Prés salés méditerranéens et thermo-atlantiques

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie-écologie

La prairie subhalophile thermo-atlantique se développe dans les grands marais arrière-littoraux de Charente-Maritime sur un sol argileux compact connu sous le nom local de « bri », à structure fondue en période de forte pluviométrie mais pouvant présenter de profondes fentes de retrait en période estivale. Ce sol, formé à partir d’anciennes alluvions fluvio-marines déposées au cours du Quaternaire récent (colmatage d’anciens schorres), présente des taux de salinité fossile variables selon l’âge de leur dépôt mais en général décroissants selon un gradient ouest/est. Malgré un macro-relief globalement plat (l’altitude moyenne est comprise entre + 2m et + 4m NGF) la micro-topographie est remarquablement variée et permet une importante variabilité de l’habitat :

  • marais « gâts » résultant de l’aménagement par l’Homme d’anciens schorres endigués pour la production de sel et présentant une succession de bassins (les « jas ») de forme et taille variables et de bosses (les « bossis ») formées par les remblais issus du creusement des bassins ; progressivement abandonnée au cours des XVIème et XVIIème siècles en raison du colmatage, la saliculture a laissé la place à un pâturage bovin plus ou moins extensif qui constitue encore aujourd’hui la vocation principale de ces marais gâts ;
  • marais plats, non aménagés par l’Homme, mais présentant encore souvent un micro-relief hérité des anciennes formes du schorre : légères dépressions ou « baisses » où l’eau forme une fiche couche en hiver et au printemps, puis qui s’exondent vers le mois de mai pour devenir très sèches en été, chenaux au cours irrégulier à travers les parcelles et correspondant aux anciens chenaux de drainage du schorre ; la fauche est parfois encore pratiquée dans ce faciès, souvent associée à un pâturage tardif (sur le regain).

    Le climat est de type thermo-atlantique avec un maximum pluviométrique en hiver et un net déficit hydrique entre juin et août.
    L’habitat se présente comme une prairie vivace haute et dense constituée d’hémicryptophytes et de géophytes – sauf au niveau de « taches salées » où les alternances d’engorgement et de dessication favorisent la remontée du sel à la surface du sol et ne permettent plus que le développement de tonsures rases à la composition floristique nettement différente de la périphérie ; les espèces dominantes appartiennent aux familles des Poacées, des Cypéracées (la Laîche divisée Carex divisa est une des espèces emblématiques de l’habitat) et des Fabacées (le genre Trifolium, avec près de 10 espèces, est exceptionnellement bien représenté) ; les Apiacées (3 espèces du genre Oenanthe) et les Renonculacées peuvent être aussi abondantes. La phénologie varie selon la position topographique mais, en conditions moyennes d’hydromorphie, le pic végétatif est atteint entre le 20 mai et le 10 juin.

La variabilité de l’habitat s’effectue surtout en fonction de l’hydromorphie et de l’halomorphie des sols, elles-mêmes étroitement dépendantes de la micro-topographie ; le type de gestion agricole (fauche/pâturage, intensité du piétinement) influe également sur la composition végétale :

  • en conditions moyennes – méso-hygrophiles – se développe la communauté à Trèfle maritime et Oenanthe à feuilles de silaus (TRIFOLIO SQUAMOSI-OENANTHETUM SILAIFOLIAE) pour les prairies fauchées et la communauté à Laîche divisée (CARICI DIVISAE-LOLIETUM PERENNIS) pour les parcelles pâturées ; les secteurs très piétinés abritent une communauté à Trèfle résupiné (PLANTAGINI MAJORIS-TRIFOLIETUM RESUPINATI) ;
  • en conditions plus hydromorphes (baisses, bordures de jas), on observe la communauté à Vulpin bulbeux (ALOPECURO BULBOSI-JUNCETUM GERARDII), voire celle à Renoncule à feuilles d’ophioglosse (RANUNCULO OPHIOGLOSSIFOLII-OENANTHETUM FISTULOSAE) remplacée, en cas de fort piétinement, par un groupement à Menthe pouillot (RANUNCULO OPHIOGLOSSIFOLII-MENTHETUM PULEGII).

Les tonsures se développant sur les taches salées au sein de l’habitat peuvent, selon les cas, être rattachées à une variante halophile de la prairie du 15.52, soit, lorsque le tapis végétal est constitué essentiellement de thérophytes (Parapholis, Hordeum, Spergula, Bupleurum) aux végétations pionnières annuelles du 15.1.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

AGROSTIETEA STOLONIFERAE Th.Müll. & Gors 1969

Alopecurion utriculati Zeidler 1954 : prairies méso-hygrophiles thermo-atlantiques

Potentillion anserinae Tüxen 1947 : prairies méso-hygrophiles piétinées, eutrophes

Oenanthion fistulosae de Foucault 1984 : prairies atlantiques longuement inondables

COR 1991

15.52 Prés salés à Juncus gerardii et Carex divisa

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1410 Prés salés méditerranéens
    • 1410-3 Prairies subhalophiles thermo-atlantiques

Confusions possibles

La localisation de l’habitat en situation propé-littorale permet en général d’éviter les confusions. Cependant, sur la bordure interne des marais arrière-littoraux, et vers l’amont des vallées fluviales, la prairie subhalophile thermo-atlantique cède progressivement la place à des prairies humides eutrophes, de nature variable, mais relevant en général de l’habitat 37.2 : communauté à Pulicaire dysentérique et Jonc glauque (PULICARIO-JUNCETUM INFLEXI), communauté à Séneçon aquatique et Oenanthe à feuilles de silaus (SENECIONI-OENANTHETUM SILAIFOLIAE), communauté à Gratiole officinale et Oenanthe fistuleuse (GRATIOLO OFFICINALIS-OENANTHETUM FISTULOSAE) etc..Le lessivage du sel dans le bri ancien, voire la nature différente des alluvions (d’origine fluviale et non plus marine) expliquent ce passage du 15.52 au 37.2.

Dynamique

En cas d’abandon de toute gestion agricole, la prairie subhalophile évolue vers une friche herbacée où dominent quelques Poacées vivaces compétitives comme l’Agropyre Elymus repens, au détriment des nombreuses annuelles qui finissent pas disparaître totalement (cas des Trifolium, notamment). Les séries dynamiques varient ensuite en fonction de la nature des sols : sur bri ancien, presque dessalé, des fourrés eutrophes à Prunellier ne tardent pas à s’implanter, préparant la venue d’une ormaie-frênaie arrière-littorale à Arum d’Italie et Iris fétide (ARO-ULMETUM MINORIS). Sur bri plus récent, avec des taux de sels encore importants, l’apparition des espèces ligneuses est plus lente, voire impossible pour des essences comme le Frêne.

Valeur biologique

L’habitat – dans son ensemble – est considéré comme menacé en Europe et figure à l’Annexe I de la Directive 92/43/CEE dite « Directive Habitats ». Sur le plan botanique, l’habitat présente un intérêt floristique élevé comme biotope pour plusieurs espèces végétales rares ou menacées : la Renoncule à feuilles d’ophioglosse, espèce protégée au niveau national et inscrite au Livre Rouge de la Flore Menacée de France (taxons non prioritaires) possède dans les grands marais arrière-littoraux charentais une population de plusieurs millions de pieds qui en fait, probablement, le bastion actuel de l’espèce sur tout le territoire français. L’Iris maritime, splendide espèce aux grandes fleurs bleues protégée en région Poitou-Charentes, possède dans les prairies du 15.52 ses seules stations extra-méditerranéennes et les effectifs encore présents dans certaines parcelles du marais de Rochefort se comptent en milliers d’individus. L’abondance de certains trèfles rares comme le Trèfle de Micheli ou le Trèfle
faux-pied d‘oiseau est également remarquable, de même que la présence de taxons à aire essentiellement méridionale comme Centaurium spicatum ou Hordeum gussoneanum qui trouvent dans les marais charentais (et sud vendéens) leur limite septentrionale de distribution.

L’avifaune des marais arrière-littoraux charentais est d’une grande richesse et originalité comme en témoigne le nombre élevé de Zones de Protection Spéciale décrites à ce jour. En raison du grand rayon d’action des oiseaux et de leur utilisation de différents habitats au cours d’un cycle annuel, il est toutefois difficile d’isoler l’intérêt spécifique des seules prairies pour ceux-ci, indépendamment des milieux voisins aussi largement utilisés (boisements, haies, fossés, mares cynégétiques, prés salés, estuaires). Les prairies subhalophiles doivent donc être considérées comme une pièce parmi d’autres du complexe d’habitats littoraux indispensable à la survie de cette avifaune remarquable

Menaces

La menace essentielle concernant l’habitat réside dans un changement de gestion agricole : l’intensification des prairies – fertilisation, charges pastorales élevés, sursemis d’espèces fourragère productives, drainage – voire leur transformation pure et simple en cultures intensives (céréales, maïs) ont entraîné au cours des 2 dernières décennies la disparition ou l’altération de milliers d’hectares de marais arrière-littoraux. Ce mouvement massif a pu être en partie freiné depuis 1991 par les mesures agri-environnementales de la PAC qui prévoient l’octroi de compensations financières aux agriculteurs développant des pratiques respectueuses de l’environnement. L’avenir de cet habitat reste cependant suspendu aux aléas de la politique agricole européenne et aux crédits alloués au soutien de la prairie naturelle humide.

Espèces indicatrices

[plante2] Alopecurus bulbosus, Bupleurum tenuissimum, Carex divisa, *Centaurium spicatum, Centaurium tenuiflorum, Galium debile, *Hordeum gussoneanum, *Iris spuria, Juncus gerardii, Mentha pulegium, Oenanthe fistulosa, Oenanthe silaifolia, *Ranunculus ophioglossifolius, Senecio aquaticus, *Trifolium michelianum, *Trifolium ornithopodioides, Trifolium resupinatum, Trifolium squamosum
[plante1] Agrostis stolonifera, Althaea officinalis, Bromus racemosus, *Cardamine parviflora, Carex cuprina, Eleocharis palustris, Eleocharis uniglumis, Gaudinia fragilis, Hordeum marinum, Hordeum secalinum ,Lolium perenne, Oenanthe pimpinelloides, Parapholis strigosa, Plantago coronopus, Ranunculus sardous, Trifolium fragiferum
[oiseaux] Alauda arvensis, Asio flammeus, Cisticola juncidis, Miliaria calandra, Motacilla flava, Saxicola rubetra, Vanellus vanellus

Les 4 trèfles caractéristiques de l’habitat :

Statut régional

L’habitat est présent dans les grands marais arrière-littoraux de Charente-Maritime, ainsi que, plus localement, dans les îles. Il remonte également en amont des vallées fluviales, dans la zone d’influence de l’eau saumâtre apportée par les marées.

17 : marais Poitevin, marais de Rochefort (optimal), marais de Brouage (optimal), marais de Seudre (local), estuaire Gironde (local), val de Charente (jusqu’à Taillebourg)

 

Prés salés atlantiques

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie – écologie

L’habitat regroupe l’ensemble des végétations pérennes, herbacées ou frutescentes basses, colonisant la partie moyenne de la zone intertidale et inondables plus ou moins régulièrement par les marées. Le substrat est vaseux ou vaso-sableux selon les situations, toujours salé mais parfois aussi imprégné d’eau douce par des suintements phréatiques ou des apports latéraux (estuaires). La teneur en matière organique est variable mais peut être localement renforcée au niveau des zones de dépôt des laisses de mer. En séquence naturelle, l’habitat se trouve en contact inférieur avec les prairies à spartine (15.2) ou les salicorniaies pionnières annuelles à Salicornia fragilis/dolichostachya (15.1), alors que le contact supérieur s’effectue souvent avec un linéaire ou une frange plus ou moins large de fourrés à Suaeda vera (15.6) précédant une digue de protection contre les incursions marines. En sites perturbés (marais endigués), l’habitat colonise les bordures de bassins subissant encore des entrées occasionnelles d’eau salée et les bordures du réseau hydraulique (étiers, chenaux, ruissons).

La variabilité régionale de l’habitat est très importante en fonction de la durée et de la fréquence des submersions par l’eau salée ou selon la nature du substrat. Une quinzaine de communautés différentes sont connues sur le littoral charentais, qui se regroupent en 5 ensembles distincts :

  • les prés salés du bas schorre : ils sont inondés régulièrement lors des hautes mers de forts coefficients. La végétation, à dominante herbacée ou ligneuse selon les faciès, présente en général un fort recouvrement et l’Aster maritime Aster tripolium y joue souvent un rôle physionomique important. 2 communautés sont présentes : la prairie salée à Puccinellia maritima (HALIMIONO-PUCCINELLIETUM MARITIMAE) sur sol vaseux inondé fréquemment et à ressuyage lent, et la prairie à Sarcocornia perennis (PUCCINELLIO-SARCOCORNIETUM PERENNIS), des substrats moins asphyxiques, parfois sableux ;
  • les prés salés du schorre moyen : ils colonisent le plateau du schorre, régulièrement inondé mais à ressuyage rapide. Ils sont représentés par 2 communautés : la prairie argentée à Obione (BOSTRYCHIO-HALIMIONETUM PORTULACOIDIS, association végétale centrale des prés salés du Centre-Ouest où elle couvre de vastes surfaces) et le pré salé piétiné à Glycérie fasciculée (ASTERO TRIPOLII-PUCCINELLIETUM FASCICULATAE) présent dans la moitié nord de la France sur les schorres mais rencontré sur le littoral charentais uniquement en situations saumâtres à l’intérieur des digues ;
  • les prés salés du haut schorre : ils ne sont submergés que 2 fois par mois lunaire, au moment des vives eaux provoquées par les syzygies (alignement du Soleil, de la Terre et de la Lune), voire encore plus rarement, lors des marées de très forts coefficients (équinoxes). Dans certains faciès, la sécheresse du substrat peut être assez marquée alors que dans d’autres, une nappe phréatique douce peut imprégner jusqu’aux horizons supérieurs du sol. C’est à ce niveau que la variabilité est la plus forte, avec 7 communautés possibles : la prairie à Fétuque littorale (FESTUCETUM LITTORALIS) des hauts de prés salés peu atteints par la marée, la prairie basse à Plantain maritime et Statice commun (PLANTAGINI MARITIMI-LIMONIETUM VULGARIS) des sub-cuvettes planes sur sol sablo-vaseux, le pré à Armoise maritime (ARTEMISIETUM MARITIMAE),sur les très hauts niveaux enrichis en matière organique, le pré à Jonc de Gérard (LIMONIO VULGARIS-JUNCETUM GERARDII), sur des schorres humectés d’eau douce, le pré à Laîche étirée (JUNCO MARITIMI-CARICETUM EXTENSAE) sur des sols fortement imprégnés d’eau douce phréatique, le pré à Cranson d’Angleterre (COCHLEARIO ANGLICAE-PLANTAGINETUM MARITIMAE) de certaines cuvettes plates du schorre supérieur, et le pré à Glycérie de Foucaud (HALIMIONO-PUCCINELLIETUM FOUCAUDII) des bordures estuariennes saumâtres ;
  • les prés salés du contact haut schorre/dune : ils se développent très localement sur sols sablo-limoneux dans les rares sites où des prés salés viennent en contact avec des dunes ; la submersion par les eaux marines est exceptionnelle et n’intervient que lors des marées d’équinoxes. 2 communautés sont connues : le pré à Statice à feuilles de lychnis (LIMONIETUM LYCHNIDIFOLIO-DODARTII) des hauts schorres sableux et le pré à Statice à feuilles ovales (groupement à Frankenia laevis et Limonium ovalifolium) de statut encore incertain ;
  • les prairies hautes des niveaux supérieurs : elles sont localisées à la frange supérieure des schorres, dans la zone où s’accumulent les matières organiques apportées par les hautes mers de vives-eaux ; le sol y est riche en azote et peut subir une dessication intense en été. 2 communautés sont connues : la prairie nitro-halophile à Agropyre piquant (BETO MARITIMAE-AGROPYRETUM PUNGENTIS), haute prairie d’un vert glauque typique se développant dans la zone d’accumulation des débris organiques salés, et la prairie à Inule faux-crithme (AGROPYRO PUNGENTIS-INULETUM CRITHMOIDIS), fréquente dans les marais endigués sur sols enrichis en restes coquilliers.

Beaucoup de ces faciès peuvent se développer en situations secondaires, en bordure des bassins des marais endigués : leur développement est alors souvent linéaire et les séquences sont téléscopées sur les berges en l’absence d’un gradient progressif de submersion/exondation ; bien que ces situations présentent une composition floristique souvent appauvrie par rapport à leurs homologues des prés salés primaires, elles constituent souvent le biotope d’élection pour plusieurs communautés de la marge supérieure des schorres dont elles ont été éliminées par les divers aménagements réalisés au cours des siècles (endiguement, surtout) : prairie à Fétuque littorale, pré à Armoise maritime, prairie à Inule faux-crithme.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

ASTERETEA TRIPOLII Westhoff et Beeftink 1962

GLAUCO MARITIMAE-PUCCINELLIETALIA MARITIMAE Westhoff et Beeftink 1962 : prairies salées atlantiques européennes

Puccinellion maritimae Christiansen 1927 : schorres inférieurs à moyens

Armerion maritimae Br.Bl. & de Leeuw 1936 : niveaux hauts à supérieurs des schorres

Glauco maritimae-Juncion maritimi Géhu et Géhu-Franck

2004 : milieux saumâtres

COR 1991

  • 15.3 Prés salés atlantiques
    • 15.31 Prés salés avec Puccinellia maritima
  • 15.32 Groupements à Puccinellia maritima des prés salés
  • 15.33 Communautés du schorre supérieur
  • 15.34 Prés salés à Puccinellia et Spergularia marina
  • 15.35 Végétation à Elymus pycnanthus

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1330 Prés salés atlantiques
    • 1330-1 Prés salés du bas schorre
    • 1330-2 Prés salés du schorre moyen
    • 1330-3 Prés salés du haut schorre
    • 1330-4 Prés salés du contact schorre/dune
    • 1330-5 Prairies hautes des niveaux supérieurs atteints par la marée

Confusions possibles

L’habitat se distingue aisément des autres habitats en contact lorsque la zonation produit des ceintures plus ou moins larges et disjointes ; dans certains cas toutefois de schorres à micro-topographie complexe, un effet de mosaïque peut entraîner des mélanges par taches plus ou moins juxtaposées de 15.1/15.2/15.3, voire 15.6. Cette structure « en écailles » nécessite de grandes précautions méthodologiques lors de la réalisation de relevés de végétation destinés à être traités ultérieurement dans des tableaux phytosociologiques, sous peine de ne pas satisfaire à divers critères d’homogénité (écologique, floristique, physionomique).

Par ailleurs, la variabilité interne très forte de l’habitat peut entraîner des difficultés pour référer telle ou telle portion de pré salé à l’un ou l’autre des 5 groupes, notamment dans les inévitables zones de transition (spécialement à la jonction bas schorre/schorre moyen).

Dynamique

La dynamique naturelle interne de l’habitat est très faible du fait des fortes contraintes écologiques ; les liens observés entre les différentes communautés du schorre sont donc plus de l’ordre du simple contact spatial que l’indice d’une possible dynamique.

Valeur biologique

4 communautés sont inscrites au Livre rouge des Phytocénoses terrestres du littoral français (GEHU, 1991) : le pré salé piétiné à Glycérie fasciculée (ASTERO TRIPOLII-PUCCINELLIETUM FASCICULATAE), le pré à Armoise maritime (ARTEMISIETUM MARITIMAE), le pré à Statice à feuilles de lychnis (LIMONIETUM LYCHNIDIFOLIO-DODARTII) et la prairie à Inule faux-crithme (AGROPYRO PUNGENTIS-INULETUM CRITHMOIDIS). _ 2 autres communautés, de description postérieure à la rédaction de cette synthèse, mériteraient de figurer également sur ce Livre Rouge : le pré à Glycérie de Foucaud (HALIMIONO-PUCCINELLIETUM FOUCAUDII), synendémique des côtes charentaises et le pré à Statice à feuilles ovales et Frankénie lisse, de statut phytosociologique encore non formellement défini. Tous les faciès de l’habitat sont par ailleurs inscrits à l’Annexe I de la Directive Habitats et sont donc considérés comme rares/menacés en Europe.

7 espèces végétales régionalement ou nationalement rares/menacées sont concernées par cet habitat : la Glycérie de Foucaud Puccinellia foucaudii, endémique du littoral franco-atlantique et le Statice à feuilles ovales Limonium ovalifolium, figurent au Livre Rouge de la Flore Menacée de France comme taxons prioritaires.

Les 5 autres présentent surtout une rareté régionale : le Cranson d’Angleterre Cochlearia anglica est localisé à un petit secteur de l’estuaire Seudre ; l’Armérie maritime Armeria maritima, très commune dans d’autres régions atlantiques (Bretagne), reste rare en Poitou-Charentes (Seudre, surtout) ; le Statice à feuilles de lychnis Limonium auriculae-ursifolium – longtemps confondu avec le Statice à feuilles ovales – possède une distribution régionale plus restreinte que ce dernier et n’est connu avec certitude que de l’île de Ré et de la presqu’île d’Arvert ; la Laîche étirée Carex extensa reste très disséminée, ses occurrences étant liées à un phénomène rare, la présence de suintements phréatiques doux au niveau du pré salé ; quant à la Glycérie fasciculée Puccinellia fasciculata, ses stations sont très dispersées dans les secteurs les plus saumâtres des grands marais arrière-littoraux (Seudre, Brouage, Rochefort) encore soumis à un pâturage bovin régulier.

Espèces indicatrices

[plante2] *Armeria maritima, Aster tripolium, Beta vulgaris ssp.maritima, *Carex extensa, *Cochlearia anglica, Elytrigia x acuta, Elymus pycnanthus, Festuca rubra ssp.littoralis, Frankenia laevis, Glaux maritima, Halimione portulacoides, Inula crithmoides, Juncus gerardii, *Limonium auriculae-ursifolium, Limonium dodartii, *Limonium ovalifolium, Limonium vulgare, Plantago maritime, *Puccinellia fasciculata, *Puccinellia foucaudii, Puccinellia maritima, Sarcocornia perennis, Spergularia media, Triglochin maritimum
[plante1] Atriplex prostrata, Bolboschoenus maritimus, Juncus acutus, Juncus maritimus, Samolus valerandi, Sonchus maritimus, Spergularia marina, Suaeda maritima
[champignons] Agaricus bernardii
[oiseaux] Asio flammeus, Himantopus himantopus, Luscinia svecica namnetum, Recurvirsotra avosetta, Tringa totanus

Menaces

Des modifications de la sédimentation – naturelles ou induites par divers aménagements – sont susceptibles, par érosion ou « engraissement », de modifier l’agencement des communautés. L’endiguement du haut schorre pour la création d’infrastructures portuaires, conchylicoles ou piscicoles ou à des fins d’aménagements touristiques peut faire disparaître de précieuses communautés, notamment celles inféodées à la partie supérieure des prés salés. Divers problèmes plus ponctuels tels que le creusement de mares cynégétiques ou le passage d’engins motorisés lourds pour l’accès aux zones ostréicoles sont susceptibles aussi d’altérer l’habitat. Le piétinement peut être également un facteur défavorable, particulièrement en ce qui concerne la zone de contact schorre/dunes. Au titre des impacts indirects, on retiendra surtout l’eutrophisation du bassin versant et les pompages dans les nappes phréatiques, susceptibles d’altérer la balance trophique et la nature du substrat.

Dans les situations secondaires (marais endigués), les différents faciès de l’habitat sont bien sûr beaucoup plus exposés : ils restent alors entièrement dépendants d’un réseau hydraulique en bon état permettant les arrivées régulières d’eau marine, faute de quoi une dérive dynamique vers des communautés saumâtres s’enclenche en l’espace de 1 ou 2 décennies. Ils restent aussi bien sûr à la merci de tout changement de vocation des bassins et, notamment, d’une intensification des méthodes aquacoles.

Statut régional

L’habitat est présent potentiellement sur l’ensemble de la frange littorale de Charente-Maritime et de ses îles.

17 :

  • situations primaires : baie de l’Aiguillon, Fier d’Ars (île de Ré), baie de Moëze, estuaire Seudre, baie de Bonne Anse
  • situations secondaires : marais endigués autour du Fier d’Ars (île de Ré), anciens marais salants d’Oléron, estuaire Seudre
 

Prés à spartines

Rédacteur : Jean Terrisse

Physionomie-écologie

L’habitat regroupe des végétations graminéennes pionnières vivaces occupant la partie inférieure des prés salés correspondant à la haute slikke, plus rarement les dépressions du schorre. Le substrat est constitué de sédiments fins – vases ou sables -, plus ou moins consolidés et saturés régulièrement d’eau salée (en moyenne 2 fois par cycle de 24H, lors des hautes marées). La végétation forme une prairie dense, monostrate, haute de 30-130cm, dominée par 1 ou 2 Poacées du genre Spartina : la Spartine maritime Spartina maritima et la Spartine d’Angleterre Spartina anglica, cette dernière espèce étant un hybride fertile naturel issu du croisement entre la Spartine maritime et une spartine américaine Spartina alterniflora dans le sud de l’Angleterre au cours du XIXème siècle. Les spartines sont des géophytes développant un réseau dense de stolons qui ancrent les plantes dans les vases molles de la slikke tout en assurant leur propagation centrifuge à partir d’îlots pionniers de forme souvent concentrique. La floraison est tardive, en fin d’été et début d’automne, la pollinisation étant assurée par le vent (anémogamie) et la dispersion des semences par le flot.

Le cortège végétal de la spartinaie est d’une grande pauvreté en raison des contraintes écologiques. On y rencontre surtout des algues des genres Fucus, Bostrychia, Pelvetia, Ulva, Enteromorpha et des phanérogames halophiles transgressives des végétations situées en contact : Zostère naine Zostera noltii ou salicornes annuelles du groupe Salicornia fragilis/dolichostachya pour les contacts inférieurs, Salicorne rampante Sarcocornia perennis ou Aster maritime Aster tripolium pour les végétations du bas schorre en contact supérieur.

La variabilité régionale de l’habitat tient à la dominance de l’une ou l’autre des 2 spartines qui ont amené à la description de 2 associations végétales distinctes :

  • le SPARTINETUM MARITIMAE  : c’est la spartinaie européenne d’origine, aujourd’hui en nette régression du fait de la concurrence de la suivante ;
  • le SPARTINETUM ANGLICAE  : spartinaie néophyte, apparue au XIXème siècle et en pleine expansion. Plus haute et plus dense que la précédente, elle possède un pouvoir dynamique et des aptitudes colonisatrices très élevés, tendant à supplanter la spartinaie maritime dans les localités où les 2 phytocénoses coexistent.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

SPARTINETEA GLABRAE Tüxen in Beeftink 1962

Végétation pionnière vivace des vases molles salées et saumâtres, longuement inondables

Spartinion anglicae Conard 1935 : communautés européennes

COR 1991

15.2 Prairies à spartine

15.21 Prairies à Spartine à feuilles plates

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

1320 Prés à Spartina

Confusions possibles

La spartinaie maritime indigène peut facilement être confondue avec la spartinaie anglaise dominée par une néophyte invasive. La distinction des 2 espèces structurantes de spartines est alors indispensable : chez Spartina maritima, l’angle formé par les feuilles avec la tige est très aigu, les limbes sont enroulés presque sur toute leur longueur et ils sont rapidement caducs (il suffit de tirer légèrement sur une feuille pour la détacher) ; chez Spartina anglica, l’angle feuilles/tige est beaucoup plus ouvert, le limbe est plan et très persistant (il faut tirer fort pour le détacher de la tige).

Dynamique

Dans les sites à bilan sédimentaire positif, la spartinaie maritime tend à coloniser l’espace au détriment d’autres habitats (cette évolution est observable en plusieurs point du Fier d’Ars sur l’île de Ré, notamment au débouché du Chenal des Villages où les surfaces occupées par Spartina maritima ont été multipliées par 3 au cours des dernière décennies). Dans divers sites côtiers autrefois endigués mais aujourd’hui abandonnés, la spartinaie maritime tend à conquérir du terrain (Fiers d’Ars, estuaire de la Seudre) témoignant de ses aptitudes pionnières dans la végétalisation des prés salés.

Espèces indicatrices

[plante2] Spartina anglica, Spartina maritima
[plante1] Aster tripolium, Limonium vulgare, Salicornia fragilis, Sarcocornia perennis, Suaeda maritima
[oiseaux] Anser anser, Anthus pratensis, Carduelis cannabina, Emberiza schoeniclus,Motacilla flava
[mollusques] Hydrobia ventrosa, Leucophysia (Auriculinella) bidentata, Myosotella myosotis, Peringia ulvae

Valeur biologique

La spartinaie maritime figure au Livre Rouge des Phytocénoses terrestres du Littoral français (GEHU, 1991) : « seule spartinaie européenne, cette phytocénose est en très forte régression, voire disparition, dans bien des sites sous la pression de la phytocénose néophyte Spartinetum townsendii (=spartinaie anglaise) qui la concurrence rapidement ». C’est à ce titre également qu’elle figure à l’Annexe I de la Directive Habitats. Sa richesse floristique est toutefois très faible et elle n’abrite aucune espèce végétale rare ou menacée. Sur le plan de la faune, elle joue le rôle de nourricerie et de refuge pour les juvéniles de diverses espèces de poissons.

Menaces

En dehors des pressions classiques pesant sur les prés salés – remblaiements, endiguements pour la réalisation d’ensembles conchylicoles, modification des bilans sédimentaires par la réalisation d’ouvrages littoraux – la principale menace concernant les spartinaies maritimes du littoral charentais est leur invasion/ remplacement par la spartinaie anglaise : jusqu’en 1970, Spartina anglica était cantonnée de l’estuaire de la Gironde à la Seudre (limite extrême à la pointe méridionale de l’île d’Oléron) pour se retrouver ensuite plus au nord en Baie de l’Aiguillon, le hiatus entre les deux étant occupé par la seule Spartina maritima. Depuis cette date, la spartine anglaise n’a pas cessé sa progression vers le nord : la côte est d’Oléron est maintenant largement conquise et quelques pieds ont même été observés en baie de Moëze, laissant seule intacte la zone comprise entre l’estuaire de la Charente et l’île de Ré.

Cette espèce, d’un pouvoir dynamique très élevé, possède une aptitude exceptionnelle à la fixation des particules amenées par le courant et à l’accélération de la sédimentation, favorisant par là même l’accroissement de la surface des schorres. La colonisation peut être très rapide (de quelques touffes à un millier d’hectares en baie des Veys en Normandie entre 1906 et 1920 !) et se fait en général au détriment des autres habitats situés en contact. La forte biomasse produite entraîne en retour une eutrophisation qui modifie les conditions de milieu des habitats contigus.

Du fait de cette vitesse redoutable de colonisation, la spartinaie anglaise ne s’insère pas réellement dans la dynamique des écosystèmes littoraux mais tend plutôt à prendre la place des habitats occupant son niveau bionomique.

Statut régional

L’habitat est assez répandu sur la façade littorale de Charente-Maritime, notamment dans les principaux sites de prés salés :

17 : prés salés du Fier d’Ars (île de Ré), prés salés de la côte est de l’île d’Oléron, de la baie de Moëze, des estuaires de la Seudre et de la Gironde, de la Baie de Bonne-Anse

 

Végétations pionnières annuelles sur sol salé

Physionomie-écologie

Cet habitat regroupe des formations dominées par des plantes annuelles appartenant surtout aux familles des Chénopodiacées (salicornes, soude) et des Poacées, sur des sols vaseux ou sableux, périodiquement inondés ou aspergés par les eaux marines, de la frange littorale. Quatre grands types de biotopes sont concernés : la slikke et le schorre des vasières tidales, les replats et micro-cuvettes des falaises maritimes, les dépressions dans les dunes et certaines prairies saumâtres arrière-littorales. Selon les faciès, l’habitat occupe des surfaces très ponctuelles de l’ordre du m² (ou moins) comme sur les falaises, alors que dans d’autres comme les prés salés il peut constituer des ceintures assez larges dont la zonation souligne le gradient de submersion par la mer ou divers accidents micro-topographiques (chenaux de drainage, cuvettes). La physionomie varie elle-même fortement en fonction des espèces structurantes – pelouses rases et discontinues à Sagine/salicorniaies hautes et denses – mais le tapis végétal est en général dominé par un faible nombre d’espèces, voire même parfois par une seule (6 des 12 associations connues en Poitou-Charentes sont dominées par une seule espèce de salicorne !). Cependant, la variabilité régionale de l’habitat est forte et, à ce jour, 12 associations végétales ont été décrites.

Les salicorniaies à Salicornia dolichostachya (rare), S.fragilis ou S.obscura et les pelouses à Soude maritime occupent la partie inférieure des prés salés (haute slikke) où elles entrent souvent en contact avec la prairie à spartines.

Les salicorniaies à Salicornia ramosissima, S.pusilla ou S.emerici colonisent le schorre et ses cuvettes mais se rencontrent souvent aussi en arrière des digues, dans des sites halophiles modifiés par l’Homme (marais salants, polders, secteurs conchylicoles). Sur les schorres naturels, elles forment des mosaïques souvent complexes avec les végétations vivaces ou ligneuses des prés salés (voir fiche « Prés salés atlantiques »).

Les pelouses rases à Sagine maritime et diverses Poacées (Parapholis, Desmazeria) ou Brassicacées (Cochlearia, Hymenolobus) se rencontrent dans des biotopes variés mais en général sur des sols à fraction sableuse importante : contact dunes/prés salés, micro-cuvettes des falaises, sentiers littoraux…

Les pelouses à Orge marine ou Orge hérisson sont moins strictement liées à la frange côtière puisqu’on peut les rencontrer sous forme de taches plus ou moins extensives au sein des prairies saumâtres pâturées des grands marais arrière-littoraux sur des sols subissant une dessication intense en été.

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF 2004

THERO-SALICORNIETALIA DOLICHOSTACHYAE Tüxen ex Boullet & Géhu

Salicornion dolichostachyo-fragilis Géhu & Rivas-Martinez

Salicornion europaeo-ramosissimae Géhu & Géhu-Franck

SAGINETALIA MARITIMAE Westhoff, van Leeuwen & Adriani 1962

Saginion maritimae Westhoff, van Leeuwen & Adriani 1962

COR 1991

  • 15.1 Gazons pionniers salés
    • 15.11 Gazons à Salicorne et Suaeda
    • 15.12 Gazons halo-nitrophiles à Frankenia
    • 15.13 Groupements à Sagina et Cochlearia

Directive Habitats 1992 et Cahiers d’habitats

  • 1310 Végétations pionnières à Salicornia et autres espèces annuelles des zones boueuses et sableuses
    • 1310-1 Salicorniaies des bas niveaux (haute slikke atlantique)
    • 1310-2 Salicorniaies des hauts niveaux (schorre atlantique)
    • 1310-4 Pelouses rases à petites annuelles subhalophiles

Confusions possibles

Les risques de confusion concernent surtout les salicorniaies des prés salés mais le niveau bionomique permet en général de faire la différence entre les salicorniaies de bas niveau et celles du haut schorre. En fin de floraison, la couleur peut être une aide précieuse : les salicornes tétraploïdes des bas niveaux ne rougissent jamais mais deviennent jaunes ou brunes au moment de la fructification alors que les salicornes diploïdes des hauts niveaux virent au rouge plus ou moins intense selon les espèces. L’identification des communautés à Sagine et Poacées requiert quant à elle une attention fine à la structure de la végétation de façon à identifier clairement les effets de mosaïque entre ces pelouses annuelles et les végétations vivaces au sein desquelles elles se développent généralement. Il en va de même pour les « tonsures » à Orge hérisson Hordeum gussoneanum « noyées » au milieu des prairies subhalophiles (15.52).

Dynamique

Comme dans le cas d’autres communautés annuelles, la dynamique de l’habitat est fortement tributaire de l’équilibre plus ou moins stable existant avec les communautés vivaces voisines : selon la prédominance de l’érosion ou de la sédimentation, les végétations annuelles des prés salés peuvent régresser ou disparaître ou, au contraire, prendre de l’ampleur et couvrir de vastes surfaces sur les vasières tidales. Les pelouses à Sagine et Poacées sont quant à elles souvent dépendantes de micro-perturbations (dont le piétinement) qui maintiennent le milieu ouvert. C’est le cas aussi des tonsures à Orge hérisson ou O.marine, entièrement dépendantes d’une pression de pâturage assez forte sans laquelle les Poacées et Cypéracées vivaces envahissent rapidement tout l’espace.

Enfin, la systématique et l’identification de certains groupes comme les Salicornia restent délicates en raison de caractères morphologiques ténus malgré les progrès accomplis au cours des 2 dernières décennies : des controverses existent ainsi encore sur l’identité de certains taxons comme le couple Salicornia emerici/S.nitens par exemple.

Espèces indicatrices

[plante2] Cochlearia danica, Desmazeria marina, Hordeum gussonianum, Hordeum marinum, *Hymenolobus procumbens, Parapholis incurva, Parapholis strigosa, Sagina maritima, *Salicornia dolichostachya, Salicornia emerici, Salicornia fragilis, *Salicornia pusilla, Salicornia obscura, Salicornia ramosissima, Suaeda maritima
[plante1] Aster tripolium, Frankenia laevis, Limonium vulgare, Plantago coronopus, Puccinellia maritima, Spartina anglica, Spartina maritima, Spergularia marina
[oiseaux] Branta bernicla, Charadrius hiaticula
[orthopteres] Epacromius tergestinus

Valeur biologique

L’habitat ne présente pas un intérêt floristique patrimonial très fort puisque 4 espèces rares seulement y sont présentes parmi lesquelles : l’Hutchinsie couchée Hymenolobus procumbens (espèce méridionale) qui n’est connue que d’une poignée de stations fugaces de l’estuaire de la Gironde et des côtes oléronaises ; la Salicorne naine Salicornia pusilla (espèce septentrionale) qui possède son unique localité régionale dans l’estuaire de la Seudre alors que Salicornia dolichostachya sensu stricto (i.e séparé de Salicornia fragilis) serait très disséminée ; l’Orge hérisson Hordeum gussoneanum, enfin, est une espèce méditerranéenne qui trouve sa limite nord dans les prairies arrière-littorales du Centre-Ouest où elle peut toutefois être très abondante. L’intérêt phytocénotique de l’habitat est revanche plus marqué puisque 3 associations végétales figurent au Livre Rouge des Phytocénoses terrestres du Littoral français (GEHU, 1991) : l’HYMENOLOBO PROCUMBENTIS-SAGINETUM MARITIMAE, le PARAPHOLISO-HORDEETUM MARITIMAE et le PUCCINELLIO MARITIMAE-SALICORNIETUM EMERICI. Mal connue (et non encore formellement décrite) la communauté à Parapholis strigosa et Hordeum gussoneanum mériterait aussi de figurer parmi les associations végétales précieuses de l’habitat.

Sur le plan faunistique, certaines salicorniaies constituent le biotope de l’Oedipode des salines, un Orthoptère rare, à l’écologie très spécialisée.

Menaces

Pour les salicorniaies des vasières tidales, la principale menace réside dans d’éventuelles modifications de la dynamique sédimentaire, tant naturelle que d’origine anthropique (digues, enrochements) ; le remblaiement ou l’endiguement de portions de prés salés reste aussi une source potentielle de dégradation. Pour les pelouses rases, un piétinement excessif (tourisme, pêche) peut entraîner une altération de l’habitat alors que la fréquentation des prairies littorales par le bétail semble au contraire indispensable au maintien des tonsures à orges.

3 espèces de salicornes annuelles typiques de différents faciès de l’habitat

Statut régional

Habitat présent uniquement sur la frange arrière-littorale de Charente-Maritime, sur les côtes insulaires et le long des estuaires de la Charente, de la Seudre et de la Gironde.

Les sites majeurs de prés salés, de contact dunes/prés salés et de falaises maritimes abritant l’habitat ont été intégrés dans les grands inventaires de faune et de flore (ZNIEFF, ZSC, ZPS)

17 : prés salés du Fier d’Ars (île de Ré), prés salés de Boyardville, de Gatseau (île d’Oléron), de la baie de Moëze, falaises de Royan, prairies du marais de Rochefort, du marais de Brouage

 

Glossaire du Guide des habitats naturels du Poitou-Charentes

acides humiques : acides organiques présents dans les humus.

acidicline : qui préfère légèrement les sols acides.

acidiphile : qui aime les sols acides.

adventice : plante étrangère à la flore spontanée, ne se maintenant pas longtemps dans ses stations.

aérohaline : espèce vivant dans une zone aspergée par les embruns salés.

agri-environnementale : mesure mise en place par la Politique Agricole Commune destinée à soutenir des pratiques

agricoles respectueuses de l’environnement.

alcalin : synonyme de basique.

allochtone : étranger

amphiphyte : plante de bordure de plan d’eau, tantôt inondée, tantôt exondée.

anaérobie : qui peut se développer en absence d’oxygène.

anémogamie : pollinisation par le vent.

anémomorphosé : à silhouette modelée par le vent.

annuelle : plante accomplissant son cycle de développement complet en moins d’un an.

anthropique, anthropisé : sous l’action directe ou indirecte de l’homme.

appétente : attractive pour le bétail.

azoïque : dépourvu de toute vie animale.

barycentre : en biogéographie, coeur de la répartition d’une espèce.

basique : riche en bases (à pH élevé).

baso-neutrophile : aimant les sols à pH voisin de la neutralité ou franchement basique (>6).

bétulaie : peuplement de bouleaux.

biogéographique : qui concerne la répartition des êtres vivants.

biomasse : masse de matière vivante produite par une communauté par unité de surface.

bionomique : qui concerne les rapports entre les êtres vivants et le milieu.

bisannuelle : plante dont le développement complet exige 2 ans.

brunisol : sol caractérisé par la formation d’un horizon (B) d’altération, coloré en brun par les oxydes de fer (autrefois sol brun).

bryophytes : groupe de végétaux cryptogames comprenant les mousses, les hépatiques et les sphaignes.

caducifolié : à feuillage tombant chaque hiver.

calcicole, calcaricole : croissant sur les sols calcaires.

calcifuge : qui fuit les sols calcaires.

cariçaie : peuplement de laîches (genre Carex, famille des Cypéracées).

cespiteuse : formant une touffe.

chaméphyte : plante ligneuse basse dont la hauteur est inférieure à 50 cm.

chasmophyte : plante croissant dans les fissures des rochers.

climax : stade terminal de l’évolution naturelle de la végétation en un lieu donné.

collinéen : étage de la végétation des plaines et basses montagnes en région tempérée (0-800 m).

continentale : typique de conditions climatiques propres aux régions du centre de l’Europe (hivers froids, étés chauds), par opposition au climat atlantique (hivers frais, étés tempérés). Parfois aussi utilisé en opposition à « littorale » : falaises continentales = falaises de l’intérieur des terres/falaises littorales = falaises maritimes.

coupe d’ensemencement : coupe sélective dans une futaie pour permettre l’apparition de semis.

crassulescente : plante à tissus gorgés d’eau (plante « grasse »).

crénobiontes : organismes se développant uniquement dans ou à proximité des sources.

crustacés (lichens) : lichens appliqués étroitement contre le substrat.

cryptogames : ensemble des végétaux se reproduisant sans fleurs (mousses, fougères, lichens, algues, champignons).

dendrologique : qui concerne les arbres.

détritivores : organismes (bactéries, champignons, insectes, vers) se nourrissant de débris animaux et végétaux.

diploïde : cellule (et par extension, organisme) dont les chromosomes sont présents par paires.

domaine : division biogéographique d’un territoire, appartenant à une région et comprenant un ou plusieurs secteurs.
Ex. : l’ensemble du Poitou-Charentes appartient à la région eurosibérienne, au domaine atlantique et au secteur francoatlantique
(la différenciation se faisant au niveau des sous-secteurs).
dystrophe : eau colorée en brun par l’abondance des acides humides.

écomorphologique : adaptation du port de certaines espèces à des facteurs environnementaux contraignants.

écorchée : pelouse discontinue laissant voir des plages de sol nu plus ou moins larges entre les végétaux.

écosystémique : qui concerne l’écosystème.

écotone : zone de transition entre deux milieux différents.

édaphique : qui concerne le sol.

entomofaune : la faune des insectes.

épiphytique : qui se sert d’un autre végétal comme support.

épipotamon : zone supérieure des rivières planitiaires, caractérisée par un débit calme, des variations annuelles de
température assez fortes et des biocénoses aquatiques comprenant davantage d’espèces lentiques, dont des macrophytes
(syn. « zone du Barbeau »).

épizoochorie : dispersion des semences par les animaux mais sans passer par leur système digestif (pelage, plumes, etc.).

espèce patrimoniale : espèce animale ou végétale considérée, en fonction de différents critères, comme rare ou menacée à une échelle géographique quelconque (départementale, régionale, nationale, européenne, mondiale) et inscrite en tant que telle à un ument officiel (texte juridique, liste scientifique).

estran : sur le littoral, zone de balancement des marées (syn. : étage médio-littoral).

étage supra-littoral : zone littorale située juste au-dessus de la limite atteinte par les plus hautes mers mais exposée régulièrement aux aspersions, aux embruns, etc.

eurytherme : espèce capable de se développer dans un large spectre de températures.

eutrophe : riche en nutriments.

eutrophisation : enrichissement, naturel ou anthropique, d’un milieu (sol, eau) en substances nutritives.

évapotranspiration : cumul de la transpiration des plantes et de l’évaporation du sol en un lieu donné.

exogène : externe.

faciès : aspect particulier de la végétation conféré par la dominance d’une espèce végétale.

frutescente : ligneuse.

fruticée : formation végétale structurée par des ligneux bas (arbustes, arbrisseaux).

fruticuleux (lichen) : lichen à thalle dressé et ramifié, attaché au substrat en un seul point.

furetage : ancien mode de gestion d’un taillis forestier consistant à ne prélever sur chaque souche que les brins ayant une dimension pré-définie.

futaie jardinée : futaie irrégulière, composée d’arbres d’âge, de diamètre et de hauteur variés.

géophyte : plante vivace par ses organes enfouis dans le sol : bulbe, rhizome, tubercule.

gley : horizon pédologique engorgé par une nappe d’eau permanente et où l’asphyxie provoque une réduction du fer qui
colore la couche en gris bleuâtre ou verdâtre.

graminéenne, graminiforme : qui ressemble à une graminée (Poacées).

granulométrie : analyse physique du sol basée sur le tri des éléments en fonction de leur diamètre (sables/limons/argiles).

halomorphie : modification des caractéristiques d’un sol par la présence de sel (chlorure de sodium).

halonitrophile : plante aimant les sols salés et riches en azote.

halophile : plante croissant sur des sols salés ou saumâtres.

halophyte : végétal adapté physiologiquement à la croissance sur des sols salés.

haut-marais : tourbière où les bombements de sphaignes sont suffisamment élevés pour ne plus permettre une alimentation
de la végétation en eau que par les seules précipitations.

héliophile : qui aime la lumière.

hélophyte : végétal vivace dont les organes de renouvellement sont enfouis dans la vase

hémicryptophyte : végétal vivace dont les bourgeons persistant l’hiver sont situés au ras du sol.

holorganique : horizon pédologique constitué uniquement de matière organique.

hydrochorie : dispersion des semences par l’eau.

hydrodynamisme : phénomènes impliqués dans le déplacement des masses d’eau (courants, houle, marées, turbulences).

hydromorphie : modification des caractéristiques d’un sol par la présence, temporaire ou permanente, d’une nappe d’eau.

hydromull : mull se développant en milieu temporairement humide mais aéré et à bonne activité biologique.

hydrophyte : plante aquatique dont les organes de renouvellement passent l’hiver sous le plan d’eau.

hydrosystème : système composé de l’eau et des milieux aquatiques associés dans un ensemble géographique délimité
(bassin versant, réseau hydrographique).

hygro-nitrophyte : plante croissant sur des sols humides et riches en azote.

hygrophile : végétal ayant besoin d’importantes quantités d’eau pour son développement.

hypertrophe : très riche en substances nutritives.

ichtyofaune : faune des poissons.

indigénat : caractère d’une espèce indigène, spontanée, dans un lieu donné.

inféodé : étroitement lié à.

introgressée : infiltration du génome d’une espèce par les gènes d’une autre espèce à la suite d’hybridations successives.
Par extension : mélange, immixtion.

lentique : qui se développe dans des eaux calmes (lacs, mares).

lithophyte : plante poussant sur des sols rocheux.

lithosol : sol superficiel, très peu évolué, presque réduit à la roche mère à peine fragmentée.

lotique : qui se développe dans les eaux courantes (ruisseaux, rivières).

macrophyte : végétal aquatique de taille macroscopique.

manteau : végétation arbustive (souvent avec des lianes), se développant en linéaire ou frange plus ou moins large en
lisière de forêt.

marcottage : multiplication végétative d’une plante dont une partie aérienne s’enracine et donne naissance à un nouvel
individu (ronces, fraisier).

marnage : différence de niveau entre les hautes eaux et les basses eaux (mer, étangs, cours d’eau).

médio-européenne : des régions centrales de l’Europe (opposé à « atlantique »).

mégaphorbiaie : peuplement de hautes herbes (dicotylédones) se développant sur des sols frais et riches.

mésohydrique, méso-hygrophile : vivant dans des conditions moyennes d’humidité.

mésophyte : végétal croissant dans des conditions moyennes d’humidité.

messicole : plante croissant comme « mauvaise herbe » dans les champs de céréales.

météorique : venu du ciel. Les eaux météoriques : eaux de pluie.

minéralisation : transformation de la matière organique en substances minérales par les micro-organismes.

mull : humus se formant à partir de végétaux riches en azote sur des sols à pH neutre ou basique où l’action des microorganismes
est très active.

muricole : croissant sur les murs.

mycorrhize : association à bénéfices réciproques entre un champignon et les racines d’une plante supérieure.

nanophanérophyte : plante ligneuse haute de 50-300 cm (arbrisseaux, arbustes).

nano-thérophyte : plante annuelle ne dépassant pas 10 cm de hauteur.

néoluvisol : sol caractérisé par une assez faible altération de la roche-mère, une modeste migration des argiles et du fer
aux dépens des horizons supérieurs et une coloration des horizons d’accumulation en brun par les oxydes de fer (autrefois
sol brun lessivé).

néophyte : plante récemment introduite.

neutrocline : croissant sur des sols à pH proche de la neutralité.

nitrate : produit de l’oxydation de l’azote atmosphérique par les micro-organismes dans le sol ou l’eau.

nitrification : transformation des dérivés ammoniacaux du sol en nitrates par des bactéries.

nitrophile : espèce aimant les milieux riches en nitrates.

nitrophyte : végétal croissant sur les sols riches en nitrates.

nutriment : substance nutritive nécessaire au développement des organismes animaux et végétaux.

oligotrophe : pauvre en substances nutritives.

ombrogène : type de tourbière ne pouvant se développer que dans les régions à fortes précipitations.

ombrotrophe : alimenté uniquement par les eaux de pluie (tourbière ombrotrophe).

ornithochore : à semences dispersées par les oiseaux.

ourlet : lisière herbacée d’un peuplement forestier.

paratourbeuse : sol dont l’épaisseur de tourbe est inférieure à 40 cm.

paucispécifique : pauvre en espèces.

pédoflore : ensemble des micro-organismes végétaux présents dans le sol (algues, champignons, bactéries).

pédologique : qui concerne le sol.

pétrographique : qui concerne la nature de la roche-mère d’un sol.

pH : mesure de l’acidité (ou de basicité) d’un sol à l’aide de sa concentration en ions hydrogène.

phalaridaie : peuplement dense de Baldingère Phalaris arundinacea.

phanérogame : plante à fleurs.

phanérophyte : plante ligneuse haute (arbres).

phénologie : étude des variations temporelles des phases de développement des organismes.

phragmitaie : peuplement dense de Phragmite ou Roseau commun Phragmites australis.

phytocénose, phytocénotique : communauté végétale.

phytophage : qui consomme des végétaux.

phytosociologique : qui a trait à la phytosociologie, science étudiant la façon dont les végétaux sont groupés dans la nature.
planitiaire : des plaines au sens strict (par opposition à « collinéen » qui englobe également des altitudes allant jusqu’à
800 m).

planosol : sol hydromorphe développé sur matériau très riche en argile.

podzolisation : appauvrissement des horizons supérieurs du sol sous l’action d’acides organiques aboutissant à la formation
d’un horizon éluvial cendreux, très appauvri, et d’un horizon d’accumulation du fer et de l’humus.

potamon : partie inférieure d’un cours d’eau où la pente, inférieure à 1%, conditionne une vitesse de courant très faible
qui induit souvent, en période estivale, un déficit en oxygène dissous.

prairiale : espèce croissant de préférence en prairie.

primaire : non modifié par l’homme. En situation primaire : en situation naturelle.

pseudogley : sol à horizon temporairement engorgé par une nappe perchée saisonnière.

ptéridophytes : cryptogames vasculaires comprenant les fougères, les prêles et les lycopodes.

rendzine : sol peu évolué se développant sur roche calcaire, caractérisé par un horizon humifère épais reposant directement
sur la roche mère.

reviviscence : propriété de certains organes ou organismes de reprendre vie après une période de dessication plus ou
moins longue (mousses, lichens, notamment).

rhéophile : adapté aux eaux courantes.

rhithron : partie d’une rivière située entre sa source et la zone où la température moyenne de l’eau reste inférieure à 20°C,
le courant est marqué, le lit constitué de cailloux ou de graviers et la teneur en oxygène dissous est élevée.

ripisylve : forêt bordant un cours d’eau.

rudérale, rudéralisé : végétation (ou milieu) se développant à proximité des lieux occupés ou modifiés par l’homme :
chemins, décombres, terrains vagues, etc.

rupicole : espèce vivant sur des substrats rocheux.

samare : fruit sec de certains arbres (érables, ormes) muni d’une aile servant à sa dispersion par le vent.

saproxylophage : insecte se développant ou se nourrissant dans le bois mort.

schorre : partie médiane et supérieure de l’estran recouverte seulement par les fortes marées.

sciaphile : qui aime l’ombre.

secondaire : ayant subi des modifications d’origine humaine.

sempervirence : caractère des espèces végétales dont les feuilles ne tombent pas à chaque mauvaise saison et persistent
durant plusieurs années.

silicicole : plante vivant sur des sols siliceux (= plante fuyant le calcaire).

slikke : partie inférieure de l’estran, recouverte à chaque marée.

sphaignes : groupe de bryophytes caractéristiques des tourbières acides.

stagnophile : qui aime les eaux stagnantes.

subhalophile : qui préfère les sols présentant un léger taux de salinité.

succulence : végétal ou organe dont les tissus sont gorgés d’eau (orpins, salicornes).

sylvigénétique : qui a trait aux étapes successives de la dynamique naturelle d’une forêt.

sylvofaciès : physionomie d’une station forestière résultant de la gestion sylvicole et plus ou moins éloignée du climax.

symbiose : relation de bénéfice mutuel entre deux organismes (ex. : les mycorrhizes).

synsystème : schéma hiérarchisé en niveaux emboîtés de la végétation française.

synusie : faciès saisonnier d’une communauté végétale (Ex. : synusie printanière d’une chênaie-charmaie). Egalement :
communauté d’organismes inféodés à un habitat très spécialisé (Ex. : synusie des insectes liés au bois mort couché).

talweg : points les plus bas d’un vallon.

tétraploïde : à cellules comprenant 4 lots de chromosomes (au lieu des 2 lots des cellules diploïdes normales).

thermo-atlantique : secteur bioclimatique du centre-ouest et du sud-ouest de la France, caractérisé par une température
moyenne annuelle >12°C et un net déficit des précipitations en été.

thermophile : organisme exigeant en chaleur.

thérophyte : végétal bouclant tout son cycle biologique en moins d’un an (syn. : annuel).

topogène : tourbière qui doit son origine à sa situation dans une dépression alimentée par les eaux de ruissellement.

touradon : grosse touffe apparaissant chez certaines Poacées ou Cypéracées cespiteuses par surélévation progressive de
la souche au fil des années. Certains touradons de grandes laîches peuvent dépasser 1 m de hauteur.

transgression : en géologie, caractérise une hausse du niveau marin et la submersion consécutive de nouvelles terres.
En phytosociologie, qualifie une espèce végétale caractéristique d’un groupement et qui se retrouve comme compagne
dans un autre groupement.

troglophile : espèce animale passant tout ou partie de sa vie dans les cavités souterraines.

trophique : qui concerne la richesse en nutriments (d’un sol, d’une eau, d’un milieu en général).

turbidité : teneur d’un liquide (eau d’une rivière, d’un étang) en particules en suspension.

turficole : espèce se développant sur les sols tourbeux et les tourbières.

turfigène : générateur de tourbe.

typhaie : peuplement dense de massettes (Typha sp., Cypéracées).
vasculaires : plantes munies de vaisseaux conduisant l’eau et les nutriments (ex. : les phanérogames et les fougères).
vernal : du printemps.

xénophyte : espèce non indigène, originaire d’une région plus ou moins éloignée.

xérophile : plante croissant dans des conditions de sécheresse accusée.

xérosère : série de végétation se développant à partir d’un stade initial très sec. Ex. : la xérosère dunaire.

zonation : disposition des communautés en fonction d’un gradient écologique essentiel.

zoochore : plante dont les semences sont dispersées par les animaux.

le glossaire peut être téléchargé au format PDF ici

Index des fiches

Milieux littoraux (voir)

1/ Prés salés

2/ Plages et dunes

3/ Falaises maritimes atlantiques

4/ Vasières, estuaires et lagunes

Milieux aquatiques (voir)

5/ Eaux calmes

6/ Eaux courantes

Milieux palustres (voir)

7/ Rivages avec végétation

8/ Bas-marais

9/ Prairies humides

10/ Tourbières

11/ Végétation annuelle temporairement inondée

Milieux herbacés (voir)

12/ Dalles rocheuses

13/ Pelouses et prés maigres

14/ Prairies grasses

Milieux arbustifs (voir)

15/ Fourrés

16/ Landes

Milieux arborés (voir)

17/ Lisières herbacées (ourlets)

18/ Coupes forestières

19/ Forêts caducifoliées non hygrophiles

20/ Forêts caducifoliées hygrophiles

21/ Forêts sempervirentes

22/ Forêts de coniferes
-* Forêts de pin maritime

Milieux rupestres (voir)

23/ Parois rocheuses

24/ Grottes

25/ Milieux rocheux anthropogènes

Milieux rudéraux (voir)

26/ Terrains piétinés et rudéraux

27/ Cultures de plantes ligneuses

28/ Cultures herbacées

Milieux anthropiques (voir)

29/ Villes et villages

ATTENTION : la version papier et complète du Guide des habitats, soit 476 pages en couleur au format 17×24 cm au prix spécial de lancement de 29 € au lieu de 35 €, prix public, va paraître début septembre 2012. Si vous êtes intéressé pour avoir toutes ces fiches sous la main en permanence, contactez-nous dès maintenant en cliquant ici pour nous envoyer un mail ou appelez-nous au 05 49 88 99 23.

Cladiaie (formations à Marisque)

Rédacteur : David Ollivier

Physionomie-écologie

La physionomie de cet habitat est très marquée par la présence abondante du Marisque, parfois monospécifique. Il s’agit d’une grande Cypéracée colonisatrice d’environ 2 à 3 mètres de haut, aux feuilles extrêmement coupantes, connue localement sous le nom de « rouchis ». Elle peut former un peuplement dense, pauvre en espèces végétales, la cladiaie (ou le « rouchis »). Il s’agit d’une espèce hygrophile, qui supporte mal les périodes d’exondation prolongées. Les cladiaies occupent les dépressions humides, les fonds de vallées, les bords de cours d’eau et les milieux alluviaux gorgés d’eau. Elles peuvent se développer à la surface des eaux lorsqu’elles sont peu profondes (moins de 1 mètre car les marisques doivent tout de même ancrer leurs racines dans le substrat) et forment alors un habitat flottant nommé aussi radeau ou tremblant. Sous leurs formes terrestres, les cladiaies peuvent coloniser d’autres habitats naturels tourbeux ou minéraux associés, plutôt alcalins, voire légèrement acides, notamment des bas-marais alcalins, des phragmitaies, certaines magnocariçaies ou encore des prairies humides tourbeuses ou paratourbeuses à Molinie.

Les peuplements denses de Marisque, de composition floristique relativement peu diversifiée, semblent en revanche être favorables à une forte diversité des espèces animales et notamment de l’entomofaune. Cette entomofaune est liée au tapis de litière épaisse qui se développe au pied des marisques.
Inversement, lorsque les cladiaies sont plus aérées, la diversité et l’originalité floristique sont généralement plus élevées au détriment de la diversité faunistique.

Cet habitat se caractérise par une certaine persistance hivernale des tiges aériennes sèches et donc par le maintien de sa structuration verticale.
Les cladiaies peuvent se développer en mélange avec d’autres espèces d’hélophytes et, notamment, avec des espèces du cortège des roselières telles que le Roseau Phragmites australis, le Scirpe des marais Schoenoplectus lacustris ou les Massettes (Typha sp.).

Phytosociologie et correspondances typologiques

PVF2004

  • PHRAGMITO AUSTRALIS – MAGNOCARICETEA ELATAE in Klika et Novak 1941
    • MAGNOCARICETALIA ELATAE Pignatti 1954 : communautés des sols riches en matière organique, à éléments fins, mésotrophes à eutrophes
      • Magnocaricion elatae Koch 1926

CORINE 1991

  • 53.31 Cladiaies des bas-marais alcalins, riches en espèces (cortège du CARICION DAVALLIANAE, ou du CARICION LASIOCARPAE)
  • 53.33 Cladiaies acidophiles riveraines, paucispécifiques (bords de rivières et d’étangs, cortège du PHRAGMITION)

Directive Habitats 1992

7210* – Marais calcaires à Cladium mariscus et espèces du Caricion davallianae (habitat prioritaire)

Confusions possibles

Il n’existe pas ou peu de confusion possible pour cet habitat. Il faut cependant faire attention à décrire les cladiaies sans oublier de caractériser le biotope associé ou colonisé par le Marisque. Ce dernier peut avoir en effet autant de valeur patrimoniale régionale, si ce n’est plus, que la cladiaie elle-même. Par exemple le Marisque peut coloniser les bas-marais alcalins, habitat à forte valeur patrimoniale. Le gestionnaire fera ensuite le choix de l’habitat à privilégier par la mise en œuvre d’une gestion adaptée. Les cladiaies que l’on observe dans les dépressions humides arrière-dunaires sont traitées dans le cadre des roselières et des cariçaies des lèdes (Fiche : Dépression humides arrière-dunaires).

Dynamique

Les cladiaies représentent un stade dynamique des bas-marais sur tourbe, principalement alcaline. Elles se développent sur sols basiques à neutres, éventuellement légèrement acides. L’importance des inondations (fréquence et durée) va conditionner l’évolution de cet habitat. Ainsi, au sein des stations les moins inondées, les cladiaies sont généralement moins denses et donc plus diversifiées. Lorsque les inondations sont plus répétées et prolongées, ce sont les espèces des roselières sur tourbe (PHRAGMITION COMMUNIS) qui persistent. Les cladiaies présentent alors une diversité floristique plus faible.

Lors du développement à la surface d’une eau peu profonde, les cladiaies conduisent à l’atterrissement de la mare ou de l’étang, par progression vers le centre, mais aussi vers le fond par épaississement du radeau formé par les racines. Une partie du radeau se trouve alors au dessus de la surface de l’eau. L’alimentation en eau de pluie du réseau flottant de racines conduit à une certaine acidification du milieu. La cladiaie évolue alors progressivement vers un groupement plus acidophile – la cariçaie de transition – dans laquelle les espèces acidophiles, ainsi que les buttes de sphaignes, peuvent se développer.

Comme pour les « cladiaies-radeaux », si l’alimentation en eau de pluie est importante, les cladiaies « terrestres » peuvent connaître une acidification du milieu qui permettra l’installation des sphaignes et des espèces des bas-marais et hauts-marais acides.
En revanche, si l’alimentation par les eaux de pluie est faible, les sphaignes ne pourront s’installer et la dynamique naturelle conduira au stade ultime d’une cladiaie dense. Celles-ci ont la particularité d’accumuler un important tapis de litière empêchant assez efficacement la germination. Dans ces conditions, les cladiaies sont relativement pauvres en espèces végétales, stables et leur boisement reste difficile.

La fauche peut faire réapparaître temporairement des espèces des bas-marais alcalins (CARICION DAVALLIANAE), avant la repousse assez rapide de la cladiaie (lorsque les fauches ne sont pas trop répétées).

Le boisement, lorsqu’il est possible, comme c’est le cas quand l’épaisse litière est dégradée par des passages répétés de grands mammifères, conduit aux fourrés ou bois tourbeux (saulaie à bourdaine, aulnaie marécageuse) ; dans ces conditions, le Marisque, espèce héliophile, régresse et peut finir par disparaître.
L’assèchement du milieu va remettre en cause la préservation de la cladiaie au profit d’espèces plus adaptées, alors que l’eutrophisation de l’eau va être favorable au Roseau commun au détriment du Marisque.

Espèces indicatrices

[plante2] *Anacamptis palustris, *Carex lasiocarpa, Carex lepidocarpa, Cladium mariscus, *Euphorbia palustris, Hydrocotyle vulgaris, *Lathyrus palustris, Lysimachia vulgaris, Lythrum salicaria, *Menyanthes trifoliata, Sanguisorba officinalis, Serratula tinctoria, Schoenoplectus tabernaemontani, Samolus valerandi, Schoenus nigricans, *Spiranthes aestivalis, *Thelypteris palustris
[plante1] Carex elata, Cirsium tuberosum, Frangula alnus, Juncus subnodulosus, Oenanthe lachenali, *Ranunculus lingua, Salix atrocinerea
[briophytes] Calliergonella cuspidata, Campylium stellatum, Drepanocladus lycopodioides
[oiseaux] Acrocephalus schoenobaenus, Circus aeruginosus
[mollusques] Carychium minimum, Deroceras laeve, Euconulus spp, Oxyloma elegans, Succinea putris, Vertigo antivertigo, Vertigo moulinsiana, Zonitoides nitidus
[orthopteres] Conocephalus discolor, Conocephalus dorsalis

Valeur biologique

Les cladiaies denses présentent un fort intérêt lié à la présence de certains insectes, araignées et mollusques (Vertigo sp.) originaux fréquentant le tapis de litière accumulée. Ce dernier engendre l’existence de conditions de vie très particulières qui permettent à des insectes méditerranéens et xéro-thermophiles de fréquenter des zones parfois éloignées de leur aire de répartition d’origine.

Les cladiaies ouvertes et aérées présentent un intérêt floristique plus marqué, mais entomologiquement plus faible. L’originalité floristique est liée bien souvent à l’habitat d’origine qui a été colonisé par le Marisque et qui présente une forte valeur patrimoniale régionale (bas-marais alcalin, par ex.).

Menaces

Cet habitat naturel a connu une forte régression au cours du XXème siècle sur le territoire national et au niveau européen. La cladiaie figure ainsi parmi les habitats menacés prioritaires sur la Directive Européenne pour la conservation des Habitats et de leurs espèces.

Tout ce qui porte atteinte à la qualité, la quantité d’eau et son écoulement naturel est néfaste à la conservation de cet habitat. C’est ainsi que les modifications des pratiques agricoles liées à leur intensification, les opérations de drainage (assèchement, altération de la qualité de l’eau), l’épandage d’engrais et de produits phytosanitaires (eutrophisation), le comblement par des remblais, les modifications du fonctionnement hydrologique des cours d’eau (canalisation, barrage…) ont conduit à la destruction et la raréfaction des cladiaies (formations à Marisque).

Dans les situations où le boisement est possible l’abandon d’entretien régulier par fauche peut être une cause de disparition de l’habitat par dynamique naturelle.


Statut régional

Dans la région Poitou-Charentes, ce type de milieu est rare et très disséminé, mais il peut localement couvrir des surfaces étendues (plusieurs dizaines d’hectares dans certains sites favorables).

Sites remarquables :

16 : Marais de Gensac

17 : Marais de l’Anglade

79 : Tourbière de Prin-Deyrançon

86 : Basse vallée de la Gartempe (St-Pierre-de-Maillé) ; tourbière des Régeasses, à Montmorillon

 

Bibliographie générale

BARDAT J. et al., 2004Prodrome des végétations de France. Publications scientifiques du Muséum National d’Histoire Naturelle. 171 pages.

CAHIERS D’HABITATS NATURA 2000 – 2002Habitats humides. La umentation française. 457 pages.

CAHIERS D’HABITATS NATURA 2000 – 2004Habitats côtiers. La umentation française. 399 pages.

CAHIERS D’HABITATS NATURA 2000 – 2005Habitats agro-pastoraux. Vol. 1 et 2. La umentation française.445 p. + 487 pages.

CORINE biotopes manual, 1991Habitats of the european community. Data specifications part 2. Luxembourg. 300 pages.

CORINE biotopes, 1997 – Version originale – Types d’habitats français. ENGREF Nancy. 217 pages.

DELARZE R., GONSETH Y., GALLAND P., 1998Guide des milieux naturels de Suisse. Delachaux et Nietslé. 415 pages.

FOUCAULT B. de, 1984 – Systémique, structuralisme et synsystématique des prairies hygrophiles des plaines atlantiques françaises. Thèse université de Rouen. 672 pages.

JOURDE P., TERRISSE J. (coord.), 2001Espèces animales et végétales déterminantes en Poitou-Charentes. Coll. Cahiers techniques du Poitou-Charentes, PCN Poitiers, 154p.

Ouvrage collectif, 2004Guide des milieux forestiers en Aquitaine. CRPF Bordeaux. 108 pages.

POITOU-CHARENTES NATURE, TERRISSE, J. (coord. éd), 2006Catalogue des habitats naturels du Poitou-Charentes. Cahiers techniques du Poitou-Charentes, PCN, Poitiers. 68p.

RAMEAU J-C., GAUBERVILLE C., DRAPIER N., 2000Gestion forestière et diversité biologique : identification et gestion intégrée des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. ENGREF, ONF, IDF.

ROMAO Carlos (compil.), 1997Manuel d’interprétation des habitats de l’Union Européenne. Version EUR 15. Commission européenne DG XI. 109 pages.

SOCIETE BOTANIQUE DU CENTRE-OUEST, 1998Liste rouge de la flore menacée en Poitou-Charentes. Bulletin SBCO Tome 29, pp.669-686.

TERRISSE J., 2000Habitats déterminants en Poitou-Charentes. LPO. 25 pages.