre ou de Montpellier, ormes, Chênes pubescent sur sols chauds et secs ou Chênes pédonculé sur sols plus frais, Charme, Châtaignier sur sols décalcifiés. La faune associée à ces milieux est représentée par un ensemble de groupes (oiseaux, reptiles, mammifères, insectes…) regroupant des espèces qui y trouvent à la fois leur nourriture et un abri.

Les nanophanérophytes très largement dominants assurent un recouvrement maximum du sol ce qui limite d’autant le développement des annuelles.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

  • CRATAEGO MONOGYNAE-PRUNETEA SPINOSAE Tüxen1962
    • Prunetalia spinosae Tüxen 1952 : communautés arbustives des sols carbonatés ou plus ou moins désaturés
      • Tamo communis-Viburnion lantanae Géhu & al. 1983 : communautés calcicoles à neutrophiles, mésophiles
      • Frangulo alni-Pyrion cordatae Herrera & al.1991 : communautés acidiphiles thermoatlantiques
      • Ulici europaei-Rubion ulmifolii Weber 1997 : communautés acidiphiles atlantiques
      • Pruno spinosae-Rubion radulae Weber 1997 : communautés mésophiles à mésohygrophiles sur sols désaturés

COR 1991

  • 31.81 Fourrés médio – atlantiques sur sols fertiles
  • 31.83 Fruticées atlantiques des sols pauvres

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

Nc.

Confusions possibles

Beaucoup d’espèces de ces habitats se retrouvent dans les sous bois non entretenus, en lisière des milieux forestiers où ils constituent le manteau ; c’est donc la nature buissonnante qui doit permettre de les identifier.

La limite avec les groupements de fourrés xérothermophiles n’est pas toujours facile à trouver, c’est l’absence du buis ou des genévriers qui permet de faire la différence. En milieu acidiphile sur sols décalcifiés, c’est l’absence du genêt à balai ou des ajoncs que l’on recherchera pour les différencier des fourrés sur sols acides.

Dynamique

Lorsqu’ils ne sont pas soumis à des méthodes de gestion drastiques avec broyage mécanique, ce qui est quand même la plupart du temps le cas, ces habitats possèdent une dynamique très importante, spécialement sur sols riches. Ils peuvent alors évoluer rapidement vers le milieu pré- forestier avec l’apparition de phanérophytes arborescents.

Espèces indicatrices

[plante2] Clematis alba, Cornus sanguinea, Corylus avellana, Crataegus monogyna, Frangula alnus, Hedera helix, Ligustrum vulgare, Lonicera periclymenum, Prunus spinosa, Rosa sp., Rubus sp., Sambucus nigra, Tamus communis, Ulex europaeus, Viburnum lantana
[oiseaux] Emberiza citrinella, Hippolais polyglotta, Lanius collurio, Sylvia communis
[reptiles] Coluber viridiflavus, Lacerta bilineata, Vipera aspis
[lepidopteres] Aporia crataegi, Brenthis daphne, Callophrys rubi, Eriogaster catax, Gonopteryx rhamni, Hamaeris lucina, Iphiclides podalirius, Satyrium acaciae, Satyrium pruni, Thecla betulae
[orthopteres] Leptophyes punctatissima, Meconema thalassinum, Phaneroptera falcata, Tettigonia viridissima
[champignons] Calocybe gambosa, Mitrophora semilibera, Tubaria autochtona
[bryophytes] Hypnum cupressiforme, Scleropodium purum

Valeur biologique

Même s’ils n’hébergent pas d’espèces végétales ou animales protégées, ces habitats doivent être considérés comme présentant une valeur patrimoniale non négligeable dans le contexte actuel d’une nature dite « ordinaire » fortement agressée par l’agriculture productiviste et la multiplication des infrastructures. Parce qu’ils assurent le gîte et le couvert à de nombreuses espèces animales, ils participent à l’existence de corridors biologiques au sein de milieux très fragmentés.

Localement, ils peuvent héberger quelques espèces rares dans les genres trop souvent négligés des Rosa et des Rubus, enfin on y trouve les plantes hôtes de nombreux papillons du groupe des théclas.

Menaces

Le côté envahissant et mal aimé, car souvent impénétrable, de ces habitats les soumet le plus souvent à une gestion humaine agressive (broyage mécanique pouvant être répété chaque année, arrachage…). Leur grande capacité de régénération leur permet de résister à cette pression lorsqu’ils ne sont pas totalement soumis à une éradication définitive.

Statut régional

Habitats encore répandus sur l’ensemble du territoire de la région Poitou-Charentes avec cependant des densités très variables d’un territoire à un autre. Ils sont plus fréquents dans les secteurs soumis à une déprise agricole, à proximité des zones boisées ou sur les terrains militaires.

 

Fourrés hygrophiles et fourrés marécageux à Myrica gale

Rédacteur : David Ollivier

Physionomie-écologie

Les fourrés hygrophiles sont des formations végétales arbustives qui se développent sur des sols constamment gorgés d’eau et parfois inondés. On peut distinguer 2 grands types de fourrés hygrophiles dans notre région :

– ceux qui sont soumis à une dynamique fluviale et à des inondations régulières : la saulaie arbustive planitiaire et collinéenne du SALICION TRIANDRO-VIMINALIS ;

– ceux qui sont installés sur des sols marécageux, parfois tourbeux et gorgés d’eau, mais ne sont pas nécessairement liés à un cours d’eau (alliance du SALICION CINEREAE) : la saulaie marécageuse à Saule roux Salix acuminata Mill. et/ou Saule à oreillettes Salix aurita L. et les fourrés à Piment royal Myrica gale.

Les saulaies arbustives alluviales sont constituées essentiellement du Saule pourpre Salix purpurea L. et sont localisées généralement en tête d’île ou en première ligne des forêts riveraines à bois tendre au contact de l’eau. Cette formation résiste à la forte érosion due au courant de la rivière et prépare ainsi l’installation de la saulaie arborée à Saule blanc Salix alba L.. On y rencontre régulièrement des espèces de la Saulaie blanche (COR 44.13) en mélange avec celles de la Saulaie arbustive telles que le Saule fragile Salix fragilis L. et l’Osier jaune Salix x rubens Schrank.

La saulaie arbustive marécageuse se développe quant à elle, sur des sols où la nappe d’eau est constamment proche ou au dessus du niveau du sol. Cette formation végétale se rencontre au niveau du lit majeur et des zones d’inondation des cours d’eau mais également dans les zones de dépression, les bords de mares et d’étangs (queues d’étang, zones de débordement des étangs…) et au niveau des bas de pente collectant les eaux de ruissellement. Sur sols eutrophes à mésotrophes, le Saule roux Salix acuminata Mill., fréquemment accompagné de son hybride avec le Saule à oreillettes, le Saule de Charrier Salix x charrieri, constitue l’essentiel de la composition arbustive de ce fourré. Sur des sols oligotrophes, le Saule à oreillette Salix aurita L. vient compléter la composition spécifique de ces fourrés hygrophiles marécageux. La strate herbacée est souvent constituée de plantes hélophytes telles que des carex (Carex acutiformis, Carex remota…) accompagnées parfois de fougères (Dryopteris sp.).

Enfin les fourrés à Piment Royal (Myrica gale) se développent sur des sols oligotrophes, en marge des tourbières et des bas marais acides. Le Piment royal Myrica gale, arbuste de petite taille (inférieure à 2 m) est en général accompagné par la Bourdaine et le Saule roux. Les conditions asphyxiantes du sol ne facilitent pas l’installation des ligneux arborés. Seuls quelques aulnes et bouleaux arrivent à développer leurs racines en surface et ainsi à être présents dans ce groupement. Il s’agit donc d’un taillis arbustif dense, souvent inextricable, avec une strate herbacée où les bryophytes (notamment les sphaignes), les carex et les fougères sont abondants.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

  • ALNETEA GLUTINOSAE Br.-Bl. et Tüxen ex Westhoff, Dijk et Passchier 1946
    • SALICETALIA AURITAE Doing Westhoff in Westhoff et den Held 1969 : communautés de saules sur sols très engorgés
      • Salicion cinereae Müller et Görs ex Passarge 1961
  • SALICETEA PURPUREAE Moor 1958
    • SALICETALIA PURPUREAE Moor 1958 : communautés arbustives riveraines, collinéennes, souvent pionnières
      • Salicion triandrae Müller et Görs 1958

COR 1991

  • 44.12 – Saulaies arbustives planitiaires et collinéennes (Salicion triandro-viminalis)
  • 44.92 Saulaies marécageuses (Salicion cinereae)
  • 44.93 Bois marécageux de bouleaux et Myrica gale (fourrés à Myrica gale des marges de bas marais acides)

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

Nc.

Confusions possibles

Il n’existe pas de confusion possible pour ce type d’habitat. Néanmoins on peut rencontrer les fourrés hygrophiles en mélange avec des stades dynamiques plus évolués. En effet, la saulaie marécageuse à Saule roux constitue souvent le manteau des aulnaies marécageuses (COR 44.91) et les saulaies arbustives à Saule pourpre alluviales préparent l’installation de la Saulaie arborée à Saule blanc (COR 44.13).

Dynamique

Pour les fourrés à Piment Royal Myrica gale, l’évolution vers un stade arboré est souvent rendue difficile par les conditions du sol très asphyxique. En revanche, les saulaies marécageuses à Saule roux et Saule à oreillettes, ainsi que les saulaies arbustives alluviales à Saules roux, peuvent connaître une évolution avec l’installation progressive d’espèces végétales arborées. Leur succèdent alors respectivement l’Aulnaie marécageuse (ALNION GLUTINOSAE ; COR 44.91) et la Saulaie arborescente à Saule blanc (SALICION ALBAE ; COR 44.13).

Espèces indicatrices

[plante2] Frangula dodonei ssp. dodonei, *Myrica gale, Salix acuminata, *Salix aurita, Salix fragilis, Salix purpurea, Salix triandra, Salix viminalis, Viburnum opulus.
[plante1] Acer negundo, Alnus glutinosa, Betula alba, Carex acutiformis, Carex remota, Carex riparia, Cirsium palustre, Lysimachia vulgaris
[briophytes] Amblystegium riparium, Calliergonella cuspidata, Drepanocladus aduncus, Fissidens adianthoides, Fontinalis antipyretica Sphagnum auriculatum, Sphagnum palustre
[mammiferes] Castor fiber
[lepidopteres] Fourrés à Piment royal : Leucodonta bicoloraria
Saulaie marécageuse : Brachylomia viminalis, Colobochyla salicalis, Euchoeca nebulata, Euproctis similis, Leucoma salicis.
Saulaie alluviale à S. pourpre : Boudinotiana touranginii, Colobochyla salicalis, Leucoma salicis.
[orthopteres] Conocephalus discolor, Meconema thalassinum, Metrioptera roeselii, Pteronemobius heydenii, Pteronemobius lineolatus, Tettigonia viridissima, Tetrix subulata

Valeur biologique

Les fourrés à Piment royal Myrica gale, sont en forte régression en lien avec leur caractère « improductif » et inexploitable pour l’homme, tout comme les tourbières auxquelles ils sont généralement associés. Ce sont des formations végétales originales, où peuvent s’exprimer des espèces rares et menacées pour le Poitou-Charentes telles que le Piment royal Myrica gale (espèce protégée au niveau régional et inscrite sur la liste rouge régionale) ou l’Osmonde royale Osmunda regalis L. (liste rouge régionale).

Outre le fait de préparer l’installation de la forêt alluviale, habitat relictuel sur le territoire national et dans notre région, les saulaies alluviales, quant à elles, constituent un stock alimentaire important pour le Castor d’Europe friand d’essences à bois tendre telles que les Salicacées (peupliers, saules). Ce rongeur aquatique protégé au niveau européen est en voie de colonisation dans le département de la Vienne et des Deux-Sèvres.

Les fourrés hygrophiles jouent souvent un rôle hydrobiologique important (zone tampon, zone d’extension des crues, épuration des eaux, lutte contre l’érosion…) au sein du lit majeur des hydrosystèmes.
Souvent inexploitables et difficiles d’accès, ce sont des milieux assez peu perturbés par l’intervention de l’homme. Ils jouent alors le rôle de milieux refuges pour la faune, comme par exemple les insectes xylophages qui profitent des nombreux bois morts laissés sur pieds (chandelle) ou en décomposition au sol (chablis).

Menaces

Il s’agit de milieux humides relictuels qui ont été détruits dans le cadre de tentatives d’une valorisation économique (drainage, remblaiement, plantation de peupliers). Seules les saulaies arbustives alluviales présentes sur les îles les plus inaccessibles et les fourrés hygrophiles fortement gorgés en eau n’ont jamais été véritablement inquiétés par cette pression d’aménagement.

Statut régional

En tant qu’habitat générique, les fourrés hygrophiles sont disséminés sur l’ensemble de la région. Certains types sont cependant plus localisés, notamment le fourré à Saule à oreillettes ou celui à Myrica gale.

Sites exemplaires ou représentatifs :

16 : vallons humides de la Double charentaise (« nauves ») pour le type oligotrophe à Myrica gale ; rives des étangs du Confolentais pour le fourré de Saule à oreillettes

17 : marais de l’Anglade pour le fourré sur tourbe alcaline à Bourdaine et Saule roux ; rives de la Charente pour le fourré alluvial de Saule à 3 étamines

79 : tourbière du Bourdet pour le fourré turficole à Bourdaine et Saule roux

86 : rives de la Vienne pour la saulaie à Saule pourpre

 

Fourrés littoraux à Tamaris

Rédacteur : Guy Chézeau

Physionomie-écologie

Il s’agit de communautés des milieux saumâtres. En Poitou-Charentes, on les rencontrera donc uniquement sur le littoral charentais maritime. Le caractère méditerranéen et thermo- atlantique de cette formation lui permet de s’exprimer en priorité sur le littoral saintongeais.

Le Tamaris d’Angleterre Tamarix gallica est une espèce qui résiste bien au sel et au vent, on l’observe donc à proximité immédiate du littoral ; cependant, il borde volontiers les fossés en zone de marais et peut s’enfoncer alors à l’intérieur des terres.

Le tamaris est un arbuste peu exigeant sur la qualité des sols, il réclame pourtant une certaine fraîcheur et préfère les terrains légers, argilo-sableux. La plante appartient à un genre qui présente des caractères morphologiques permettant une parfaite adaptation aux conditions de vie subdésertiques dont plusieurs se rencontrent en milieu littoral. Les feuilles, minuscules, sont dépourvues de stomates sur leur face supérieure, assurant au tamaris une bonne résistance à un climat très ensoleillé et à des sécheresses périodiques. La biologie de la plante l’apparente aux saules : habitat, graines de petite taille munies d’une aigrette ce qui facilite une réinstallation rapide après l’inondation, enfin bouturage très facile. Le tamaris absorbe des quantités importantes de sel.

La plante, très rameuse, se couche volontiers et multiplie son enracinement par marcottage : ainsi se forment de véritables fourrés laissant peu de place à l’installation d’autres espèces.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

  • NERIO OLEANDRI-TAMARICETEA AFRICANAE Br.-Bl. &O. Bolos 1958
    • TAMARICETALIA AFRICANAE Br.-Bl.& O. Bolos 1958
      • Tamaricion africanae Br.-Bl. & O. Bolos 1958

COR 1991

  • 44.813 Fourrés de tamaris

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

nc.

Confusions possibles

La situation, les conditions stationnelles, la présence du tamaris ne laissent la place à aucune confusion concernant cet habitat.

Dynamique

On n’observe pas de dynamique propre.
Lorsque les conditions du milieu sont stables, notamment en
l’absence d’intervention humaine (assèchement, débroussaillage…) l’habitat ne présente pas de dynamique.

Espèces indicatrices

[plante2] Tamarix gallica
[plante1] Crataegus monogyna, Prunus spinosa, Solanum dulcamara, Ulmus minor
[champignons] Leucoagaricus idae-fragum
[oiseaux] Luscinia svecica namnetum
[amphibiens] Hyla meridionalis
[lepidopteres] Parapodia sinaica (galle provoquée par un lépidoptère)
[coleopteres] Psecrosema tamaricum (galle provoquée par un diptère)

Valeur biologique

Dans les marais littoraux, les haies de tamaris sont souvent les seules formations ligneuses pouvant atteindre deux à trois mètres de hauteur, elles constituent donc des brise-vent efficaces en même temps que des refuges et des observatoires pour de nombreux passereaux, voire d’autres animaux : insectes, reptiles….

Leur valeur biologique tient donc au rôle qu’elles jouent en
faveur des espèces qu’elles peuvent héberger de manière temporaire ou définitive. C’est tout particulièrement le cas pour la Gorgebleue à miroir blanc de Nantes Luscinia svecica namnetum, une sous-espèce endémique du littoral franco-atlantique (entre le sud Finistère et le bassin d’Arcachon) et dont la région Poitou-Charentes accueille près du cinquième de la population mondiale.

Menaces

Cet habitat est en régression. L’assèchement des zones humides, le nivellement des bosses, le remplacement des tamaris par des espèces allochtones également résistantes au sel comme le Séneçon en arbre Baccharis halimifolia sont autant de facteurs défavorables qui participent à sa raréfaction.

Statut régional

En Poitou-Charentes l’habitat est limité au littoral de la Charente-Maritime.

17 : îles de Ré, d’Aix, d’Oléron, Madame, marais de Brouage, marais de Seudre, estuaire Gironde.

La Gorgebleue à miroir blanc de Nantes Luscinia svecica namnetum est une espèce migratrice, présente dans nos contrées entre le début mars et septembre-octobre. En Poitou-Charentes, elle se cantonne surtout dans les anciens marais salants où les arbustes halophiles – Soude arbrisseau, Salicorne ligneuse – et les bosquets de tamaris lui servent à la fois de perchoir, de poste de chant et de site de nidification.

 

Fourrés méditerranéens

Rédacteur : Guy Chézeau

Physionomie – écologie

Le caractère méditerranéen de la Charente-Maritime et, plus particulièrement, de la Saintonge littorale est connu de longue date. La richesse de la flore et de la faune qui s’y trouvent associées est liée à l’existence d’une sécheresse estivale.

Pour Ruiz de la Torre (1971), le fourré méditerranéen ou « matorral » est une « formation de plantes ligneuses dont la partie aérienne n’arrive pas à se différencier en tronc et frondaison, étant en général très ramifiée dès le bas, et pouvant atteindre un port d’arbuste prostré ». Ce terme de matorral, d’origine espagnole, remplace d’une manière plus générale les mots français de « maquis » sur sol acide et de « garrigue » sur sol calcaire.

L’habitat « matorral à chênes verts » correspond à une série dynamique du groupement forestier climacique appartenant au Quercion ilicis . En région méditerranéenne sensu stricto l’agro- pastoralisme et les incendies à répétition sont en grande partie responsables de la régression de la chênaie yeuse vers le matorral. En Charente-Maritime, on le rencontre en manteau littoral de la forêt dunaire à Pin maritime et Chêne vert, le pin en est absent et le chêne est alors anémomorphosé sous l’action des vents dominants. Cet habitat fait la plupart du temps défaut, la gestion forestière en favorisant le Pin maritime, voire d’autres espèces de résineux résistants aux embruns, l’empêche de s’exprimer totalement. Le matorral à Chêne vert est une formation qui favorise au sol les essences les moins exigeantes en lumière en éliminant les plus héliophiles.

Un maquis bas silicicole à cistes, Daphné garou et Osyris blanc forme des fourrés sur sols sableux dunaires en Oléron. Daphne gnidium et Osyris alba sont ici spontanés. On a longtemps, par contre, discuté l’indigénat des cistes méditerranéens présents sur l’Ile d’Oléron et souvent découverts assez tardivement. Le caractère méditerranéen marqué du milieu est confirmé par la présence d’un certain nombre d’espèces dont celle de lichens – citons Cladonia mediterranea – dont plusieurs sont ici en aire de distribution disjointe. On est en droit d’estimer que c’est le cas de cet habitat.

Le fourré se développe la plupart du temps en lisière de la forêt au niveau du manteau ainsi qu’en limite de la forêt à proximité du littoral, les plantes résistant bien aux embruns. L’extension de l’habitat à l’intérieur du milieu forestier cesse avec le développement du couvert arborescent qui constitue alors un frein à l’existence d’espèces fortement héliophiles.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

  • QUERCETEA ILICIS Br.-Bl. In Br.-Bl., Roussine & Nègre 1952
    • Quercion ilicis Br.-Bl. ex Molinier 1934
      • Querco ilicis-Pinenion maritimi Géhu & Géhu-Franck
  • CISTO LADANIFERI-LAVANDULETEA STOECHADIS Br.-Bl. in Br.-Bl., Molinier & Wagner 1940
    • Cistion laurifolii Rivas Goday in Rivas Goday, Borja, Monasterio, Galiano & Rivas-Martinez 1956

Association Daphno-Ligustretum

COR 1991

  • 16.28 x 32.34 Fourrés dunaires sclérophylles x Maquis bas à Cistes
  • 32.11 Matorral à chênes sempervirents

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

nc.

Confusions possibles

Pas de confusion possible avec d’autres types d’habitats sauf avec l’ourlet à Ciste à feuilles de sauge et Garance, de structure plus basse (il s’agit d’un ourlet et non d’un fourré) mais se rencontrant dans le même milieu : forêt littorale à Pin maritime et Chêne vert sur dunes fossiles.

Dynamique

Elle est spontanée et dépend notamment de l’avancée ou du recul du manteau forestier, ainsi que des modifications du trait de côte.

Espèces indicatrices

[plante2] *Arbutus unedo, *Cistus laurifolius, *Cistus monspeliensis, *Cistus psilosepalus, Cistus x obtusifolius, Clematis flammula, *Cytinus hypocistis, Daphne gnidium, *Osyris alba, *Phillyrea angustifolia, *Phillyrea latifolia, Quercus ilex
[plante1] Carex arenaria, Cytisus scoparius, Erica scoparia, Hedera helix, Ligustrum vulgare, Orobanche caryophyllacea, Pinus pinaster, Rubia peregrina, Ulex europaeus
[briophytes] Hypnum cupressiforme, Pleurochaete squarrosa, Scleropodium purum, Tortula ruraliformis
[lichens] Cladonia mediterranea
[lepidopteres] Lobesia botrana (= Eudémie de la vigne)
[orthopteres] Cyrtaspis scutata, Ephippiger ephippiger, Leptophyes punctatissima, Oecanthus pellucens, Phaneroptera falcata
[coleopteres] Dicladispa testacea

Valeur biologique

Le fourré arrière-dunaire à cistes, Daphne et Osyris constitue un habitat très rare en Poitou-Charentes et exceptionnel sur le littoral atlantique où il est limité à quelques rares localités littorales et surtout insulaires (Oléron essentiellement, Ré, Aix et presqu’île d’Arvert). Il constitue une irradiation thermo-atlantique relictuelle d’un habitat méditerranéen que l’on ne retrouve qu’en Corse.

On y note la présence d’espèces rares ou menacées avec le Ciste de Montpellier Cistus monspeliensis, le Ciste à feuilles de laurier Cistus laurifolius protégé en Poitou-Charentes, le Ciste à sépales poilus Cistus psilosepalus, espèce protégée au niveau national.

Le matorral à chênes verts ne présente pas d’espèces protégées, sa valeur biologique n’en est pas moins importante de par sa rareté puisqu’il ne peut s’observer qu’ici ou là dans l’Ile d’Oléron ou en presqu’île d’Arvert.

Menaces

Ces habitats en régression pour avoir été menacés par l’enrésinement des milieux dunaires littoraux, subissent maintenant une pression fortement négative liée au développement du tourisme balnéaire avec ses corollaires que sont le tourisme vert et les aménagements qui lui sont liés.

Le Daphné garou Daphne gnidium et l’Osyris blanc Osyris alba sont 2 arbrisseaux méditerranéens localement abondants au sein de la forêt littorale à Pin maritime et Chêne vert du littoral charentais.

Statut régional

Habitat très rare, présent seulement dans quelques localités littorales, surtout insulaires, de Charente-Maritime

17 : île de Ré (forêt de Trousse-Chemise), île d’Oléron (forêt des Saumonards), île d’Aix, forêt de la Coubre, presqu’île d’Arvert

 

Fourrés sur sols acides

Rédacteur : Guy Chézeau

Physionomie-écologie

On a là des formations buissonnantes caractérisées par une strate dominante de ligneux à feuilles caduques d’une taille moyenne de l’ordre de 2 à 3 mètres. D’un point de vue physionomique, on les observe au voisinage des landes dites hautes.

En Poitou-Charentes, ces fourrés ne couvrent pas de grandes surfaces homogènes. Ils forment avec les milieux ouverts ou en marge des milieux forestiers des mosaïques avec les habitats voisins, ils constituent alors des milieux de transition.

Il s’agit de séries dynamiques souvent liées à l’abandon de prairies anciennement cultivées mais de faibles capacités agronomiques ou de landes autrefois pâturées sur un mode extensif.

La nature du sous sol, le type de sol déterminent l’apparition de deux grands types d’habitats :

  • Les fourrés à genêts à balais ou brandes sur sols faiblement acides, sur argiles de décalcification ou sur sols acides thermophiles.
  • Les fourrés à ajoncs d’Europe sur sols acides mésophiles voire hydromorphes.

Le recouvrement est maximum (100%), par définition le fourré est difficilement pénétrable.

Le genêt à balais comme l’ajonc d’Europe sont des espèces héliophiles, mellifères et acidiphiles à large spectre, elles possèdent en outre des caractères anatomophysiologiques qui leur confère des aptitudes exceptionnelles à coloniser des sols pauvres. Le genêt à balais possède une écorce chlorophyllienne, c’est donc la plante entière qui par ses organes aériens assure la photosynthèse. L’ajonc d’Europe comme la plupart des légumineuses héberge au sein de nodosités racinaires des bactéries symbiotiques assurant une fixation de l’azote atmosphérique entraînant à terme un enrichissement du sol.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

  • CYTISETEA SCOPARIO-STRIATI Rivas-Martinez 1975 : végétations arbustives dominées par des Fabacées sur des sols profonds, subacides à acides
    • CYTISETALIA SCOPARIO-STRIATI Rivas-Martinez 1975
      • Ulici europaei-Cytision striati Rivas-Martinez, Bascnes, T.E. Diaz, Fernandez Gonzalez & Loidi 1991 : communautés thermo-atlantiques
      • Sarothamnion scoparii Tüxen ex Oberdorfer 1957 : communautés atlantiques et continentales

COR 1991

  • 31.84 Landes à Genêts
  • 31.85 Landes à Ajoncs

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

nc.

Confusions possibles

Pas de confusions possibles

DYNAMIQUE

Ces fourrés peuvent être soumis à une dynamique importante. Ils doivent évoluer vers une chênaie à chênes tauzins sur les sols les mieux drainés ou vers une chênaie à chênes pédonculés sur les substrats plus humides. En Poitou-Charentes, dans les deux cas on va vers un bois acido-thermophile.

Espèces indicatrices

[plante2] Cytisus scoparius, Erica scoparia, *Pyrus cordata, Ulex europaeus
[plante1] Castanea sativa (juv), Frangula alnus, Lonicera periclymenum, Populus tremula (juv), Pteridium aquilinum, Pyrus pyraster, Quercus pyrenaica (juv), Quercus robur (juv), Rubia peregrina, Rubus section Fruticosi (sous-section Discolores), Rubus section Corylifolii,, Sorbus torminalis (juv) Salix acuminata, Ulmus minor
[briophytes] Hylocomium splendens, Hypnum cupressiforme, Pleurozium schreberi, Scleropodium purum
[orthopteres] Leptophyes punctatissima, Phaneroptera falcata, Phaneroptera nana, Tettigonia viridissima

Valeur biologique

Cet habitat n’héberge pas d’espèces végétales protégées.

Son intérêt biologique réside dans le fait qu’il s’agit d’un habitat de transition.

Menaces

L’aspect touffu des fourrés, leur situation en marge de milieux plus faciles à identifier, la difficulté à prendre en compte une approche dynamique des paysages, amènent trop fréquemment les aménageurs et les responsables de gestion à pratiquer des « nettoyages » et à faire disparaître ce type d’habitats.


Statut régional

L’habitat est assez répandu sur les substrats acides des 4 départements

 

Fourrés xéro-thermophiles

Rédacteur : David Suarez

Physionomie – écologie

Les fourrés xéro-thermophiles sont des formations arbustives denses qui se développent sur des substrats carbonatés ou basiques formés sur les calcaires secondaires du Jurassique et du Crétacé supérieur. Il s’agit le plus souvent de peuplements de Genévrier commun Juniperus communis, associés ou non à d’autres essences arbustives basses, dont la physionomie varie du fourré dense au voile épars, voire d’îlots parsemant les pelouses calcicoles auxquelles ils sont presque toujours associés. En fonction des conditions stationnelles, ces fourrés peuvent revêtir un caractère primaire, notamment sur les corniches rocheuses ou les fortes pentes soumises à des contraintes érosives bloquant la dynamique évolutive naturelle de cet habitat. Dans ces conditions, le Buis Buxus sempervirens remplace alors souvent le genévrier et forme des peuplements denses et monospécifiques. En dehors de ces stations particulières, il s’agit de formations secondaires instables issues de pratiques agropastorales extensives anciennes. En l’absence de pastoralisme ou de gestion mécanique permettant la régénération du genévrier et freinant le développement des jeunes arbres, la dynamique évolutive naturelle conduit à l’installation d’un boisement calcicole (chênaie pubescente, chênaie verte atlantique).

Le Genévrier est un arbuste répandu en Europe, des plaines jusqu’à l’étage subalpin, dont la hauteur peut atteindre 7 à 8 mètres et dont le port, très variable, est en rapport avec les conditions environnementales. Les sexes sont séparés et il existe des pieds mâles (plus nombreux mais à sénescence plus précoce) et des pieds femelles. La longévité moyenne est de l’ordre de 70-100 ans mais un record de 2000 ans est connu. La maturité sexuelle est tardive (vers 10 ans) et la période de fertilité optimale se situe entre 20 et 45 ans.

Le Buis est, quant à lui, un arbuste thermophile à affinités méditerranéo-montagnardes qui, après une extension importante à

la période xéro-thermique (- 4000 à – 5000 ans), n’a pu se maintenir en plaine centre-atlantique qu’à la faveur de biotopes particuliers tels que les corniches rocheuses, les sommets de falaises ou les pelouses calcicoles à sol très superficiel où sa présence a un caractère relictuel.

En Poitou-Charentes, la variabilité de l’habitat est faible puisque 3 associations végétales différentes sont présentes :

En Charente, sur les plateaux calcaires tabulaires durs du Turonien, aux environs d’Angoulême, se développe la junipéraie à Nerprun des rochers et brande Rhamno saxatilis-Ericetum scopariae , avec Rhamnus saxatilis, Rhamnus alaternus, Rosa pimpinellifolia.Ils sont ici associés aux pelouses calcicoles xérophiles du Xerobromion, et plus particulièrement à l’association du Sideritido guillonii-Koelerietum vallesianae.

En Charente, Charente-Maritime et Vienne, là aussi en association avec les pelouses calcicoles du Xerobromion sur des sols bruns calciques, se développe une association originale à tendance acidicline : la junipéraie à brande et Spirée d’Espagne Erico scopariae-Spiraetum obovati, avec Erica scoparia et Spiraea hypericifolia ssp obovata.

En Charente, aux alentours d’Angoulême sur les pentes rocheuses et les éboulis exposés au sud des plateaux calcaires durs, on observe ponctuellement la buxaie à Nerprun des rochers et buis Rhamno saxatilis-Buxetum sempervirentis, avec Buxus sempervirens et Rhamnus saxatilis .

Ces 3 associations bien caractérisées restent très rares en Poitou-Charentes. La plupart des autres stations de fourrés xéro-thermophiles de la région appartenant à l’alliance du Berberidion se présentent sous forme de junipéraies ou de buxaies monospécifiques de faible intérêt floristique par rapport aux pelouses calcicoles qu’elles accompagnent généralement.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

Alliance : Berberidion vulgaris (Braun-Blanq. 1950)

Sous-alliances : Berberidenion vulgaris Géhu, De Foucault Delelis 1983, Rosenion micranthae Arlot ex Rameau

Associations : Erico scopariae-Spiraetum obovati, Rhamno saxatilis-Ericetum scopariae, Rhamno saxatilis-Buxetum sempervirentis

COR 1991

31.82 Fruticées à Buis

31.88 Fruticées à Genévriers communs

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

5110 Formations stables xéro-thermophiles à Buxus sempervirens des pentes rocheuses

5130 Formations à Juniperus communis sur landes ou pelouses calcaires

Confusions possibles

Cet habitat peut être confondu avec d’autres fourrés. Néanmoins, la dominance du genévrier ou du buis permet généralement de le différencier des fruticées à pruneliers et troènes, sur sols plus profonds, ou de la jeune chênaie pubescente, où les genévriers, généralement âgés, se raréfient au profit des chênes omniprésents. En cas de forte présence de la Brande (Erica scoparia), le Berberidion peut également être confondu avec la lande sèche, qui se développe sur les sols acides. Dans ce cas la présence d’autres éricacées comme la Bruyère cendrée (Erica cinerea) ou la Callune (Calluna vulgaris), permet de faire aisément la différence entre ces 2 habitats.

Dynamique

Formations secondaires issues de déforestations historiques anciennes et de régimes agri-pastoraux (pacage), parfois aussi d’une reconstitution séculaire du tapis végétal après abandon des cultures, les fourrés xéro-thermophiles évoluent naturellement vers la forêt calcicole. Cette évolution peut être plus ou moins rapide, en fonction de l’épaisseur du sol.

Espèces indicatrices

[plante2] *Berberis vulgaris, Buxus sempervirens, Juniperus communis, Prunus mahaleb, *Rhamnus alaternus, *Rhamnus saxatilis ssp infectoria, *Rosa pimpinellifolia, *Spiraea hypericifolia ssp obovata
[plante1] Acer monspessulanum, Brachypodium pinnatum, Cornus sanguinea, Erica scoparia , *Genista pilosa, Hedera helix, Laburnum anagyroides, Ligustrum vulgare , Lonicera periclymenum, *Phillyrea latifolia, Prunus spinosa, Quercus humilis, Quercus ilex, Rosa agrestis, Rosa gr.canina, Rosa micrantha, Rubia peregrina, *Sorbus aria, Taxus baccata, Teucrium chamaedrys, Viburnum lantana , Vincetoxicum hirundinaria
[briophytes] Bryum caespiticium, Ditrichum crispatissimum, Entodon concinnus, Fissidens dubius, Hylocomium splendens, Hypnum cupressiforme, Hypnum lacunosum, Pleurochaete squarrosa, Racomitrium canescens, Rhytidium rugosum, Scleropodium purum, Thuidium philiberti, Trichostomum crispulum
[champignons] Calocybe gambosa, Entoloma clypeatum, Mycena ustalis, Tricholoma scalpturatum, Tubaria autochtona
[oiseaux] Hypolaïs polyglotte Hippolais polyglotta, Pipit des arbres Anthus trivialis
[coleopteres] Cicadetta montana, Empusa pennata

Valeur biologique

Cet habitat est encore relativement bien représenté en Poitou-Charentes. Néanmoins, la plupart des stations existantes sont constituées de peuplements quasi monospécifiques de Genévrier commun ou de Buis, le plus souvent accompagnés d’espèces pionnières de la chênaie pubescente. Le cortège floristique est alors banal, la majorité des plantes présentes étant communes dans les secteurs calcaires de la région.

Cependant, le groupement du Berberidion typique, à forte valeur patrimoniale, existe encore sur les sites très secs où il est en contact avec des pelouses du Xerobromion. Plusieurs espèces végétales protégées au niveau régional ou inscrites sur la Liste Rouge régionale peuvent alors êtres présentes comme Berberis vulgaris, Phillyrea latifolia, Rhamnus alaternus, Rhamnus saxatilis, Rosa pimpinellifolia, Spiraea hypericifolia ou Sorbus aria. Ces fourrés abritent également une faune diversifiée, notamment des reptiles, oiseaux et mammifères qui utilisent le couvert végétal dense souvent impénétrable pour l’homme comme lieu de refuge et de reproduction.

Menaces

Comme les pelouses calcicoles, les fourrés xéro-thermophiles de la région sont les témoins d’action anthropiques anciennes, et notamment du pâturage des coteaux par les ovins, et ce depuis des siècles. Depuis le milieu du XXème siècle, cet habitat a connu une régression due à différents facteurs comme l’abandon du pastoralisme, qui conduit peu à peu à des boisements de moindre intérêt biologique, l’enrésinement systématique des coteaux, la mise en culture des secteurs à faible pente, l’exploitation des carrières de calcaire, l’urbanisation… Sur certaines zones situées en périphérie urbaine, on observe parfois une colonisation du Berberidion par des arbustes exotiques échappés des jardins, comme les cotonéasters, pyracanthas, buddleias… qui peuvent prendre de l’ampleur rapidement et menacer le cortège végétal initial du groupement.

Statut régional

Cet habitat a une répartition assez large dans la région et peut couvrir des surfaces conséquentes au sein des secteurs calcaires, sa fréquence départementale reflétant assez fidèlement l’étendue des affleurements crétacés et jurassiques : très commune en Charente, commune en Charente-Maritime et Vienne, la chênaie pubescente devient plus localisée dans les Deux-Sèvres. C’est dans un petit secteur à cheval sur le nord de 17 et le sud de 79 que se trouvent les exemplaires de cet habitat les plus riches botaniquement de tout le Poitou-Charentes : il s’agit de fragments relictuels d’une ancienne ceinture de forêts s’étendant jusqu’aux environs d’Angoulême et connue sous le nom de « sylve d’Argenson », ensemble aujourd’hui morcelé , défriché et mis en culture depuis le Moyen Age.

16 : forêt de la Braconne, forêt de Boixe

17 : forêt de Benon, bois de St Christophe

79 : forêt d’Aulnay, forêt de Chizé, bois d’Availles

86 : forêt de Lussac, bois de St Benoît, de Chauvigny